Introduction Époque du sujet : Actuelle Date du sujet : 12 Mars Ordre de passage des participants : Declan - Keekee

Qui aurait pu penser, un jour, que Declan Weathers pourrait jouer les super-héros du monde des contes ? Personne. Le sorcier défendait sa famille, mais un inconnu ? C'était une première. Revenons un peu en arrière.

Le monde des contes était plongé dans le chaos. Entre les ogres qui prenaient de plus en plus le pouvoir sur les terres du royaume la nuit et les rebelles qui voulaient défier les sorciers, il y avait le choix. Declan essayait de ne pas se mêler à toutes ces histoires. Lui, il errait, tel une ombre, à travers la forêt. Parfois, il allait voir sa famille. Parfois, il allait livrer des informations à Cora. Le reste du temps, il restait seul et s'occupait comme il pouvait. Mais tout allait très vite changer. Bientôt, Declan ne pourrait plus profiter de ces moments de solitudes et serait forcé de s'encombrer de la présence d'un parfait inconnu dont-il ne savait quasiment rien.

Seul, adossé à un arbre, Declan observait le soleil qui se levait en mangeant une pomme, en guise de petit déjeuner. Il faisait tout le temps ça. C'était une habitude dont-il se passait pas. Elle lui permettait de se vider l'esprit, de ne plus penser au passé. Seulement, son calme fut interrompu par la voix d'une bonne femme qui semblait hurler après un animal. Declan lança un regard vers un chemin qui se trouvait juste en bas de là où il se trouvait. Il vit passer un couple avec un jeune homme qui avait une corde au cou. Sur le moment, le sorcier pensait qu'il s'agissait d'un esclave quelconque et il ne se soucia pas du traitement que la femme pouvait lui porter. Puis, l'homme commença alors à demander au garçon de faire un petit tour de magie pour alléger leur voyage. Declan se leva aussitôt et se planqua derrière un arbre. Il écouta un peu la conversation, puis, décida de suivre ces inconnus. Pourquoi ? Parce que lorsque des hommes traitaient les sorciers comme des bêtes, Declan se révoltait. Il suivit donc ces personnes jusqu'à ce qu'ils fassent une halte. Il avait été très prudent mais ignorait si l'un des trois protagonistes avaient senti sa présence à un moment donné.

La nuit était tombée, la lune - sous forme de croissant - surplombait le ciel et les criquets chantaient au loin. Les trois inconnus étaient bien trop loin pour que Declan puisse entendre quoi que ce soit de leur discussion. Il s'approcha alors, avec prudence. À peine eut-il fait quelques pas que les évènements s'enchaînèrent. Le jeune garçon fut mis au sol et recevait des coups. Le sorcier n'avait pas d'autre choix que d'agir. Il ne savait pas pourquoi il le faisait mais ce fut plus fort que lui. Peut-être à cause de sa mère, qui l'avait traité comme une sorte d'esclave. En tout cas, assister à cette scène le rebutait comme s'il était la victime. Alors, sans hésiter, il se décida à faire un petit tour de magie et envoya les deux brutes dans un lieu quelconque, loin d'ici, loin du jeune sorcier. Que pouvait-il faire d'autre ? Le jeune homme aurait pu mourir sous les coups.

Une fois le danger loin d'ici, Declan s'agenouilla pour être à la hauteur de la victime et voir les dégâts. « Tout va bien se passer... ils sont hors d'état de nuire... » Aussitôt eut-il fini de parler qu'il souleva le jeune homme du sol pour l'emmener dans un endroit plus sûr, au cœur de la forêt. Il alluma alors un feu et s'empressa de couvrir le sorcier avec une couverture qui se trouvait dans les bagages de celui-ci. Declan comptait rester jusqu'à ce que le soleil se lève, pour s'assurer que le jeune homme allait bien. Et puis, il s'en irait, après avoir donné des instructions au sorcier pour qu'il puisse s'en sortir à l'avenir et pour qu'il évite de se laisser traiter comme un esclave de la sorte.

