Ce matin, réveil un peu brutal après avoir rêvé à un nouvel enfermement. Heureusement que Mr.Gold avait été là afin de me rassurer. Ça ne faisait pas un mois que j’étais sortie, que je goutais la liberté, alors c’était normal que j’éprouve encore des craintes par rapport à ma captivité, mais j’avais déjà hâte que ça cesse. C’était difficile de vivre ainsi, surtout lorsque je devais me retrouver seule dans une pièce fermée. À chaque fois, j’avais l’impression d’être enfermée, sans possibilité de sortir. Mais Mr.Gold semblait faire tout ce qui était possible pour que je me sente bien et à l’aise. Je ne comprenais pas vraiment comment les gens pouvaient le dévisager ainsi. Certes, on me dévisageait un peu aussi. Apparemment, les habitants de cette ville n’avaient pas l’habitude de voir des étrangers. Cependant on me dévisageait aussi parce que j’étais avec Mr.Gold la grande majorité du temps. Bon, quand il travaillait, je ne le dérangeais pas et en profitait pour visiter les environs. C’était normal aussi. J’avais également l’impression de passer un peu plus inaperçue toute seule.

Bien sûr, c’était dehors, car à l’intérieur, c’était tout autre. Dès que j’entrais dans une pièce, un restaurant ou une boutique, les gens tournaient la tête vers moi, murmurant que la protégée de Gold est là. J’ignorais bien ce qu’ils pouvaient s’inventer comme histoires entre mon hôte et moi, mais ça m’était égal à vrai dire. L’important pour moi, c’était que je savais que j’avais un protecteur admirable et gentil, voire même attachant. Il suffisait juste de regarder au fond de son regard, au-delà de la façade froide et dure. Il n’avait rien d’un monstre en tout cas, je pouvais le garantir, ou presque.

J’avais accompagné Mr.Gold à sa boutique ce matin. La route fut agréable et puis j’en avais profité pour lui demander conseil, à savoir quels endroits je pourrais visiter. Il connaissait mieux l’endroit que moi. J’ai donc visité ce matin quelques boutiques pour me familiariser avec les lieux, sans pour autant acheter quoi que ce soit. Soyons réaliste, c’était Mr.Gold qui avait de l’argent, pas moi, et je n’étais certainement pas le genre à aller lui en quêter. De toute façon, j’avais tout ce dont j’avais besoin au Manoir. Néanmoins, j’avais un peu d’argent pour me payer un repas chez Granny, argent que mon hôte m’avait généreusement donné pour que je ne meure pas de faim. L’heure du déjeuner approchait quand j’entrai dans le restaurant.

Granny me sembla plus sympathique que ce jour où j’étais avec le propriétaire de la ville. Néanmoins ce ne fut pas elle qui me servit. Une fois que je fus assise au comptoir, sa petite fille vint prendre ma commande. Nous avons parlés elle et moi un peu. Elle était fort sympathique et aimable. Elle m’apporta alors un thé glacé après que je l’aie commandé et me laissa le temps pour vérifier le menu. Je n’avais aucune idée de ce que j’avais envie de manger. En même temps, je n’avais pas eu la chance d’essayer beaucoup de repas ici…

Absorbée par le menu, je fus surprise lorsque quelqu’un se mit à me parler. Une voix masculine qui ne me disait rien du tout. Je levai les yeux et regardai mon interlocuteur qui me souhaitait la bienvenue et m’invitait à « prendre un petit quelque chose ». Son sourire charmant me fit sourire également, mais j’étais si surprise que j’en oubliai de répondre à la question. De toute façon, celui-ci enchaîna avec une autre, se présentant d’abord. Il s’agissait du cuisinier, Arsène. En tout cas, il n’avait certainement pas l’air méchant. Il était seulement un peu trop près par contre. J’avais l’impression qu’on envahissait mon espace. Malgré cela, je n’en laissai rien paraître et me présentai également en lui tendant la main pour serrer la sienne, comme deux personnes normales et courtoises le feraient. « Enchantée Arsène. Je m’appelle Belle. »

Après une poignée de main, Arsène affirma que mon nom m’allait à ravir, affirmant qu’aucun autre n’aurait été mieux pour moi. J’affichai alors un sourire différent, un sourire de satisfaction. Il me semblait que c’était la première fois qu’on me le disait et je le prenais très certainement comme un compliment. « Je vous remercie. » Ceci dit, je reposai mon regard sur mon menu. Je faisais le tour des repas que j’avais sous les yeux, n’ayant jamais réalisé autant qu’aujourd’hui combien de repas il était possible de faire. En même temps, ce n’était pas illogique. Mère Nature nous avait donné beaucoup de variétés d’ingrédients.

Après un moment, je n’arrivai plus à me concentrer sur le menu, sentant le regard d’Arsène, toujours là, en train de me fixer. Il regardait mon visage et je faisais mine de n’avoir rien remarqué, tentant de me concentrer sur ce que je lisais. Mais celui-ci reprit parole, alors je le regardai, écoutant son conseil. Un cheeseburger… Qu’est-ce que c’était ? Je fronçai les sourcils de questionnement et regardai le menu pour chercher les ingrédients. Après ma lecture, je me disais qu’il serait dommage de prendre la version diététique. Les saveurs risquaient d’être moins variées.

