Et voilà ! Le dernier plat était terminé et Andrew put souffler. Cette journée de travail avait été éprouvante. Le jeune cuisinier n'avait eu droit qu'à trois petites pauses. Une le matin, une pour déjeuner et une dans l'après-midi. Tout le reste du temps, il l'avait passé à préparer les assiettes des clients affamés. Granny était ravie lorsqu'elle remplissait la caisse mais devait être aussi exténuée en début de soirée. Heureusement pour elle, Ruby était là. Andrew quitta donc les cuisines pour se rendre dans le petit vestiaire des employés et changea de tenue. Ses vêtements de travail étaient recouverts de gras et de farine, bon à laver. Une fois qu'il eut mis toutes ses affaires dans son sac bandoulière, il sortit du vestiaire et souhaita bon courage à ses collègues à peine arrivés. Puis, en passant près du comptoir, il déposa un baiser sur la joue de Granny - oui, Andrew avait le droit à se privilège - et fit un signe de main à Ruby qui prenait une commande. Autant dire que le jeune homme se sentait bien entouré. Ils étaient tous adorables avec lui et il leur rendait bien la pareille. Andrew avait eu de la chance d'être recruté par Granny, sans quoi il se serait certainement retrouvé à faire un métier qu'il n'aurait peut-être pas autant apprécié que celui de cuisinier.

Le jeune homme n'était pas venu en voiture, il le faisait rarement d'ailleurs. Une bonne marche à pied malgré la fraicheur de l'hiver lui faisait le plus grand bien. Le trajet jusqu'à son appartement lui permettait de réfléchir et de faire un peu le point dans son esprit. Mais à chaque fois, il se perdait dans ses questions et s'embrouillait l'esprit. Depuis quelques temps, Andrew ne se sentait pas spécialement joyeux. Il évitait de le montrer sur son lieu de travail mais c'était un fait. Cette soirée speed dating lui avait laissé des marques psychiques difficiles à oublier. Tout d'abord, cette discussion étrange avec Jamie. Ensuite, eh bien, la jeune Harley qui n'y était pas allée de main morte avec lui. Malgré les apparences, Andrew n'était pas si fort d'esprit qu'il voulait bien le faire croire. Une part de sensibilité le fragilisait à l'intérieur.

Il sortit de ses préoccupations en entendant des jeunes gens parler au loin. Au départ, il n'y prêta pas tellement attention. Nombreux étaient ceux qui se disputaient en pleine rue et Andrew n'avait pas la tête à se mêler de ce qui ne le regardait pas. En approchant du groupe, il vit un garçon fouiller dans un sac puis vider le contenu sur le sol. Non, vraiment ? Andrew avait l'impression de se retrouver au lycée. Plus près, il put entendre leur conversation. Désormais, l'abruti - oui, il l'était certainement - du groupe prit un livre et menaçait de le déchirer. Alors là, non ! Andrew ne supportait pas ce genre de types. Déchirer des devoirs, à la limite, mais pas un bouquin ! Il se mit donc à fouiller dans son sac et prit une pomme qu'il avait emporté pour son encas de l'après-midi - qu'il avait fort heureusement oublié.

« Hey ! Attrape ! » Il lança la pomme vers le type qui lâcha aussitôt le livre. Un jeu d'enfant. Au moins, ce crétin avait quelques réflexes et s'était laissé dupé instinctivement par l'ordre d'Andrew qui ne lui avait pas laissé d'autre choix en lançant la pomme vers lui. Rapidement, le jeune homme s'avança et ramassa le livre du sol. « On ne déchire pas du Hemingway. Un Meyer, si tu veux, mais pas ça. » Non, il n'était pas fan du tout de Twilight. « Du quoi ? » Andrew eut un sourire et rendit le livre à la victime, avant de reporter son attention sur les autres garçons. « Mr.Gold est un très bon client de chez Granny et il me demande souvent comment se porte sa petite ville... » Ni une ni deux, les agresseurs s'éloignèrent d'Andrew et du jeune garçon qu'ils avaient embêté quelques minutes plus tôt. Le cuisinier ramassa le sac et les affaires de ce dernier. « Laisse-moi deviner. Tu es leur souffre douleur ? »