Douleur. Désespoir. Lassitude. Ces mots accompagnaient chaque pas que Keenan Rodhlann faisait au quotidien. Depuis le temps, il devrait être immunisé à cette douleur mais à chaque coup, à chaque cri, elle revenait encore plus forte. Elle l'empêchait de dormir, de sourire, d'être libre. Comme cette fichue corde autour du cou qui permettait à ses soi-disant maîtres de le traiter comme un animal de foire prêt à exaucer tous leurs voeux. La triste vérité était que Keenan ne pouvait même pas réaliser ses propres voeux. Il ne demandait pas grand-chose pourtant. Il voulait simplement pouvoir observer les étoiles, les animaux, la forêt. Utiliser ses pouvoirs sans crainte. Oublier cette corde qui était finalement devenue une partie de lui. Mais avoir simplement de l'espoir lui suffirait. Seulement, l'espoir semblait avoir quitté les contrées qu'il traversait avec ce couple qu'il maudissait un peu plus à chaque seconde écoulée. Il ne pouvait rien dire, ni montrer. Il n'était qu'une marionnette utilisée à leur guise, bien que cette marionnette tant désirée ne marchait pas aussi bien qu'ils l'auraient voulu. Cette peur et cette douleur empêchaient Keenan d'utiliser convenablement sa magie. Il savait qu'un jour ou l'autre, il ne leur serait plus d'aucune utilité et ils le tueraient probablement, ou alors ils le laisseraient attaché à un arbre, condamné à mourir de faim et de soif si ses pouvoirs ne pouvaient être bien utilisés. Ce qui aurait pu lui sauver la vie était en réalité devenu sa malédiction, un fardeau bien trop lourd à porter. Un fardeau qu'il portait autour de son cou chaque jour.

Keenan leva un regard lassé, vide de toute émotion lorsqu'il lui fut demandé d'alléger le voyage du couple. Que pouvait-il faire? Dire non? Il n'en avait même plus la force. Il tenta de se concentrer, désespéré à l'idée de bien faire pour pouvoir au moins avoir une bouchée de pain en guise de repas, mais il ne parvint qu'à alléger le poids des affaires qu'ils transportaient le moins possible. C'était sa douleur qui devrait être allégée, non leur voyage. L'homme lui lança un regard mauvais puis le poussa pour qu'il continue de marcher. Il savait qu'il allait passer une soirée très désagréable et le pire, c'était qu'il était habitué à cet enfer. Il tourna cependant la tête, sentant une présence qui les surveillait. Quelqu'un était là. Un espoir? Ou bien une personne à qui ils allaient le vendre? L'espoir avait bel et bien quitté ces lieux, et le coeur du sorcier qui poursuivit sa route, épuisé émotionnellement et physiquement.

Lorsque la nuit commença à tomber, le couple décida de faire une halte pour manger. Keenan n'osa ni bouger ni parler, levant à peine les yeux pour observer la lune. Elle était si belle, si brillante ce soir-là. Sa lumière semblait transpercer l'âme de Keenan qui sourit tristement. C'était un rare sourire, aussi rare que ses lueurs d'espoir, aussi rare que les réussites de son utilisation de ses pouvoirs. Triste à dire mais vrai. L'homme le poussa brutalement, l'arrachant à sa contemplation, lui hurlant alors de réchauffer leur repas. Keenan sentit ses yeux se remplir de larmes, chaque cri était comme une lame s'enfonçant un peu plus dans son corps. Ne contrôlant ni ses émotions ni ses pouvoirs, il brûla le repas du couple au lieu de le réchauffer, et leur réaction fut sans appel. Il tomba sur le sol, roué de coups. Il serra les dents pour s'empêcher de crier mais la douleur était trop forte. Comment avait-il pu l'oublier? Elle était si insupportable. Il poussa un cri, déchirant le calme de la nuit, alors que des larmes lui brûlaient les yeux, coulant finalement sur ses joues. Il ferma alors les yeux, il était prêt à mourir. C'était bien ce qui l'attendait de toute façon.

Cependant, rien ne se passa. Les coups s'arrêtèrent soudainement, tout comme les cris de l'homme et de la femme. La douleur était encore là, ses tremblements et ses larmes aussi. Il ne réalisait pas ce qui se passait. Avait-il été finalement abandonné? De toute façon, il était incapable de se relever. Voulait-il au moins se relever et poursuivre son chemin? Tout était si paisible, sur ce sol, il ne voulait penser à rien. Il voulait simplement dormir. Une goutte de sang coula sur ses lèvres, le faisant tousser alors qu'il se sentait soulevé. Une voix qu'il ne reconnaissait pas se mit à lui parler, mais il ne parvenait pas à distinguer le moindre mot.

- Laissez-moi... par pitié, laissez-moi...

