Mon royaume étant terriblement loin, je n’avais pu regagner le foyer familial si confortable qui me protégeait autrefois. Pas à pied en tout cas. J’ignorais combien de temps j’avais erré dans cette forêt. Tout ce que j’avais avec moi, c’était ma cape pour me réchauffer et mon livre pour m’instruire. Je me nourrissais avec ce que je pouvais et j’ignorais encore combien de temps j’allais pouvoir tenir dans cette situation. Une chose était certaine cependant : Je ne pouvais pas m’arrêter. Le soir, j’avais beau regretter d’être partie, je ne pouvais pas rentrer au château de Rumplestiltskin.  J’ignorais ce qui lui avait prit de me jeter dehors de la sorte. Je souffrais et ne retenait pas mon mal quand venait l’heure de dormir. Cependant, il l’avait dit. Le pouvoir comptait plus que moi. Bien sûr, je ne l’avais pas cru. Je savais au fond qu’il était simplement persuadé qu’il était impossible qu’une femme puisse réellement l’aimer. Seulement il n’avait rien comprit et n’avait rien voulu entendre non plus. Même si notre baiser s’était trouvé à être un vrai baiser d’amour, le ténébreux n’avait pas voulu me croire et m’avait jeté à la porte comme on se débarrasse de ses eaux usées.

Voilà donc pourquoi j’errais dans la forêt depuis. J’étais fatiguée, abattue et assoiffée, mais je ne m’arrêtais pas, car je connaissais les dangers. J’étais sans défense, vulnérable avec pour seule arme un livre que j’avais prit au château de mon ancien geôlier. Si lui avait une tasse ébréchée et un cœur vide, moi j’avais un livre usé dont les pages avaient jaunies et un cœur lourd d’émotions, émotions que je ressentais sans doute pour deux. Marchant depuis plusieurs heures maintenant, je m’arrêtai un moment pour m’asseoir sur un tronc d’arbre. Quand je regardai le ciel, je pus deviner l’heure approximative qu’il était en voyant l’emplacement du soleil. Il fallait déjà que je commence à me trouver un endroit pour camper cette nuit. Or, j’avais peut-être mangé quelques petits fruits dans la journée, cela ne changeait en rien que j’avais soif. Il me fallait un ruisseau où je puisse m’abreuver. Voyant le ciel bleu, je ne pouvais pas espérer qu’il pleuve. Après quelques minutes, je me remis en route, écoutant autour au cas où je n’entendrais pas un cours d’eau. Rien… Rien, sauf au moment où j’entendis une branche se casser. M’arrêtant subitement, je regardai autour, inquiète. Était-ce un monstre, un animal ? Non. À mon plus grand bonheur, il s’agissait d’un groupe d’hommes. Aimable et polie, je leur souris. Voyant une femme dans ma condition, j’osais espérer qu’ils soient aimable en retour et qu’ils acceptent bien de m’aider. Durant les premières minutes, ils furent adorables, m’offrant à boire et semblant s’inquiéter du fait qu’une femme se promène seule dans les bois. Évidemment, je ne leur racontai pas mon histoire avec Rumplestiltskin. Je n’avais pas trop envie qu’ils se sauvent de moi. Quand j’eus terminé d’apaiser ma soif, l’un des hommes, probablement celui qui guidait les autres, me demanda de payer. « Payer ? Pour de l’eau ? » Dans mes yeux, on pu voir que je ne comprenais pas et que je trouvais cette idée stupide. L’eau était à portée de tous non ? Personne ne la faisait. Pourquoi aurais-je dû payer pour ce que la nature donnait ? Cependant, l’homme agrippa mes cheveux pour tirer ma tête vers l’arrière afin de bien me regarder de près. « Si tu n’as pas d’argent, trouves un autre moyen pour nous payer. »

