Le soleil naquit par-dessus la ligne de l’horizon, dispersant sa lumière dorée à travers les arbres, illuminant le ciel, doucement, surement. Sven s’arrêta dans le travail de son morceau de bois, posant ses yeux d’ambres au-delà de la fenêtre. Il observa la nature s’éveiller un instant. C’est à ce moment que Sven remarqua l’heure – 06.53. Il eut une grimace, retenant une pensée sur la vitesse à laquelle le temps filait. Encore une fois, il n’avait pas fait attention aux heures qu’il avait passé dans son modeste atelier. Aussitôt, en reprenant la notion de l’heure, son estomac grogna de faim.

Sven poussa un soupir, déposant son ciseau à bois sur son établi. Du revers de sa main, il enleva une partie des copeaux tombés sur son bleu de travail, rejoignant ceux qui recouvraient déjà le sol. Il tendit le bras, se penchant un peu sur le côté de son tabouret pour attraper de ses longs doigts un sandwich presque trop sec pour être mangeable. C’était plus que suffisant pour l’ébéniste. Engloutissant une trop grosse bouchée, il se releva, faisant tomber les derniers zestes de bois. Sven sortit de son atelier, profitant d’une petite marche à l’orée des bois pour chasser ce qui ressemblait à de la fatigue.

Sven eut vite fait de se retrouver au restaurant de Granny. Poussant la porte distraitement, entendant à peine la musique du carillon, il se posa devant le comptoir, commandant son petit-déjeuner habituel – des œufs, du bacon, des tranches de pain grillé- ainsi qu’un café –noir. Il ne prenait plus la peine de remarquer qu’il était l’un des premiers clients, apparemment il ferait l’ouverture de la caisse. Tout en mangeant calmement, échangeant quelques paroles avec Ruby, ses pensées divaguèrent vers son travail actuel. Pas la charpente – la seule construction de la ville n’aurait pas besoin de lui avant deux jours. Il songea à cette nouvelle chaise sur le point de naitre entre ses mains. Il devait également passer au magasin de bricolage pour quelques outils et de la peinture. La coupe des chênes arriverait bientôt également, il devait mettre des sous de côté.

C’est en voulant payer sa consommation que Sven remarqua que son portefeuille était resté chez lui. Il soupira, désolé. « Je l’ai encore oublié. Ruby, tu mets ça sur mon ardoise ? Merci. » Hochant une dernière fois de la tête, il sortit du restaurant, sans entendre le carillon. Ferait-il une nouvelle nuit blanche ce soir ?