Sans le réaliser, son voeu fut exaucé. Il s'endormit. Il ne sentit même pas la couverture sur lui, ni la chaleur du feu qui réchauffait son corps glacé. Il se perdait simplement dans ce calme, dans ce sommeil tant désiré. Il aurait pu dormir durant des jours tant il était épuisé mais sa némésis, la douleur, revint, lui rappelant tout ce qu'il avait traversé. Il ouvrit brusquement les yeux, tentant de se redresser avant de pousser un gémissement de douleur. Keenan s'agrippa à la couverture et réalisa enfin sa présence. En levant la tête, il réalisa également qu'il se trouvait dans la forêt, ce lieu qui lui était encore mystérieux. A travers quelques branches, il aperçut les premières lueurs de l'aube. Combien de temps avait-il réussi à dormir? Il reporta son attention sur sa couverture. Ce n'était pas dans les habitudes de ses maîtres, même dans les pires conditions météorologiques. Grattant son cou à cause de la corde qui le démangeait, il aperçut une silhouette assise à côté du feu. Un homme qu'il ne connaissait pas. Mais aucun couple à l'horizon. Que s'était-il donc passé? Etait-il son nouveau maître? Il voulut repousser la couverture, mais il préféra la garder contre lui, encore tremblant. Il jeta alors un regard apeuré à cet homme.

- Est-ce que vous allez me frapper si je garde la couverture encore un peu...?

Ce n'était pas une manière très répandue pour parler à un parfait étranger mais Keenan avait peur. Il ne voulait plus recevoir de coups, il voulait quitter cette corde mais il n'osait qu'à la toucher. Peut-être que cet homme allait le tuer, après tout. Plus rien ne l'étonnerait de toute façon.

Pourquoi avait-il était aussi gentil avec ce jeune garçon ? Il n'était rien d'autre qu'un inconnu, après tout. Declan se posait encore la question tout en observant le feu. Et il répondait toujours par les mêmes réponses. Parce qu'il n'aimait pas qu'on s'en prenne à des sorciers. Parce que les parents du garçon ressemblaient énormément à des personnes appartenant au passé de Declan. Parce que le jeune homme avait failli mourir. Parce qu'on ne se sert pas d'un sorcier comme d'un vulgaire bétail. Toutes les réponses tournaient en boucle dans l'esprit de Declan, comme s'il oubliait rapidement les motivations de ses agissements. En réalité, il détestait être serviable avec quiconque. Alors, dans ses pensées, le sorcier faisait comme s'il se justifiait auprès de lui-même pour ne pas s'en vouloir. Il s'était montré faible - ou fort, plutôt - et avait montré une part de lui que peu de gens connaissait. La part de lumière qui constituait ce qu'était réellement Declan, lorsqu'on voulait creuser un peu plus. Mais ce qui est fait est fait. Il lança un rapide coup d'oeil vers le jeune garçon tout en croisant les bras au dessus de ses genoux qu'il avait ramené près de son torse. Désormais, il devait luter contre la fatigue, qui commençait à s'installer progressivement. Ses paupières étaient lourdes et lorsque sa tête tombait en avant, Declan ouvrait ses yeux aussi grand que possible pour ne plus sombrer. Seulement voilà, il avait besoin de repos. Il posa donc son dos confortablement contre l'arbre sur lequel il était adossé et laissa la fatigue l'emportait vers un sommeil sans rêve.

Quelques heures seulement s'étaient écoulées. Declan eut un sursaut et se redressa rapidement, toujours adossé à l'arbre. Il lança un regard vers le jeune garçon qui dormait encore. Il poussa donc un soupire et se mit à bailler bruyamment. Le feu était encore allumé mais son intensité n'était plus aussi vive qu'auparavant. Declan usa d'un petit tour de magie pour raviver les flammes pour se réchauffer. Nul besoin de la lumière du jour puisque l'aube arrivait progressivement, donnant de nouvelles couleurs au ciel. Le sorcier admirait toujours ce spectacle, sans savoir réellement pourquoi il chérissait tellement les états du ciel et de la nature. Un mouvement sortit Declan de ses pensées et il posa son regard sur le garçon qui se réveillait. Celui-ci le fixait, totalement perdu et effrayé. Il se décida alors à parler, demandant au sorcier s'il n'allait pas recevoir des coups pour vouloir garder un peu plus longtemps la couverture sur lui. Declan se leva d'un seul bond et approcha rapidement du jeune homme, s'agenouilla à sa hauteur et prit un poignard qui était glissée dans sa botte. La lame arriva près de la nuque du garçon et Declan coupa la corde d'un coup sec avant de la balancer au loin. « Tu es libre maintenant. Et tu peux garder ta couverture. » Le sorcier se redressa et rangea son poignard à sa ceinture. Il ne voulait pas répondre à la question du jeune garçon mais en avait une pour lui. « Quel est ton nom ? »

