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Emily était nerveuse. Un peu. Debout devant son miroir, une dizaine de tenues éparpillées sur son lit et le fauteuil de son bureau, elle observait le reflet de sa silhouette d’un air critique et bien peu satisfait. Non, Emily n’espérait pas trouver l’âme sœur à ce speed dating – elle ne croyait que moyennement à ce genre de rencontres – mais elle ne pouvait pas s’empêcher de sentir poindre un drôle de mélange de stress et d’excitation. Le stress de l’inconnu, puisque c’était la première fois qu’elle participait à ce genre d’évènement, la curiosité de savoir sur qui elle allait tomber aussi. Elle espérait surtout ne pas tomber sur quelqu’un qu’elle connaissait. Si elle tombait sur un collègue… Ou pire, sur son grand-père ! Noooon, elle n’allait pas tomber sur Klaus quand même ! Ou sur Anthony ? Alors là ce serait le ponpon. Elle qui lui affirmait haut et fort encore deux jours avant qu’elle n’avait pas besoin d’un speed dating pour se trouver quelqu’un… Quelle blague. Avec une grimace, Emily laissa retomber la robe qu’elle venait d’essayer sur le sol et passa à la suivante. Rien ne la satisfaisait. Non vraiment, qu’allait-elle encore faire dans cette galère ? Elle aurait mieux fait de traîner Archie au cinéma avec Pongo, au moins elle n’aurait pas eu à se soucier de faire bonne figure ou d’être séduisante. Être sexy était décidément un exercice bien compliqué, et la demoiselle avouait bien volontiers ne pas savoir du tout comment s’y prendre. Les poings sur les hanches, Emily scruta la masse informe de vêtements, puis décida de se fier au Destin et piocha au hasard une robe bleue qu’elle enfile en quatrième vitesse avant de relever ses cheveux en chignon lâche dont s’échappaient des boucles brunes et d’apposer les dernières touches de maquillage. Prête ? Prête, chef, songea-t-elle en inspirant un grand coup, et après un dernier coup d’œil dans le miroir, elle sortit en trombe de sa chambre, enfila ses chaussures à talons en sautillant, et se mit en route.

Lorsqu’elle arriva sur place, elle alla à l’accueil, récupéra le petit badge à son nom – en forme de cœur, sérieusement ils n’avaient pas trouvé plus kitsch à la mairie ? se demanda-t-elle en souriant – et se dirigea vers la table qui lui avait été assignée pour ce premier tour. Laissant son manteau sur le dossier de la chaise, elle profita du fait que son premier partenaire n’était pas encore arrivé pour sortir son portable de son sac et vérifier que l’hôpital n’avait pas essayé de l’appeler. L’écran n’affichait aucun appel manqué. Parfait. Visiblement elle allait bel et bien avoir sa soirée pour elle. Rangeant le petit objet dans son sac, elle leva les yeux pour dévisager les nouveaux arrivants et essayer de deviner qui serait son premier date, tout en jouant distraitement avec l’un des pétales de rose qui avaient été éparpillés sur la table autour de la bougie qui trônait sur le côté. Pour le côté romantique, sûrement.

Alors qu’elle regardait de l’autre côté en suivant une de ses connaissances du regard, elle perçut un mouvement en face d’elle et leva les yeux vers son vis-à-vis… Avant d’étouffer une exclamation de surprise.

« Dites-moi que c’est une plaisanterie ! » s’exclama-t-elle avant d’éclater de rire. « Victor ? C’est toi mon premier rendez-vous ? Mon chef ? Alors ça c’est la meilleure. Moi qui me disais justement que le boulot allait enfin me laisser tranquille… »

Au moins, Emily se sentait nettement moins nerveuse. Certes, elle savait que Victor Whale était un séducteur invétéré, mais elle savait aussi qu’elle avait bien peu de chances de l’intéresser – ne serait-ce que parce qu’ils travaillaient ensemble ou étaient à la longue devenus de très bons amis. C’est donc rassurée, qu’Emily croisa les bras sur la table et se pencha vers son interlocuteur, un sourire malicieux aux lèvres et le regard pétillant.