Dégoutée par sa demande, je le repoussai, ce qui fut une très mauvaise idée. À peine ais-je réalisé ce que je venais de faire qu’un autre homme derrière moi me prit les deux bras. Sa poigne étant trop forte pour moi, je ne pouvais pas m’échapper. Me voilà dans de beaux draps. L’idée de mentionner le ténébreux me vint à l’esprit, mais qui étais-je après tout pour l’utiliser comme défense. J’avais été rejetée comme un vulgaire déchet après tout. Malgré cela, je ne voulais pas que cette scène se poursuive. « Lâchez-moi ! » C’était ce que j’avais trouvé de mieux à dire. Ce n’était pas terrible, ni utile. Puis soudain, l’un des autres hommes récupéra le livre que je venais de laisser tomber. « C’est quoi ça? » demanda-t-il avec un sourire mesquin sur les lèvres. Sans le lâcher des yeux, inquiète pour le seul trésor qui me restait de Rumplestiltskin, je pris parole sans me faire moins provocante. « C’est un livre. Je suis persuadée que vous en avez déjà vu auparavant, mais je ne crois que des bêtes comme vous puissiez comprendre. » Je m’attirais les problèmes, certes. Je le savais bien, seulement ce livre représentait plus que je n’aurais pu l’expliquer. Il était rattaché à un souvenir, à une personne que je ne voulais pas oublié, malgré ce qu’il était. Au moins, ma réplique sembla amuser les hommes qui se mirent à se moquer de moi.

J’avais finalement à faire à des monstres, et je devais certainement trouver un moyen de m’en sortir. Je ne pouvais espérer l’aide de personne. J’étais seule depuis longtemps. Je me doutais bien qu’il n’y avait personne. Cependant, je me trompais, sans le savoir. Un coup de pied derrière les genoux m’obligea à m’agenouiller. Je gémis alors de douleur, sentant mes bras un peu trop haut dans mon dos. J’eus alors envie de pleurer. J’avais beau avoir envie d’être courageuse, brave, je n’en restais pas moins une demoiselle en détresse, et dans une position inconfortable en plus. Le chef de la bande s’avança alors me disant que je devrais rester polie et charmante envers ceux qui nous aide. « Vous n’êtes que des lâches et des porcs ! » Je n’aidais certainement pas à ma situation, mais si je devais mourir là, je préférais avoir dit que ce j’avais à dire. Je vis alors l’homme tendre la main pour me frapper, mais une flèche vint à mon secours en transperçant la main en question. Alors qu’il criait de douleur et que l’attention de tout le monde se reportait ailleurs, je tentai de me défaire de l’emprise de l’homme qui me retenait, mais rien à faire. « Je vous en prie, pitié, lâchez-moi ! Vous me faites mal ! » Mon sauveur était apparemment derrière quand je suppliais, car je fus relâchée aussitôt que je terminai ma phrase. Sans perdre une seconde, j’avançais le plus rapidement possible à quatre pattes pour récupérer mon livre, me mettant à genoux pour vérifier s’il était en un seul morceau. Les hommes partirent alors et j’entendis la voix de mon sauveur, voix que j’eus l’impression de reconnaître. Je me retournai alors, restant au sol. « Il y a eu plus de peur que de mal… je crois. » Je regardai alors l’un de mes bras portant les marques de la poigne de l’homme qui m’avait retenue, grimaçant de douleur. Serrant mon livre contre mon cœur, je restai là à attendre. Allait-il me laisser là ?

Spoiler:

Avais-je reconnu mon sauveur ? Bien entendu. Seulement la douleur à mon bras m’empêcha bien assez vite de le remercier pour son aide. Je ne perdais cependant pas l’idée de le faire, car c’était la moindre des choses. D’ailleurs, celui-ci vint m’aider à me lever. Ne lâchant pas mon livre de la main, je le regardai une fois debout et lui affichai un sourire. « Je vous remercie. » Suite à mes paroles, Robin m’avisa du danger de voyager seule en forêt. Étant une femme, je savais que c’était un peu plus dangereux. Il n’avait certainement pas tort. Mais que pouvais-je y faire ? Le seul endroit où je pouvais aller était le château de mon père qui était malheureusement loin, trop loin. N’ayant jamais vraiment apprit à m’orienter en forêt, je m’étais perdue et n’avait nulle part où aller, personne sur qui compter. Baissant les yeux je regardai mon bras à l'endroit où l'homme me retenait quelques secondes plutôt, grimaçant de nouveau de douleur. « Vous avez raison. Je n'ai malheureusement pas eu d'autre choix que de partir seule. »