L'incompréhension. La peur. On aurait pu croire qu'elles allaient quitter Keenan maintenant qu'il était libéré de ses maîtres mais non, loin de là. Que lui réservait cet homme mystérieux qu'il n'avait jamais vu de sa vie? Peut-être la liberté. Peut-être la mort. Peut-être l'indifférence. Le jeune homme, encore prisonnier de cette corde qui lui rappelait son calvaire, se demandait s'il voulait vraiment être seul. Il se sentirait probablement plus en sécurité auprès de quelqu'un, seulement si cette personne s'avérait être de confiance et ne l'utilisait pas pour sa magie. Cela serait trop beau pour être vrai. Cette triste réalité parut un peu plus proche de son avenir alors que cet homme, après sa question, s'approchait de lui avec un couteau. Allait-il l'égorger ou simplement le blesser pour avoir osé ne serait-ce que parler un peu et poser une simple question? Keenan joignit ses mains en fermant les yeux, priant intérieurement pour que l'homme lui permette de voir un autre lendemain se lever, et marmonna en bougeant très légèrement ses lèvres. S'il savait bien s'y prendre avec un couteau, sa mort serait sûrement rapide, c'était déjà ça de gagné. Mais alors qu'il anticipait une vive douleur, il put respirer beaucoup mieux. Un poids semblait s'être retiré. Serait-il possible que... il passa sa main autour de son cou et écarquilla les yeux. Sa corde avait été coupée par cet homme qui venait de redresser. Il ne semblait pas lui vouloir de mal. Et il l'autorisait même à garder sa couverture. Avait-il trouvé un ange gardien ou de l'espoir? Un peu des deux, pensait-il.

Keenan serra un peu plus la couverture contre lui et osa même s'enrouler avec, préférant garder un peu de chaleur contre lui tant qu'il le pouvait. Il observa l'homme qui rangeait le couteau à sa ceinture. Au moins, le sang de Keenan n'allait pas couler aujourd'hui, du moins pas pour le moment. Il tentait de s'habituer à l'absence de cette corde autour de son cou. Dans quelques temps, la trace qu'elle avait laissée disparaîtrait et il pourrait laisser son passé torturé derrière lui. Enfin, une fois qu'il saurait ce qui s'était passé avec ses anciens maîtres. La voix de l'étranger retentit à nouveau, il voulait savoir son nom. Keenan n'était pas habitué à ce qu'une personne veuille savoir qui il était, à cette gentillesse. Gentillesse était un bien grand mot mais aux yeux de Keenan, ce que l'homme avait fait pour lui valait plus que le royaume entier.

- Je... je m'appelle Keenan, monsieur. Keenan Rodhlann, répondit-il en se grattant à nouveau le cou comme pour tenter de faire disparaître les dernières sensations laissées par la corde, et vous monsieur? Qui êtes-vous? Pourquoi... pourquoi avez-vous fait cela pour moi? Je vous en suis reconnaissant mais..., Keenan hésita avant de reprendre la parole, je n'ai pas l'habitude qu'on m'aide, vous savez... merci en tout cas monsieur... merci.

Son dernier merci fut presque un murmure, Keenan braquait ses yeux sur le feu qui brûlait encore devant eux pour éviter de regarder son sauveur. Il se sentait moins seul, il ne semblait plus avoir de danger le menaçant. Il était curieux à propos de l'étranger, et reconnaissant, puis il ne comptait pas le quitter immédiatement. Il avait tellement de questions en tête mais autant ne pas les poser de suite, il serait dommage de faire fuir cet homme si vite.

