« Je suis désolée de devoir partir comme ça, mais si je ne rentre pas ma colocataire va s’inquiéter. » « Pas de souci. »
Je me moque un peu – beaucoup – de ses excuses. J’aime avoir mon lit pour moi tout seul, le partager pour dormir n’est qu’une perte… de place et de confort. Aussi lorsque la charmante demoiselle que j’ai rencontré durant la soirée – et qui a perdu tout son charme maintenant qu’elle est passée dans mes draps – s’est rhabillée en m’annonçant devoir s’en aller, je fus loin de m’en offusquer, au contraire cela m’arrange, je n’ai pas à le flanquer moi-même dehors en inventant une prétexte idiot ou en étant tout simplement honnête et sec, tout dépend de mon humeur pour être franc.
Son sac et son manteau dans les mains, elle ne part pourtant pas dans l’instant, allant jusqu’à ma table basse où elle griffonne quelque chose sur un bout de papier. Un petit sourire aux lèvres, elle vient se poser devant moi et me tend le dit papier. Mon regard passe du petit objet à elle de manière assez interrogative, un de mes sourcils est même arqué : elle me veut quoi au juste ?

« Qu’est-ce que c’est ? » Je demande, semblant vraiment la questionner tandis que je n’ai pas esquissé le moindre geste pour m’emparer de la feuille. Une lueur amusée brille dans son regard, il semble que je sois quelqu’un d’assez drôle même lorsque je ne cherche pas à l’être. « C’est mon numéro de téléphone. » Je suis un peu plus perplexe face à cette réponse qui aurait pourtant mis plus d’une personne sur la bonne voie. « Et tu veux me le donner pour… ? » Là, c’est elle qui semble décontenancer mais elle ne se défait pas de sa bonne humeur et tente d’argumenter là où elle n’aurait pas du avoir à le voir. « Pour que tu m’appelles voyons. » « Ca je m’en doute bien, mais pourquoi j’aurai besoin de t’appeler au juste ? » Je suis tellement nonchalant et parait si innocent lorsque je dis cela qu’elle en perd la parole durant quelques secondes. Sa bouche est mi ouverte sur une expression que je ne peux pas définir avec certitude, puis la voix lui revient. « Après ce qu’il vient de se passer entre nous… » « ‘Se passer’ » je la coupe sans aucune gêne. « C’est exactement ça. Ce qui est fait n’est plus à refaire. » Encore cette expression de poisson hors de l’eau. Décidément, il faut que j’arrête de choisir des blondes, elles ont souvent bien du mal à assimiler ce que je leur dis. « Écoutes, c’était sympa, on a passé un bon moment. Tu en avais envie, j’en avais envie, échange de bon procédé, et puis je n’ai pas l’habitude de manger deux fois dans le même plat alors… »

Elle devient toute rouge et la crise que je pensais évité me tombe dessus comme une averse. « Comment oses-tu traiter les femmes de cette manière ?! On m’avait pourtant prévenu…Tu n’es qu’un porc ! » Cela doit suffire à la calmer car elle tourne les talons et claque la porte. Ça va. ‘Porc’ est probablement l’insulte la plus douce dont une femme m’ait affublé, et en plus je n’ai pas eu de gifle. Au moins elle sait jouer les femmes bafouées avec un peu de retenue.
On l’avait prévenu… évidemment, nous sommes à Storybrook ici, c’est une petite ville, tout se sait, tout le monde connaît tout le monde, au moins de nom, ce n’est pas comme si nous vivions à Boston. Elle me fait bien rire celle là. Si on l’avait mise en garde pourquoi a-t-elle répondu à mes sourires, pourquoi s’est-elle installée au bar face à moi pour papoter et enfin pourquoi diable a-t-elle accepté de rentrer avec moi dans mon appartement et de passer sous mes draps ? Les femmes ne sont pas cohérentes… elle pensait sûrement – comme pas mal – qu’elle pourrait me changer. Qu’elle serait celle qui ferait fondre mon cœur, celle avec qui je voudrais construire quelque chose. Conneries ! Si elle avait vraiment de telles idées, elle ne se serait pas jetée sur mon lit en un claquement de doigt. Elle voulait juste passer du bon temps, tout comme moi, une aventure d’un soir en gros… mais les femmes n’aiment pas qu’on les pensent faciles alors elles jouent les victimes pour se faire plaindre. Bon, comme ça, on dirait que j’ai une dent contre elles, mais c’est faux ! J’aime les femmes ! Je les adore même… surtout nues, dans mon lit et n’ouvrant la bouche que pour soupirer le plaisir que je leur procure. Chacun son truc. Moi c’est ça et l’argent. Sauf qu’on ne pas dire que je roule sur l’or. J’ai un salaire qui me permet de le loyer de mon appartement peu charmant, me nourrir et… c’est presque tout. C’est très réduit mais je ne me rassasie pas de cela. J’aime les belles choses et même sans cela je veux pouvoir dépenser comme compter, ne manquer de rien et même avoir de trop. Pour ça je me débrouille à ma manière : disons que je… marchande. Pour être plus précis : je dérobe aux uns pour revendre aux autres. Il m’arrive aussi de magouiller. Bizarrement – et heureusement - je n’ai jamais eu de problème avec le shérif jusqu’à ce jour et je compte bien continuer dans ce sens, mais bon je vis quand même dangereusement, prendre de l’argent dans le porte monnaie d’un client trop éméché ne me dérange pas par exemple. Je pourrais vendre père et mère – encore faudrait-il que j’en ai pour ça – mais il y a une chose, une seule et unique chose dont je ne peux pas me séparer : il s’agit d’un objet étrange. J’ignore ce que c’est ou même à quoi il peut bien servir… je sais seulement que je l’ai depuis toujours et que je le garde bien précieusement caché dans un coin comme si il valait tous les trésors du monde. C’est étrange, je ne peux pas l’expliquer mais j’ai l’impression qu’il est important et que sa valeur est inestimable, allez savoir pourquoi…