Aussitôt que Paige réussit à s'arracher à cette espèce de transe qui l'avait saisie un peu plus tôt, elle attrapa un chiffon qui traînait sur la table et se mit à dépoussiérer le service. La déclaration de Mr Gold ne tarda pas à se faire entendre et elle bugua littéralement, restant cinq secondes immobiles avant de se tourner vers l'antiquaire avec un énorme sourire aux lèvres. Deux cadeaux en moins de dix minutes. C'était beaucoup plus que ce qu'elle aurait jamais pu imaginer. Elle avait un peu l'impression d'avoir à faire à un grand-père qui voulait faire plaisir à un de ces petits-enfants seulement l'image s'accordait mal à son tout nouvel employeur. Quand bien même, Paige ne connaissait pas ses grands-parents alors elle aurait eu du mal à en juger. En tout cas elle ne se gêna pas pour faire partager sa joie. « Merci encore Mr Gold ! J'en prendrais grand soin, promis. » Elle ne crut pas bon d'ajouter qu'elle se sentait effectivement très intéressée par le service, les quelques flashs qu'elle avait eu la rendait bien assez curieuse. Puis il y avait ce sentiment... Un peu le même qu'elle avait ressentit pour la peluche. Moins puissant certes, mais elle n'arrivait toujours pas à mettre un nome dessus. C'était tout juste comme si une partie d'elle essayait désespérément de récupérer tout ce qui avait été sa vie avant cette stupide malédiction. Et que cette même part d'elle ronronnait joyeusement dans sa poitrine à l'idée de retrouver ses anciens compagnons de jeux.

Paige s'appliqua d'autant plus à rendre les objets propres et présentables. Pas de doute que tous ces cadeaux feraient soupirer ses parents, voire même les inquiéter. Encore une fois, la mauvaise réputation de l'antiquaire le rattraperai. L'écolière adorait ses parents mais c'étaient parfois surprenant de voir à quel point elle arrivait à voir le bon dans les autres alors même qu'eux avaient une inexplicable tendance à alimenter les ragots. D'ailleurs, ce fut étrange que la question de l'homme arriva à ce moment là des réflexions. Surtout quand on savait que la petite fille n'avait jamais eut vraiment l'impression d'être à sa place dans sa vie de famille qui paraissait pourtant si idyllique. Comme si tout était décalé, bancal. Mais hors de question de parler de ça à un presque inconnu, aussi gentil soit il. Elle aimait sincèrement ses parents et eux aussi, c'était l'important. En revanche... « C'est un peu étrange que vous posiez la question... La plupart des adultes font tout pour faire comme si rien d'étrange ne se passait quand il y a des enfants autour. Pourtant, ce n'est pas comme si c'était facile à louper : entre les accidents qui se multiplient et les gens accusés de meurtres à tort... Ce n'est pas comme si Storybrooke était la petite ville calme dont tout le monde parle. » Paige eut un léger haussement d'épaules en repensant à l'affaire Nolan et à sa maîtresse qui avait injustement été traitée comme une meurtrière par la majorité de la population de la petite ville. « Mais pour répondre à votre première question, Storybrooke est ma maison. Alors oui, je m'y sens bien malgré tout. »

Elle finit d'astiquer deux tasses et posa le chiffon sur le côté avant de se tourner de nouveau vers l'adulte. « Autre chose que je peux faire pour vous aider ? »

Qu'est-ce que voulait-dire "se sentir bien" ? Etre accepté par les autres ? Paige avait énormément d'amis, enfants comme adultes. S'accepter soi-même ? Merci bien, Paige s'aimait comme elle était même si elle avait quelques défauts dont elle était consciente. Avoir une famille aimante ? De ce côté là aussi elle était servie. Quoi d'autre ? L'argent ? Ils n'étaient vraiment pas à plaindre. Et quant à l'amour, elle n'avait que dix ans aussi cela ne rentrait pas encore en compte. Elle avait donc tout ce qui était important, tout ce à quoi on rattachait au mot "bonheur". Alors pourquoi diable rêvait-elle sans cesse de plus ? L'écolière ne se comprenait pas elle-même et, à chaque fois qu'elle se surprenait à être mélancolique sans raison particulière -ce qui arrivait trop souvent-, elle se sentait honteuse par rapport à ses parents et ses amis. Aussi elle ne répondit pas vraiment honnêtement à la question de son tout nouvel employeur. Pas plus qu'elle ne mentit à vrai dire. Parce que malgré tout cela, elle aimait Storybrooke. Elle y avait grandi, elle y avait fait pleins de rencontres géniales et elle en connaissait les moindres recoins. Et le fait qu'il semble y avoir pleins d'affaires plus ou moins sordides dont les adultes s'efforçaient de cacher les détails aux enfants n'y changeait strictement rien. Cela lui donnait uniquement envie d'enquêter un peu plus pour découvrir tous les secrets qui se cachaient derrière ces pelouses impeccables et ces visages accueillants.

Toujours est il que, si elle attendait une réponse de Mr Gold qui lui permettrait enfin de discuter de toutes ces histoires plus amplement avec un adulte hautement susceptibles de connaître la vérité, elle fut grandement déçue. L'antiquaire n'avait de toute évidence pas envie de lui faire partager les petits secrets des habitants. Ce qui laissait tout de même la question du pourquoi s'enquérir de son opinion en suspens. Que cherchait-il à savoir en lui demandant à elle ? Page avait beau considérer l'homme comme gentil, il n'en restait pas moins qu'il faisait rarement -pour ainsi dire jamais- quelque chose sans raison. Elle pouvait difficilement croire qu'il voulait seulement meubler le silence en discutant tranquillement avec elle. Mais soit, elle n'en apprendrait pas plus aujourd'hui. De toute façon, comme le stipulait leur accord, elle reviendrait bientôt l'aider dans la boutique et pourrait surement lui poser des questions un autre jour. Elle s'en tirait déjà plus que très bien avec le service de thé qu'il lui offrait et sa peluche. Après tout ce temps à l'observer, elle allait finalement la ramener à la maison ! Elle demanda poliment s'il y avait autre chose qu'elle pouvait faire pour aider puis, quand vint la réponse négative, elle remballa la porcelaine. Sur qu'il n'avait pas besoin de le répéter deux fois pour qu'elle embarque ses présents. Même si ces espèces de flashs qu'elle avait eu la laissait grandement perplexe.

La vaisselle dans les bras, elle sortit de l'arrière boutique et la déposa sur le comptoir pour placer le lapin blanc dessus et transporter le tout plus facilement. Avant de reprendre son chargement et sans prévenir, elle se retourna pour prendre le propriétaire des lieux dans ses bras. « Encore merci pour tout. Je ne vous décevrai pas ! » Et, aussi vite qu'elle l'avait attrapé, elle le relâcha, prit ses affaires et s'en alla joyeusement de la boutique. Certes ses parents n'allaient surement pas apprécier, mais elle avait un travail maintenant ! Enfin un adulte qui la prenait au sérieux.