Le nom du jeune homme ne disait rien à Declan. Il n'avait jamais entendu parler d'un Keenan, encore moins d'une famille portant le nom de Rodhlann. Le garçon était pourtant un sorcier, tout comme son sauveur, qui l'écoutait poser ses questions. Celles-ci furent d'ailleurs nombreuses et Declan ne savait pas par laquelle répondre en premier. Son hésitation ne dura pas longtemps, puisque le jeune Keenan le remercia, à deux reprises. Comment faire dans une telle situation ? Declan ne le connaissait pas et ne voulait pas s'attarder sur les remerciements. Il devait s'assurer que le jeune sorcier ne se laisse plus avoir par des humains avides de pouvoirs sans oser en demander pour eux, puis, il s'en irait. Ce qu'il ne savait pas, c'est que le jeune Keenan n'allait pas le laisser partir. Il allait devenir son ombre, pour le meilleur... et peut-être pour le pire. « D'accord, alors... déjà, arrête de me remercier. » Son ton se voulait plutôt dur, pour que le jeune homme face à lui comprenne qu'il devait l'écouter et surtout lui obéir. « Si je t'ai sauvé la vie, c'est parce que tu n'as pas à être maltraité de la sorte ! Tu as vu ce qu'ils t'ont fait ? » Le sorcier prit fermement le menton de Keenan pour observer les bleus sur son visage, puis, relâcha sa prise sans aucune délicatesse. « Tu ne sais donc pas te défendre ? Fuir ? » Declan était en colère. Il avait l'impression de réprimander son gamin après qu'il se soit fait chahuter par des camarades. « Te battre ? Ce n'est pas parce que ces gens étaient plus âgés que toi que tu devais te laisser faire ! » Le sorcier croisa les bras. Il n'osait pas parler de magie, pas tout de suite. Il préférait que Keenan lance le sujet en premier.

« Je m'appelle Declan. C'est tout ce que tu sauras de moi !» Il fallait bien mettre les choses au clair. Le sorcier commençait à faire les cent pas, réfléchissant bien à ce qu'il dirait au garçon sans qu'il se mette à pleurer. Après tout, Declan ne savait pas s'il était du genre sensible ou non. En théorie, il l'était. Se faire frapper, accepter d'user de la magie sans s'en servir pour se défendre... Il fallait être bien naïf, bien sensible, pour ne pas oser se rebeller contre ses tortionnaires. Declan l'avait été, autrefois. Autant envers sa mère qu'envers une autre personne, qui s'était servi de lui jusqu'à ce que le sorcier ose dire "non". Il aurait pu en mourir, certes, mais au moins, il était libre aujourd'hui. Keenan devait apprendre à dire non, surtout qu'il allait devoir se débrouiller seul une fois que Declan partirait. Et ce dernier ne comptait pas faire de lui son apprenti, il n'en avait pas besoin, pas avec cette guerre contre les ogres, pas avec cette quête pour retrouver l'autre monde. Il n'allait pas jouer à l'école des sorciers dans la forêt alors qu'on avait besoin de lui ailleurs. Declan s'accorda donc quelques minutes de plus, après les présentations, avant son départ.

Arrêter de le remercier?! A présent, il allait être interdit d'user de sa politesse simplement pour remercier l'homme qui venait de lui sauver la vie? Keenan n'osa cependant rien dire, la peur revenant en lui comme un poison dont la douleur se calmait mais revenait aux moments les plus désagréables. Il sentait la peur se répandre en lui, envahissant chaque fibre de son être au fur et à mesure que l'homme lui adressait la parole. Ses mains tremblaient aussi bien de froid que de terreur. Pourquoi était-il aussi faible? D'ailleurs, les questions qu'on lui posait ne faisaient que renforcer cette impression. Son sauveur venait d'observer plus attentivement ses bleus encore douloureux sur son visage. Il avait raison après tout : pourquoi n'avait-il rien fait? Il était un sorcier, il aurait pu se libérer et mettre en place un sort sur ses maîtres. Mais la magie était la principale raison pour laquelle il s'était retrouvé dans cette situation. Il était terrorisé à l'idée de s'en servir à nouveau, pour une quelconque raison. Il maudissait sa faiblesse et sa peur à l'idée de ne pas pouvoir survivre par ses propres moyens dans ce monde encore inconnu pour lui. Il n'allait simplement qu'où ses maîtres se rendaient. Il n'avait pas le droit de parler aux autres, d'aller où il le voulait. A présent, il était encore prisonnier de cette peur. Il dut momentanément vaincre cette dernière pour reprendre la parole.

- Bien sûr que je sais ce qu'ils m'ont fait ! Chaque coup est encore douloureux et ancré à jamais dans ma mémoire ! Vous croyez peut-être que j'avais le choix? Plus j'étais maltraité, plus mes défenses étaient inutiles ! A cause d'eux, j'ai peur d'être ce que je suis ! A chaque coup, ma magie était de plus en plus faible. Oui, allez-y, rigolez, un jeune homme sans défense c'est pathétique mais un sorcier dans ce cas, c'est encore pire. Je me suis laissé utiliser pour ma magie, et battre presque à mort. Avais-je peur? Oui. Et à présent, je me demande ce que je vais faire dans ce monde ! Je ne sais même pas convenablement utiliser ma magie... vous allez me tuer maintenant que vous savez ce que je suis?

