Un speed dating. Lupin esquissa un sourire face à son miroir alors qu’il ajustait le col de sa chemise blanche avec soin, dans un souci de perfection de présentation qui lui était propre depuis des années. Toujours être tiré à quatre épingles, toujours être élégant. Irréprochable. Arsène Lupin avait beaucoup de défauts, mais il refusait de donner de lui l’image d’un homme négligé. Qu’il pleuve, qu’il neige, qu’il vente, qu’il donne une performance, cambriole une maison ou séduise une demoiselle, il fallait toujours qu’il soit impeccablement mis. Question de standing. Il en avait déjà l’habitude avant la malédiction, mais lorsqu’il avait découvert il y avait quelques temps l’image de séducteur galant et séduisant qu’il avait dans la littérature de ce monde, il avait décidé de ne pas décevoir ses lecteurs. Il leur devait bien ça, non ? Finalement satisfait de son apparence, il dédia à son reflet un sourire un tantinet carnassier alors que ses yeux pétillaient de malice. Accrochant un œillet à sa boutonnière, le jeune homme prit l’autre œillet, qu’il avait acheté pour la demoiselle qui serait son rendez-vous ce soir, et quitta son appartement. Arsène Lupin n’avait jamais participé à un speed dating de sa vie, mais le concept l’avait amusé, et tenter l’expérience s’annonçait des plus divertissants ! De plus, si cela lui permettait de rencontrer une, voire plusieurs charmantes demoiselles de la ville, pourquoi se priver ? Oui, le timide Maxime avait définitivement disparu de la circulation, et c’était bien le galant et chevaleresque mais non moins charmeur Lupin qui avait fait son grand retour, et ma foi, il comptait bien en profiter !
En franchissant les portes de la salle réservée par la mairie, il fut d’abord frappé par l’odeur de rose ambiante – il avait bien fait de choisir un œillet à offrir à sa belle, ce serait plus original et moins odorant – et la lumière diffuse installée par les techniciens, instaurant une atmosphère feutrée et tamisée qui n’était pas désagréable. Ils avaient bien travaillé à la mairie, il fallait bien leur reconnaître ça. Un sourire aux lèvres, il vérifia son numéro de table, s’avança vers les rangées et chercha sa partenaire du soir. Il la trouva bien assez vite, découvrant avec plaisir une jeune femme (probablement pas plus de vingt ans) de type brune incendiaire, aussi élégante qu’attrayante. Satisfait de son examen, Arsène tira la chaise à lui et prit place en face de sa partenaire.
« Oh oh! » « Bien le bonsoir, mademoiselle. » répondit Lupin, son sourire s’agrandissant sur son visage, ravi de constater qu’il avait visiblement fait une bonne première impression. Il ne savait même pas à quel point. « Belle pioche on dirait !! » s’exclama-t-elle en lui dédiant un sourire désarmant, auquel il répondit sans se départir du sien. « Si vous me permettez ce langage mademoiselle, je n’aurais moi-même pas dit mieux ! ». Puisqu’elle décidait de jouer la carte de la provocation, après tout, pourquoi ne pas rentrer dans son jeu ? Cette soirée s’annonçait décidément des plus divertissantes. « Un homme si séduisant que toi ne devrait pas avoir à utiliser quelque chose d'aussi ringard qu'un speed dating ! » « Mademoiselle si vous ne cessez de me voler mes répliques, je vais être obligé de sévir. » répliqua-t-il en lui présentant son œillet rouge, avant de lui prendre délicatement la main pour y déposer un élégant baiser, avec toute la distinction que ses lecteurs lui connaissaient. Ses prunelles vertes brillaient de malice et d’intérêt alors qu’il détaillait son interlocutrice, plusieurs questions s’entrechoquant dans sa tête, mais choisissant finalement le parti de profiter de la situation et de s’amuser. « Ma parole, vous êtes une véritable panthère, mademoiselle. Que dis-je, une tigresse ! Comment vais-je bien pouvoir m’y prendre pour vous impressionner ? Peut-être… » Un sourire malicieux aux lèvres, il tendit la main vers la chevelure brune de la jeune fille, et une seconde plus en tira… une rose rouge en papier, apparue là comme par magie. « Comme ceci ? C’est que j’ai le sentiment que si je vous fais mauvaise impression, j’encours le risque d’une vilaine morsure… Il faut toujours se méfier avec les félins. »