Andrew ne fut pas vexé de la réponse sarcastique que lui donna l'adolescent - qui ne devait pas être plus jeune que lui, en fait. Après tout, ils ne se connaissaient pas et le cuisinier ne pouvait pas deviner à qui il avait affaire et quel était le caractère de l'autre. Inutile de prendre son attitude trop à cœur, ce n'était pas le genre d'Andrew. Qu'on l'apprécie ou non, il s'en fichait bien. Au moins, il avait fait une bonne action. Il avait aidé le jeune homme, point. Chacun pouvait retourner à sa petite vie et oublierait cet évènement dans quelques jours, voire le lendemain. Andrew s'apprêta donc à partir lorsque l'adolescent le remercia. Il avait troqué son agacement contre une attitude plus positive. Il commençait à lui demander comment le remercier. « Un merci suffira, t'en fais pas, je n'ai rien fait d'exceptionnel. » Il observa alors le garçon et ne s'étonna pas que des brutes le prennent pour cible. Il avait l'air d'une tortue effrayée par le monde extérieur, qui se cachait dans sa carapace. Les gros durs adoraient embêter ce type de personnes. Inévitablement, Andrew compara l'adolescent avec Jamie. Ce dernier lui avait confié son passé, ses histoires de lycées et ce n'était pas si différent de ce qui venait de se produire. Le rapport entre les deux était donc logique, inévitable.

Finalement, le jeune garçon se présenta en tendant la main. Andrew la lui serra, en délivrant son prénom à son tour. « Andrew » Et voilà qui était fait. Chacun pouvait rentrer chez lui et mettre cette histoire de coté, cependant, le cuisinier n'était pas sûr que Drake puisse rentrer tranquille. Si les brutes qui l'avaient accosté l'attendaient autre part, sur le chemin du retour, ils auraient une belle occasion de l'intimidé avec des histoires farfelues quant à la venue d'Andrew pour le protéger. Le cuisinier était même sûr que ses agresseurs n'oublieraient pas cet évènement. « Je ne sais pas ce que tu comptais faire, sortir ou rentrer chez toi mais si tu veux, je reste un peu ou je te raccompagne. On sait jamais avec ces types-là. » Andrew ne pouvait pas le laisser filer. Quelque part, il se sentirait coupable maintenant si un malheur - même minime - arrivait à l'adolescent. Il ne pouvait pas faire comme si de rien était.

Le jeune homme voulait rentrer chez lui. Comme s'il était sous sa responsabilité, Andrew se sentait obligé de veiller sur sa sécurité pour qu'il arrive entier à son domicile. Les abrutis, il connaissait et savait que la plupart des jeunes brutes étaient du genre à ne pas laisser tomber leur proie et à attaquer dès qu'ils en avaient l'occasion. C'était ainsi. Les tristes règles de la vie. Les plus faibles étaient pris pour cible sans raisons et beaucoup ne semblaient plus s'en préoccuper. Ce fait existait depuis des années pourtant mais rien ne changeait à travers les générations. Si Andrew pouvait apporter un petit changement dans Storybrooke, alors pourquoi pas ? Ce n'était rien et beaucoup devraient agir comme lui. La petite ville du Maine était d'ailleurs de plus en plus en proie à la violence, étrangement, et Andrew n'était pas au bout de ses surprises.

Le cuisinier s'était donc décidé à raccompagner l'adolescent chez lui, s'assurant qu'aucun groupe ne les suivait. Andrew avait presque l'impression d'être devenu paranoïaque le long du trajet. Il se tournait, lançait des regards aux gens qu'ils croisaient, s'attendant à ce que les brutes décident de se venger. Pourtant, Andrew leur avait fait peur avec cette histoire de Monsieur Gold. Le propriétaire de la ville effrayait sans faire quoi que ce soit. Enfin, presque. Depuis qu'il s'était retrouvé accusé d'avoir frappé le vendeur de fleurs, les gens le craignaient encore plus. Ils le pensaient presque déséquilibré. Alors, pas étonnant que la simple évocation de son nom puisse faire frissonner d'effroi.

Pratiquement arrivé à destination, Drake se décida à parler. Andrew fut un peu surpris de recevoir une invitation à dîner et ne savait pas s'il devait accepter ou non. Le bœuf bourguignon était pourtant un de ses plats préférés, comment résister ? Le cuisinier qu'il était en avait déjà l'eau à la bouche. Et puis, la mère de Drake voulait que son fils ramène des amis, Andrew avait besoin de s'en faire. C'était un bon compromis, non ? « Je vois mal comment refuser avec un tel menu au programme. » Le cuisinier eut un petit rire. Il était assez gourmand et le faisait savoir. Étonnant, avec son poids plume. « Puis j'aime bien faire de nouvelles rencontres alors, je suis partant. »