Introduction Époque du sujet : Flash-Back Date du sujet : Peu de temps avant la Malédiction Ordre de passage des participants : Ariel - Judikael

Lassé des verts paysages qui s'offraient à lui dans la profondeur des bois, l'elfe avait décidé d'empaqueter ses maigres possessions et de prendre la route pour trouver de nouvelles vues. Sur le chemin, il réussit à vendre deux peintures pour se fournir de quoi manger et une sculpture pour acheter de nouveaux instruments. Il ne savait pas vraiment pourquoi il avait attendu aussi longtemps avant de quitter son pays natal pour cette vie de bohème où il lui suffisait de se laisser porter par ses envies. Pas de règles stupides à observer, pas d'entraînement où se ridiculiser et, surtout, pas de compagnons hypocrites à supporter. Juste lui sur les routes. Evidemment, cela avait parfois ses désavantages. Il lui arrivait de ne pas avoir de quoi manger, de devoir abandonner des tableaux derrières lui ou de simplement les donner aux premiers venus car il ne pouvait les emmener avec lui. Et puis il ne pouvait nier qu'il y avait des dangers contre lesquels il était bien illusoire de se croire immunisé. Il en voulait pour preuve sa rencontre avec ses attardés de pirates. Rien qu'à penser à son médaillon et la façon dont il se l'était fait voler le mettait en rage. Sérieusement, il pariait que ces imbéciles n'avaient même aucune idée de la valeur de l'objet. Vraiment, des fois il désespérait devant la stupidité crasse des humains. Bah, il n'avait pas vraiment l'intention de revenir chez lui alors il supposait que la perte de l'objet n'était pas si tragique que cela...

Toujours est il qu'après plusieurs jours, il parvint enfin à sortir de cette interminable forêt. Et le dépaysement était tel qu'il lui fallut un instant pour s'habituer à voir une étendue aussi dégagée. Pas de troncs, pas de foutues racines qui viennent vous faire de vils croche-pieds. Bon, certes les bois avaient pur avantage de donner lieu à de magnifiques jeux de lumières. Mais on ne pouvait pas tout avoir, n'est-ce pas ? Non, ce qu'il avait devant lui était bien mieux. La mer. Il ne s'était pas encore essayé à peindre un tel paysage et il en avait maintenant hâte. Car c'était ce qu'il était venu chercher : un nouveau défit. Le peintre planta donc son chevalet, le stabilisant aussi bien qu'il le put dans le sable fin de la plage. C'est à cet instant qu'une inattendue chevelure rousse étalée sur un rocher attira son regard. Etonné et curieux, il déplaça le matériel pour découvrir une sirène qui avait de toute évidence décidée de piquer une sieste au soleil. Et quelle merveille s'était que de voir le soleil illuminer les écailles de sa queue de poissons. La décision ne fut pas longue à prendre pour Judicael. La mer était loin de partir et il ne savait pas quand il recroiserait le chemin d'une telle créature. Aussi ce n'était que logique qu'il choisisse d'en faire le sujet de son nouveau tableau. Tableau qui avança plus que bien jusqu'à ce que la sirène ait l'étrange idée de se réveiller et de plonger dans l'eau à sa vue. Etouffant un juron dans sa barbe inexistante l'elfe posa son pinceau et s'avança vers l'étendue d'eau. Il ne savait pas exactement de quoi avait peur la jeune femme mais son manège commençait légèrement à l'exaspérer. D'autant plus qu'il devrait user de sa seule mémoire et de son imagination pour finir son oeuvre. Génial. « Hey ! Pas besoin de te cacher, je ne vais pas te faire de mal... » Il se retint de justesse d'ajouter que s'il l'avait voulu, ce serait fait depuis longtemps. Il commençait peut être à s'améliorer un tout petit peu question sociabilité.

Peur ? Pas vraiment étonnant pour quelqu'un de normal à comprendre. On se réveillait rarement pour découvrir que quelqu'un vous observait dans votre sommeil, sans même parler de vous peindre. C'était le genre de choses bien flippantes que l'elfe n'arriverait jamais à comprendre. Pour lui la situation était simple : il n'avait jamais vu de sirène -en avait rarement entendu parler- et le soleil illuminait littéralement les écailles de la demoiselle. C'était donc parfaitement logique qu'il ait eut envie d'immortaliser la scène. En revanche, la deuxième partie de la réponse le laissa perplexe. Quelqu'un devrait vraiment faire une thèse sur la nature humaine. En considérant que la sirène n'avait pas l'autorisation de les approcher et que son propre peuple préférait depuis longtemps vivre sa vie de son côté, il devait y avoir matière à faire. Toujours est il qu'il détestait être pris pour un humain même si l'habitude ne lui faisait plus ressentir qu'un certain agacement. C'est donc avec un haussement d'épaules qu'il répondit à la jeune fille. « Ca tombe bien alors, je ne suis pas un humain. » Et sur ce, il entreprit de ranger son matériel. Vu que son modèle ne prenait plus la pose, il finirait le tableau comme il le pourrait en espérant rester assez fidèle à la réalité. Et s'il voulait sérieusement envisager de faire d'autres oeuvre sur la demoiselle, il ferait bien mieux de réaliser quelques croquis. Il troqua donc le pinceau contre un crayon et la toile contre un carnet déjà à moitié rempli.

Il n'écoutait déjà qu'à moitié la rousse alors qu'il dessinait distraitement le haut de son crâne qui dépassait de l'eau. Quelques coups de crayons suffirent à faire taire son agacement ; il était de retour dans son élément. Peu importait bien qui était à ses côtés du moment qu'il faisait ce qu'il aimait. Il tiqua néanmoins devant les questions de la sirène. Que diable pouvait-il bien faire sinon peindre ? Généralement, ça sautait aux yeux. Il chassa la question de ses pensées sans même prendre la peine de répondre comme la jeune femme se réinstallait sur les rochers. Il réussit finalement à faire deux croquis rapides avant qu'elle ne plonge de nouveau, visiblement décidée à avoir des réponses à ses questions. Questions qui perturbaient quelque peu notre artiste vu que ses activités et son matériel n'étaient généralement pas le sujet de conversation habituel avec les personnes qu'il croisait. « Tu es train de me dire que tu ne connais rien de tout ça ? Vous ne peignez pas ou ne dessinez pas de là où tu viens ? » Et cette réalité horrible qui se profilait sous ces innocentes questions faisait quelque peu frissonner l'elfe. L'art avait été sa seule raison d'être toutes ses années durant : il ne pouvait pas imaginer une société où cela n'existait pas. Surement avaient-ils d'autres moyens, des techniques différentes... « Parce que, si ce n'était pas évident, c'est ce que j'étais en train de faire. Te peindre. Et maintenant je te dessine. »