Mon regard se posa de nouveau sur Arsène qui me fit un clin d’œil et me sourit. Je lui souris également, étant tout simplement incapable de ne pas y répondre. Il était charmant après tout, et n’avait pas l’air méchant. Probablement avait-il des idées derrière la tête, mais je n’étais certainement pas le genre à y répondre. J’ignorais en fait ce qui m’en empêchait, puisqu’en fait, il n’y avait aucune raison. J’avais juste le sentiment qu’il ne fallait pas que je m’embarque dans quelconque histoires avec lui, ou n’importe qui. C’était étrange. Son regard pétillait, confirmant un peu mes soupçons. De plus, il me demanda s’il pouvait m’inviter à déjeuner, alors j’hochai la tête. « J’en serais ravie aussi, pourquoi pas. »

Pourquoi pas ? Pourquoi m’empêcherais-je de déjeuner avec un homme ? Si ça se trouve, cet homme charmant pourrait devenir un bon ami. J’ignorais où tout cela allait nous mener, mais de toute façon, ne devait-il pas retourner au travail bientôt ? Je l’avais vu sortir des cuisines après tout. Peut-être était-il en pause. Bref, je refermai mon menu et le mit de côté. « Ce sera un cheese burger. » dis-je en lui offrant un autre sourire. Il ne fallait pas que j’oublie de le remercier plus tard.

Je remarquai la satisfaction sur son visage. Soit il était content du fait que j'aie suivit son conseil sur le repas, ou bien il était satisfait du fait que je veuille bien déjeuner avec lui. Personnellement, je croyais aux deux. Quoi qu'il en soit, Arsène posa ses yeux sur Ruby et l'interpella afin de lui en demander un deuxième. Puis il reposa son regard pâle sur moi. J'avais l'impression d'être analysée complètement. Comme s'il cherchait à deviner qui je suis, alors que moi-même je n'en étais pas encore certaine. Il faut dire que les seuls souvenirs que j'avais étaient ceux dans ma chambre d'hôpital, dans le sous-sol. Alors je me demandais bien ce qu'on pouvait essayer de deviner chez moi. Si je ne savais pas qui j'étais vraiment, je ne devais pas vraiment dégager ma personnalité, non ? Ou bien peut-être que je le faisais sans me rendre compte. Bref, je pris une gorgée de mon thé glacé, sans regarder le cuisinier.

Ensuite, il me posa une série de question, cherchant à me connaître davantage probablement. Il voulait savoir d'où je venais, ne m'ayant jamais vu auparavant. Il était bien le premier à me poser la question, les autres se contentant de me jeter des regards, comme s'ils me craignaient autant que le propriétaire de la ville. En l'écoutant poursuivre, je cru comprendre que les étrangers d'autres villes ne venaient pas souvent ici, à Storybrooke. C'est donc pourquoi on me regardait souvent quand je passais sur la rue. Je comprenais donc beaucoup mieux. J'étais une étrangère qui débarquait de nulle part et qui était souvent vue avec l'homme le plus craint de la ville. C'était beaucoup plus clair à présent.

La suite fut un peu plus surprenante. Le questionnement laissa place à des réflexions, ou plutôt des confessions. Arsène me partageait son désir de sortir de la ville parfois, m'avouant par contre qu'il était retenu ici par une quelconque force. Bon, l'histoire me paraissait plutôt étrange dite comme ça, mais ce n'était certainement pas la première chose étrange dont j'entendais parler ici. On m'avait bien enfermé dans l'aile psychiatrique de l'hôpital pour rien selon Mr.Gold après tout. Je lui souris donc. Il semblait nerveux. C'est son petit rire qui m'en donna l'indice. Il voulait apprendre à me connaître, mais en même temps, j'apprenais à le connaître aussi. C'était un homme qui avait un rêve, il ne pouvait donc pas être bien méchant. Car c'est bien connu. Les hommes méchants sont ceux dont les rêves ont été brisés. Le sien ne l'était pas.

« Je me saurais vous dire en ce qui concerne cette force qui vous retient ici. Pour ma part, j'ai toujours été à Storybrooke... » Il était certes hors de question que je lui dise que j'avais été enfermée dans l'aile psychiatrique. Qui sait quels soupçons on pourrait avoir contre Mr.Gold. Déjà qu'il n'était pas très apprécié, je ne voulais pas que les gens le croient en train de préparer un mauvais coup en libérant une dangereuse personne ou une personne malade, comme moi, ou plutôt, comme on avait dit que j'étais. Du coup, je préférais tourner l'histoire autrement. « Mon histoire est un peu compliquée. Je ne sortais pas vraiment de l'endroit où j'étais. C'était comme une prison. C'est Jefferson qui m'a aidé à en sortir en me disant que Monsieur Gold me protègerait. Alors je suis allée le retrouver, et me voilà maintenant. » Je souris de nouveau, ne voulant pas vraiment montrer la mélancolie de cette histoire. Après tout, elle avait une fin heureuse, ou bien n'était-ce pas la fin ? J'ignorais tout de même quelle était la situation initiale et l'élément déclencheur de mon histoire, alors comment pouvais-je savoir si j'en étais à la fin ou simplement pas au début, encore ? Peu importe. « Depuis, je vis avec Mr.Gold, dans son manoir. Je suis en pleine redécouverte de la vie, un peu grâce à lui. Du coup, je ne cherche pas vraiment à savoir ce qu'il y a ailleurs pour l'instant. » J'affichai un nouveau sourire sur mon visage, un sourire plus frais et plus sincère. J'espérais sincèrement que les gens parviennent à voir en Mr.Gold ce que je pouvais voir en lui. J'ignorais ce qu'il avait pu faire dans le passé, mais je savais qu'il ne pouvait pas totalement être méchant. Enfin, c'était une évidence pour moi. Encore fallait-il que je le démontre aux autres.