Les mouvements légers entre ses bras le firent sortirent de son sommeil. Il n’était pas assez réveillé pour se demander où il était, ni quelle était l’heure de la journée. Le premier son qu’il entendit fut le sifflement d’un oiseau, le vent qui passait et une respiration calme contre son torse. Il n’eut pas besoin d’ouvrir les yeux. Elwyn savait qui se trouvait entre ses bras. Il reconnaissait son odeur de pin discrète et sa chaleur. Annah. Un mince sourire naquit sur ses lèvres. Lentement, il attira sa moitié un peu plus proche de lui, ses mains dans le dos de sa fiancée. Ils avaient l’habitude de dormir à la belle étoile, de passer des heures à se balader dans les bois, de passer du temps ensemble. Rien de plus, rien de moins. Ainsi, le jeune boulanger n’était pas étonné de se retrouver sur un lit de mousse, une couverture les recouvrant partiellement.

Elwyn n’avait pas encore réalisé que ce qu’il prenait pour un simple sommeil avait en fait été une nuit de presque 28 ans. Que pendant ce laps de temps, lui et Annah avaient dormi dans les bras l’un de l’autre. Il n’avait pas encore compris que le sort avait été lancé avec succès et que trop de gens qu’il aimait étaient disparus, dans un monde dont il ignorait tout. La réalité ne le frappera que quand Annah ouvrira ses yeux verts sur lui, qu’elle lui offrirait un baiser et lui demanderait comme il avait dormis. C’est à ce moment, en recherchant dans sa mémoire les rêves qu’il n’avait pas faits, qu’il remarquerait l’engourdissement inhabituel de son corps, qu’il se rendrait compte qu’ils ne devaient pas avoir dormis aussi longtemps, en vue du soleil déjà bien haut dans le ciel.

Regina, cette sorcière qu’il avait fuie à plusieurs reprises dans son passé, avait atteint son but ultime, le figeant pour une si longue période. Elwyn se leva précipitamment une fois qu’il se rendit compte de cela. Il encouragea Annah à faire de même. Au pas de course, pour commencer, il se rendit dans la direction de sa maison qu’il partageait avec William, sans jamais la retrouver. Elle avait disparu. Comme beaucoup d’objet. Comme beaucoup d’habitants. Des amis, des gens qu’il considérait comme sa propre famille. Et William.

William. William. William. Ca tournait comme une obsession dans sa tête. Il avait déjà perdu ses parents, il ne voulait pas perdre son petit-frère. Elwyn s’y était attendu, à un sort puissant. Mais il s’était attendu à en faire partie, d’en être la victime comme une bonne partie de la Forêt Enchantée l’avait été. Sans qu’il comprenne pourquoi, ni comment, il s’en était sorti indemne. Alors, avec Annah, il partit à la recherche de survivants, qui comme eux étaient passés entre les mailles du sort. Parce qu’il ne pouvait pas les laisser sur le côté. Non, il ne pouvait pas. C’était viscéral, une obligation silencieuse qui le faisait se lever le matin, qui le faisait continuer à marcher, malgré le peu de traces qu’ils trouvaient. Elwyn ne s’arrêterait pas de chercher. Jamais.