Keenan écarquilla les yeux après avoir fini de parler. Il ne s'était pas attendu à réagir de la sorte, à soulager son coeur lourd après cette longue torture émotionnelle. Parler le soulageait, et lui faisait un peu oublier sa peur. L'homme allait probablement lui rire au nez puis tourner les talons et le laisser se débrouiller. Après tout, il n'allait pas s'encombrer d'un être aussi pathétique que lui. Il fronça les sourcils en entendant l'homme se présenter. Declan... un prénom qui lui était inconnu mais qu'il n'allait jamais oublier.

- Tout ce que je saurai de vous? Alors, ça va se passer comme ça? Vous me sauvez... et puis, vous me laissez comme ça? Après tout, à quoi je m'attendais, hm? Je n'ai plus aucune valeur pour qui que ce soit. Personne pour m'aider. J'ai eu de l'espoir vous savez... une fée venait souvent me rendre visite, et elle m'avait promis de venir m'aider mais... mais elle n'est jamais revenue. Je savais qu'elle était sincère, je le sentais, alors je me demande ce qui est arrivé. Elle m'a probablement abandonné comme tout le monde mais est-ce vraiment mal de garder espoir dans les ténèbres les plus sombres...?, soupira Keenan, se parlant presque à lui-même avant de relever la tête, merci encore, m'sieur Declan. Je n'oublierai jamais la dette que j'ai envers vous. Je suppose que je dois partir, maintenant...

Keenan se releva difficilement, en gardant la couverture autour de lui. Il n'avait qu'un maigre sac avec lui, les vestiges d'une vie brisée. En regardant aux alentours, il réalisa qu'il ignorait où aller et soupira longuement. Il avait l'impression de déranger ce dénommé Declan, il le considérait probablement comme un sorcier pitoyable et il aurait bien raison de penser ainsi. Il ignorait que Declan était comme lui, un sorcier. Alors il préférait chercher une direction pour s'éloigner et tenter de reconstruire sa vie. Néanmoins, il ne bougea pas, tel un enfant perdu qui tentait de retrouver son chemin après avoir été éloigné de ses parents. Une seule larme coula le long de sa joue. Oui, il était bel et bien comme un enfant. Il tourna soigneusement la tête pour éviter d'être vu dans un tel moment de faiblesse. Il avait été suffisamment faible devant les autres, pendant de longues années.

Le ton montait rapidement entre les deux hommes. D'un coté, il y avait Declan, qui ne supportait pas les gens - ou plutôt sorciers - naïfs prêts à se laisser marcher sur les pieds. De l'autre, Keenan, qui expliquait à son sauveur pourquoi il ne s'était jamais sorti de cet enfer. Et Declan ne voulait pas rire, malgré ce que lui disait le jeune homme, qui pensait que sa situation pouvait être amusante à ses yeux. Pourquoi rirait-il du fait que deux abrutis prenaient les sorciers pour des larbins ? En temps normal, les sorciers profitaient de leurs dons pour prendre le pouvoir sur les plus faibles. Là, les rôles étaient inversés. Keenan avait servi de petit jouet capable de faire de la magie pour le bien-être de ses deux maîtres. Declan se sentit soudainement heureux d'avoir croisé son chemin. Enfin, tout du moins, pour l'avoir sorti de ce pétrin. Ne croyez pas qu'il était en train de devenir désespéré au point d'avoir de la compagnie, pas du tout ! Et le jeune Keenan pensait encore que son sauveur aller le tuer. La blague. « Si j'aurais voulu te tuer, crois-moi, tu serais déjà six pieds sous terre ! » Et pas qu'un peu. Declan avait la réputation de tuer des gens, bien qu'il ne le faisait absolument pas, mais lorsqu'il n'avait pas d'autre choix... Alors, s'il aurait voulu mettre un terme à l'existence du gamin, il l'aurait fait sans attendre.