Rumplestiltskin me manquait. L’envie de retourner auprès de lui me prenait de plus en plus souvent et je ne pouvais le déloger de mon cœur qui battait de plus en plus vite rien qu'en pensant à lui. La simple idée de le revoir me coupait presque le souffle tant je l’aimais. Mais il m’avait abandonné, m’avait rejeté, m’avait forcé à l’exil. C’est lui qui m’avait condamné à errer dans cette forêt et à faire face à ses dangers. Je devais me trouver un endroit où rester en sécurité. C'était tout ce que je pouvais me permettre de faire pour le moment pour passer par dessus cette rude épreuve de la vie. J’entendis alors de nouveau Robin prendre la parole, me délogeant de mes pensées. Il m’offrait de m’héberger afin de me rembourser une quelconque dette. Il disait que je lui avais sauvé la vie alors que la seule chose que j’avais fait, c’était le libérer de ses chaines. Tourner une clé dans une serrure, ça n’avait rien de bien merveilleux. C'était bien l'une des seules choses pratiques que j'avais su faire chez mon geôlier. Quoi qu’il en soit, je n’allais certainement pas refuser un peu de nourriture et un abri. J’avais besoin de me reposer et d’un endroit où je pourrais être en sécurité. Du moins jusqu’à ce que je trouve un endroit où m’installer définitivement. J’hochai donc la tête pour accepter.

Je me souvenais de ce jour. J’entendais les cris de douleur de Robin dans la salle de torture du château. Rumplestiltskin le torturait et comptait sans aucun doute le tuer. Je n’avais pu endurer les cris bien longtemps. À chaque fois, mon cœur se serrait et je souffrais avec le prisonnier. C’est pourquoi j’avais prit la décision de le libérer lorsque le Ténébreux avait quitté le château pour un moment. Je l’avais laissé partir avec la baguette magique qu’il était venu voler et bien qu’il ait voulu que je le suive, j’étais restée. J’ai affronté la colère de Rumplestiltskin qui m’avait forcé à le suivre dans la forêt pour retrouver son prisonnier.

Alors que nous nous mettions en route Robin et moi, je baissai les yeux et sourit légèrement après avoir grimacé de douleur en regardant mon bras à nouveau. Quelques secondes plus tard, je levai mes yeux bleus sur le voleur qui était plus grand que moi, toujours souriante. « Je crois que c’est plutôt moi qui vous est redevable. » Je posai alors les yeux devant moi, comme si je revoyais la scène se produire de nouveau devant mes yeux. Je tenais toujours mon livre contre mon cœur, comme s’il s’agissait du plus précieux des trésors. « Rumplestiltskin vous avait fait prisonnier et je vous ai aidé à vous échapper. Mais le vrai héro, ce n’est pas moi. » Il n’était pas question de me rabaisser, bien au contraire. Je ne considérais pas avoir fait grand-chose contrairement au Ténébreux qui avait épargné volontairement le voleur et sa femme. « Quand le Ténébreux a apprit que je vous avais libéré, il a décidé de vous poursuivre et de m’obliger à le suivre pour que je le regarde vous tuer avec votre propre arc. Mais contre toute attente, il a choisi de vous épargner lorsqu’il a vu que votre femme était enceinte. » Je baissai alors les yeux, agrandissant mon sourire, puis regardai Robin de nouveau. « Tout ce que j’ai fait, c’est vous détacher. C’est Rumplestiltskin le véritable héro. Je crois qu'il est mieux que vous le sachiez et que vous ne remerciez pas la mauvaise personne. » Ce jour-là, mon geôlier m’avait fait connaître un côté gentil en lui. Ce jour-là, je fus particulièrement heureuse d’être sa prisonnière. C’était comme un privilège d’avoir le droit de voir ce côté en lui. Y penser d’ailleurs me fit souffrir un peu, me rappelant que celui-ci m’avait blessé en m’obligeant à quitter sa demeure. J’avais perdu non seulement la personne que j’aimais, mais également un bon ami du nom de Lumière. Mais malgré sa méchanceté envers moi, je désirais que Robin sache qui était son véritable sauveur. Bien qu'il ait été détestable, le Dark one méritait cette reconnaissance.