« Mais dites-moi Dr Whale, qu’est-ce qu’un homme comme vous fait à un de ces speed dating ? J’aurais pensé que tu n’avais qu’à lever le petit doigt pour trouver une conquête… Qu’est-ce que tu cherches en ce merveilleux soir de la St Valentin ? Une jolie fille ? Tromper l'ennui ? L'âme soeur, peut-être ? »

Passé le premier instant de forte envie de fuir à toute jambe pour rentrer s’enterrer sous sa couette et ne plus jamais à l’hôpital pour ne plus croiser Victor qui allait sûrement se moquer d’elle, ce vil coquin, Emily s’était détendue. Evidemment que non, Victor n’allait pas se moquer d’elle. Pas méchamment en tout cas ? Victoir était beaucoup de choses, mais il n’était pas méchant. A vrai dire c’était plutôt elle la plus narquoise des deux, à bien y réfléchir, même si elle se donnait de beaux airs avec sa bouille de grande adolescente innocente. Être un lutin avait parfois quelques avantages, comme voir les autres lui donner le bon Dieu sans confession. Heureusement, elle était suffisamment honnête pour ne pas en jouer… Du moins, pas trop souvent. Juste ce qu’il fallait.

- Et oui navré de décevoir, ce n'est que moi. Avait répliqué Victor non sans son habituel humour pince-sans-rire. Ce à quoi Emily répliqua par un sourire radieux, comme d’habitude. Déçue, Emily ? Certainement pas. Elle préférait de loin tomber sur lui que sur un inconnu bizarre avec qui elle n’aurait jamais su quoi dire. Elle adorait Victor. Comme avec tous les gens auxquels elle s’attachait, nature de lutin oblige, elle ne faisait jamais dans la demi-mesure. Ils s’étaient toujours bien entendus, même avant la fin de la malédiction, et même après lorsqu’ils avaient récupéré leurs souvenirs et qu’elle lui avait avoué être un lutin du père Noël, ils étaient restés inséparables. Il avait changé depuis la fin de la malédiction, probablement plus qu’elle. Elle l’avait vu s’assombrir, se détacher, être rongé par elle ne savait quoi mais qu’elle devinait lié à quelque chose qui n’était pas Storybrooke. Des regrets ? Quelqu’un ? Elle ne lui avait pas posé la question, se contentant de continuer à le suivre partout en trottinant. Docteur Frankenstein. Si elle s’y était attendue, quand même ! Le livre de Mary Shelley avait toujours figuré parmi ses préférés, mais de là à ce que l’un de ses meilleurs amis en soit l’un des protagonistes, bonjour la surprise. Mais ça n’avait rien changé, après tout. Victor était Victor, Victor restera Victor.

-Je ne suis pas un aussi grand tombeur que tu sembles le croire, plus depuis la fin de la malédiction en tout cas. Je...En toute honnêté je suis venu dans l'espoir de voir quelqu'un...Et toi, venu chercher le garçon idéal. Un prince peut-être ?

Quelqu’un ? L’oreille d’Emily se dressa, folle de curiosité, mais elle le connaissait suffisamment bien pour savoir que l’interroger directement ne lui apporterait aucune réponse. Quand il le voulait, il pouvait être une véritable huître. Néanmoins, l’étincelle dans le regard de la jeune femme ne pouvait tromper personne. Elle n’était vraiment pas douée ou cacher ses sentiments ou mentir. Alors prétendre que l’information ne l’intéressait pas aurait été hautement hypocrite et surtout infaisable. Et Victor l’avait probablement bien compris. Emily tout sourire posa son coude sur la table et son menton au creux de sa paume, observant son patron bien aimé sans même chercher à dissimuler son amusement.

« Tu trouves vraiment que j’ai une tête à prince charmant ? Au mieux je tomberai sur un autre lutin, au pire je finirai avec un yéti ou un farfadet. Pour le glamour on repassera. » fit-elle en lui dédiant un clin d’œil. « Mais dis moi donc, qui donc es-tu venu voir ? Je la connais ? Elle s’appelle comment ? Elle est où ? »

Si Emily s’empêchait de trépigner sur place, ce n’était pas l’envie qui lui manquait. Au lieu de ça, elle posa sa main sur celle de Victor et enchaîna :

« Je suis tellement contente que tu te trouves quelqu’un ! Tu avais l’air si sombre ces derniers temps, je commençais à m’inquiéter… Allez, raconte tout à tata Emily, tu sais que je ne te lâcherai pas tant que tu ne m’auras pas donné deux ou trois infos ! »