Il se présenta ensuite de la façon la plus simple et désagréable qu'il fut. Mais Keenan n'était pas de cet avis. Il semblait vouloir se raccrocher à son sauveur comme une étoile de mer à son rocher. Declan l'écoutait parler, attentif. Il n'avait pas décroisé ses bras mais son visage commençait peu à peu à se radoucir. Oui, vous avez bien lu. Le sorcier qu'il était ne cessait de porter un masque d'indifférence, mais face à ce jeune homme qui n'avait certainement eu aucune vie normale, comment se montrer impassible ? Keenan était perdu. Il avait besoin d'un guide. Declan se maudissait déjà de penser à cette possibilité de le devenir. Puis, dans son esprit, il se concerta avec lui-même. Il aiderait le sorcier, mais juste un court moment. Pas question qu'il devienne son ami ni son serviteur ou dieu sait quoi encore. Keenan lui faisait véritablement de la peine, mais il ne comptait pas le lui dire, hors de question ! Son bon fond, il le gardait que pour des rares occasions. Aujourd'hui était une de ces rares occasions. « Tu vas rester.» Il soupira, comme si cette phrase était difficile à prononcer pour lui. « Mais attention ! Je ne suis pas ton ami, c'est bien clair ? Et je ne suis pas ton ennemi non plus. Arrête de penser que je suis prêt à te tuer ou à te frapper ! Mon poing se mérite réellement. » Oui, Declan était bagarreur et si Keenan venait à le chercher, tant pis pour lui. « Maintenant tu me suis, on a de la route à faire. » Sur ces mots, le sorcier pris sa besace et commença à s'éloigner du feu de camp.

Point positif : m'sieur Declan ne voulait pas le tuer. Il pourrait enfin arrêter d'avoir peur à chaque mouvement que l'homme faisait. Il avait toujours peur du moindre geste, comme si une main allait s'abattre sur son visage pour le frapper ou s'emparer d'une arme pour le battre. Bien sûr, il n'allait pas s'arrêter de sursauter du jour au lendemain, mais c'était déjà un énorme pas en avant pour Keenan. Il sentit ses lèvres s'étirer pour adresser un léger sourire reconnaissant à Declan avant de tenter de se repérer. Où était-il? Allait-il se faire attaquer? Pouvait-il retrouver sa fée? Il n'allait pas risquer d'utiliser ses pouvoirs, avec un peu de chance il n'aurait plus de cheveux ou se transformerait lui-même en escargot. Il ressemblait suffisamment à un escargot comme ça, tant il était lent et ses cheveux frisés semblaient former une carapace sur son crâne. Il n'allait pas devenir encore plus ridicule, il attendrait un record absolu. Mais son air de petit garçon perdu n'allait pas le mener loin. Il allait encore se faire embarquer par des personnes aux intentions douteuses, et sa liberté ne serait que de courte durée. Avec un peu de chance, m'sieur Declan allait l'adopter, et il ne croyait pas si bien dire en entendant les paroles de l'homme, du moins ce qu'il en comprenait.

Il pouvait rester avec lui. Declan acceptait que Keenan, petit sorcier insignifiant, reste avec lui. Il ne voulait pas le tuer, il prétendait que son poing se méritait vraiment. Keenan ne voulait pas mettre m'sieur Declan en colère, même s'il était trognon quand il était grognon. Il ne pouvait pas y croire, il ne réalisait pas que quelqu'un désirait véritablement sa compagnie, et pas pour sa magie. Etait-ce réellement en train d'arriver? Visiblement, Keenan avait beaucoup à apprendre de la vie et de la magie. Declan semblait être la personne idéale pour ça. Il voulait danser, le serrer dans ses bras, chanter, courir tout nu dans l'herbe. Oui, oui, à ce point. Mais il faisait froid, alors il garderait ses vêtements. Montrer ses fesses à m'sieur Declan n'allait pas le convaincre de le faire rester. Il allait se faire virer avec une fessée qui le ferait atterrir dans une autre contrée, et il serait une nouvelle fois paumé. Cela ne changerait pas du quotidien, de toute façon.

- Merci m'sieur Declan, je vous promets que je ne vous embarrasserai pas et que je serai sage ! Si vous voulez, avec un peu d'entraînement, je pourrai vous montrer des tours de magie ! Vous n'aurez pas peur, hein m'sieur Declan?, Keenan ne pouvait plus s'empêcher de parler tant il était heureux mais il ne réalisait même pas que Declan s'éloignait. Ils avaient de la route à faire mais Keenan avait des choses à dire. Il s'empara de son sac et suivit Declan aussi vite que possible. D'ailleurs, il se hâtait tant qu'il tomba et roula sur le sol avant de se relever difficilement. Super, il aurait une superbe bosse sur la tête telle une colline qui se dressait à travers l'herbe frisée par le vent. Heeey, m'sieur Declan, attendez-moi ! Où va-t-on? On va voir des lutins? J'ai toujours rêvé de voir des lutins ! Mais avec sa petite voix, ses cheveux en pagaille et son pas qui laisserait penser de loin qu'il sautillait derrière Declan, Keenan ressemblait lui-même à un lutin.