Spoiler:

Je m’accrochais à ce livre comme s’il s’agissait d’une bouée, comme si elle me sauverait de quelconque danger alors qu’en fait, c’était Robin qui avait plus de chance de me protéger. Tenant le bouquin entre mes mains sur ma poitrine, l’air naturelle, j’avançais sans moins ressentir la poigne de mon agresseur sur mon bras. Ce livre était tout ce qu’il me restait de Rumplestiltskin et je voulais le garder précieusement, comme un pirate garde un trésor, ou comme un parent garde son enfant. Je gardais de précieux souvenirs avec le Ténébreux, mais sa présence manquait. Au moins, je me souvenais de la chaleur et des émotions que me procurait sa présence. Je gardais espoir qu’un jour, je les reverrais, Rumplestiltskin et Lumière.

Quelques minutes passèrent sans que l’un de nous n’échappe un mot. J’avais l’impression d’avoir causé un quelconque malaise alors qu’en réalité, je savais que c’était probablement autre chose. Après tout, je n’avais rien dit de déplacé, seulement la vérité. Puis finalement, Robin s’arrêta, m’obligeant à m’arrêter également. Curieuse, je le regardai se poster devant moi et l’écoutai attentivement. Mon ami s’excusa et lui expliqua que personne ne devait connaître le chemin vers son campement. Effectivement, c’était normal. Avec le genre de bandit que je venais de rencontrer, je comprenais bien qu’il veuille protéger son campement et les siens, surtout qu’il avait sa petite famille là-bas. Lui offrant alors un nouveau sourire, j’hochai la tête. « Bien sûr, je comprends. » Sur ces mots, Robin attacha un bandeau autour de ma tête afin de bander mes yeux. Je sentis alors mes mains serrer un peu plus fort le livre que je tenais. Ne voyant plus rien devant moi, je ne savais pas si un obstacle allait me faire trébucher et faire échapper mon livre. Cependant, je faisais aveuglément confiance à mon nouvel ami. Après tout, je n’avais pas vraiment le choix.

Quelques minutes passèrent durant lesquelles je semblai de plus en plus à l’aise de marcher sans voir devant. Puis vint ce moment où nous nous arrêtâmes. Quand je pus regarder autour, les bruits que j’avais commencés à entendre un peu plus loin se confirmèrent. Des conversations entre différentes personnes. Des sourires, de la joie. C’était un endroit qui me semblait déjà agréable dès le premier regard. Voyant Robin s’incliner, je fus légèrement mal à l’aise. « Je vous en prie, ce cérémonial n’est pas nécessaire. Appelez-moi Belle, tout simplement. Je suis votre amie. » Princesse de sang, peut-être, mais ce titre ne m’appartenait plus depuis que j’avais quitté la demeure de mon père. Désormais, j’étais Belle, ancienne princesse et servante du Ténébreux, et désormais demoiselle errante. Regardant au dessus de son épaule, je fis quelques pas avec lui. « Ça me semble très paisible comme endroit. J’ai de la chance d’être tombée sur vous. » Je le regardai en souriant, ne montrant pas trop mon impatience de boire une bonne gorgée d’eau.