« Je ne suis pas n'importe qui », c'est ce que se répète mentalement Lucy devant son miroir, une façon comme une autre de se redonner courage. Et elle a entièrement raison, elle n'est pas n'importe qui. Certes, Lucy n'est pas une personne des plus importantes, juste une lycéenne comme une autre, à peine plus jolie que les autres filles et avec bien souvent un manque de confiance en elle. Certains élèves la qualifient de bizarre, d'étrange. En effet elle a parfois cet air absent, distant voir de temps à autre lugubre, peut être même morbide les jours où elle dort peu. Car oui, la pauvre a souvent des insomnies, des passages à vide, des nuits emplies de terreur, des souvenirs de sa vraie vie qui resurgissent et resurgissaient avant que sa mémoire ne lui revienne. Mais à présent elle parvient à interpréter ce qu'elle y voit. De rapides passages aux enfers, dans le royaume de son père. Des gens qui hurlent à s'en décrocher la mâchoire, des hommes et des femmes torturés mais le pire est ce qu'il advient ensuite, lorsqu'ils perdent espoir et acceptent, acceptent tout simplement.

« Je ne suis pas n'importe qui ». Elle parle davantage à Lukia, la personne qu'elle était avant qu'à cette Lucy. Avant, dans le monde des contes elle était peut-être peureuse, sur ses gardes et sous la protection d'autres personnes, mais la bas il y avait son père, sa mère et tous ceux qu'elle avait rencontré et aimé durant sa vie. A Storybrooke elle n'avait encore retrouvé personne si ce n'est ses protecteurs, ceux qui avaient jadis veillés sur elle dans le monde des contes, ces mêmes personnes qui étaient ici ses parents adoptifs. Son véritable père était Hadès, le roi et dieu des enfers. Elle ne l'avait plus revu depuis tellement longtemps et doutait qu'il ait été emporté par la malédiction dans ce monde-ci. Perséphone, sa mère n'avait pas plus donné de signe de vie. Lukia était seule, comme toujours pensait-elle. Ses parents adoptifs étaient davantage des gardes du corps qu'une véritable famille et ses amis les plus proches étaient des chiens, une meute de husky qui devaient sans doute remplacer une meute de loups du monde des contes. Ce qui était étonnant, et ce qui lui valait d'être souvent laissée à l'écart était la faculté qu'elle avait de les comprendre et eux même semblaient la comprendre lorsqu'elle leur répondait. Les autres enfants la traitaient soit de folle soit d'arriérée. « Ils ne peuvent pas comprendre » se disait-elle. « Ils sont trop... normaux ».




Il y a de cela près de 28 ans déjà, Lukia couraient en pleine forêt nordique, l'air apeurée. Elle était traquée. Elle ne savait pas réellement par quoi mais ne comptait pas s'arrêter dans son élan pour le découvrir. Elle courait droit devant, comme le lui avait dit son protecteur. Ne pas se retourner, toujours aller droit devant et ne s'inquiéter de rien. Elle avait à ses côté son loup favori, une belle louve qui se nommait en langage humain Lady. La louve la devançait mais essayait de garder la même allure qu'elle pour que Lukia ne la perde pas de vue. L'animal guettait les horizons, s'assurant par la même occasion qu'aucun danger ne surviendrait de devant. Puis, Lukia trébucha et s'effondra sur la neige. « Relève toi vite, quoique ce soit ils approchent ! » Il était surement trop tard pour se relever et courir droit à nouveau. La louve amena la demoiselle vers le creux d'un arbre où elle la cacha, prenant soin au passage de brouiller ses pistes. D'autres loups, arrivant à toute allure continuèrent de filer droit, créant une autre série de traces à suivre pour les assaillants, ce qu'ils firent. Lukia ne put pas voir leur visage, ils étaient à cheval, une longue cape noire les couvrant. Elle ne voulait pas les voir, la peur la paralysait. Le temps qu'ils sortent de son champ de vision elle avait retenu son souffle, avait commencé à rougir légèrement. Lorsqu'elle respira à nouveau sa peau repris sa couleur pâle d'origine, une pâleur de mort. Ses cheveux d'un blond vénitien passant parfois par un couleur flamme descendaient en cascade le long de ses épaules et, dans la précipitation du moment, s'étaient décoiffés, étaient en bataille. Certaines mèches se collaient à sa peau sous l'effet de la sueur. Lukia avait encore peur. La fuite faisait partit de sa vie. Sans doute un inconvénient dut à l'origine de son sang. On ne lui voulait pas la mort mais juste la capturer, la torturer peut-être, mais surtout l'utiliser contre Hadès, son père. En faire une monnaie d'échange pour passer un pacte avec lui. Il aurait put l'amener aux enfers, la garder près de lui pour la tenir à l'écart de tout cela mais en plus d'avoir un atmosphère macabre et de sentir la mort dans tous ses recoins, les enfers n'étaient pas pour elle. Cela lui procuraient des cauchemars plus horribles les uns que les autres, des cauchemars dont jamais elle ne pourrait se défaire. Et puis sa grand-mère, Demeter avait exigé que la fille de Perséphone vive sur Terre. Bien évidemment tous avaient appuyés ses dires. Contredire cette déesse-ci en particulier était une tâche dangereuse et ardue. Lukia était donc forcée de vivre sur Terre, parmi les mortels. Elle avait conservé la beauté de sa mère et de son père lui restait une certaine aura qui témoignait de son sang royal.


Alors qu'elle se pensait hors de danger, Lukia sortit de sa cachette. Mauvaise idée... Aussitôt l'un des assaillants lui sauta dessus, la plaqua au sol et tenta de l'attacher tendis qu'elle se débattait. Lady mordit à plusieurs reprises l'homme qui l'envoya valsé contre un arbre à quelques mètres plus loin. La terreur dans les yeux, Lukia supplia qu'il la laisse en paix, qu'il parte tout de suite sinon un malheur lui arriverait. Elle espérait que son père l'entende mais ses paroles n'eurent pas le temps de lui parvenir que déjà une fumée violette envahissait l'air. Hadès n'avait pas de fumée violette. Dans un hurlement, Lukia perdit connaissance...




Lukia se réveilla dans la peau de Lucy, à Storybrooke où elle était persuadée d'avoir vécut une grande partie de son enfant. De sa vie d'antan elle n'avait pas le moindre souvenir, jusqu'à ce qu'Emma Swann ne lève la malédiction. Tout son passé lui retomba dessus, la terrorisant et la rassurant à la fois. Lucy hurla à nouveau, à s'en déchirer la gorge. Le résultat fut qu'elle demeura aphone quelques jours. Le choc alla jusqu'à lui ôter la voix, elle était devenue muette. Un fragile petit oiseau muet, voilà ce qu'elle était devenue. Elle se renferma un peu plus sur elle même, cherchant surtout à retrouver sa famille et ses amis dans les habitants de la ville, mais en vain. Elle demeura chez ses protecteurs, ici considérés comme ses parents adoptifs. Puis tous retournèrent dans la forêt enchantée, sous le commandement de Blanche Neige et du Prince Charmant. Elle s'éloigna légèrement du groupe, trouva une cachette souterraine inhabitée et investie les lieux avec quelques loups. Ces derniers souvenirs lui furent à nouveau retirés lorsqu'une nouvelle malédiction, verte cette-fois, les ramena à Storybrooke, un an plus tard. Ce fut une année de sa vie qui disparu. A présent, elle est de nouveau ce mélange entre Lucy et Lukia, aucune parole ne parvient encore à s'échapper d'entre ses lèvres.