Qui aurait cru que ce gamin pouvait être aussi bavard ? Une fois mis en marche, impossible de l'arrêter. Declan commençait donc à s'éloigner, essayant de ne pas répondre aux paroles du jeune sorcier qui avait hâte de lui montrer des tours de magie, en espérant ne pas l'effrayer. Savait-il au moins à qui il s'adressait ? Visiblement pas. Et puis, c'était quoi ce surnom ? M'sieur Declan ? Le concerné détestait entendre le gamin l'appeler ainsi. C'était horrible et absolument ridicule. Il n'avait rien d'un noble après tout. Declan faillit lui faire la réflexion mais décida d'abandonner en voyant que le jeune garçon était tombé par terre. Super, en plus d'être bavard il ne semblait pas pouvoir tenir sur ses deux jambes correctement. Que Keenan ne pense pas avoir affaire à une nourrisse parce que Declan était tout sauf un gardien d'enfants ! Il n'allait pas soigner ses bobos quotidien ni le border avant de dormir, hors de question. Cette image donna d'ailleurs d'horribles frissons d'effrois au sorcier qui pressait le pas en se maudissant de ne pas être parti dans la nuit, lorsque Keenan dormait. Il aurait pu se débrouiller après tout ! Pourquoi Declan s'était montré aussi gentil envers ce gamin ? Oui, il lui faisait un peu penser à lui plus jeune, lorsque sa mère l'avait forcé à user de la magie, mais quand même.

Il se tourna vivement en entendant le jeune garçon hurler après lui. L'avait-il perdu ? Non, Keenan n'arrivait simplement pas à suivre. Et Declan ne le porterait sûrement pas sur son dos pour aller plus vite, hors de question. Plutôt le semer en cours de route, en espérant qu'il survive seul. Non, c'était méchant. Declan n'était pas censé l'être ? Peut-être pas assez pour faire une telle chose. Keenan était d'ailleurs bien trop naïf pour survivre sans l'aide de quelqu'un. Il venait de parler de lutins. De lutins ! Était-il fan de ces petites créatures au point de vouloir en croiser ici ? « Est-ce que tu peux arrêter de m'appeler Monsieur ? Je m'appelle Declan, DE-CLAN ! Pas de monsieur avant, ni après ! » Il continua sa marche, décidé à ne pas se mettre en retard plus qu'il ne l'était. Mais il n'en avait pas fini avec ses recommandations. « Il va falloir que tu apprennes à marcher vite, à mon rythme. Je ne vais pas m'arrêter tous les deux mètres sous prétexte que tu traînes dans mon dos. » Ses pas étaient vraiment très rapides, pauvre Keenan. « Dis moi aussi ce que je dois savoir sur ton compte.» Il doutait ne pas se laisser surprendre très bientôt mais tant pis, autant demander.

Pas de monsieur? Keenan écarquilla les yeux avant de faire la moue, tel un enfant auquel on interdisait de jouer avec son nouveau jouet. Il tentait simplement de se montrer respectueux envers l'homme qui lui avait sauvé la vie. Ce n'était pas comme s'il lui sautait sur le dos en l'appelant papa et lui demandait de courir pour se promener. Le jeune sorcier soupira, même si Declan avait accepté sa présence, il se sentait encore comme un fardeau qui ralentissait cet homme grognon qui semblait déjà regretter sa décision. Il continua d'écouter Declan en silence, alors qu'il se tordait les doigts, de plus en plus nerveux. Il lui était difficile de s'habituer à ce nouveau rythme, alors qu'il avait passé toutes ces années à être tiré par une corde et à trébucher en manquant de souffle. Il ne réalisait pas encore qu'il pouvait marcher librement. Bon, bien sûr, il ne pouvait pas encore prendre des pauses et observer les petits oiseaux et le ciel toutes les cinq minutes. M'sieur Declan ne serait pas du tout content, et Keenan ne voulait pas le fâcher davantage. Il s'éclaircit la gorge, tenant à s'excuser alors qu'il n'avait rien fait de mal. La prochaine fois, il lui lancerait une pierre sur la tête pour l'interpeller, pensa-t-il avant de secouer ses frisettes sur sa tête. Non, c'était une très mauvaise idée.

- Pardon monsi... non, pardon Declan... je... je voulais juste me montrer respectueux. Vous m'avez sauvé la vie, c'est la moindre des choses, commença à dire Keenan. Il lui semblait qu'il s'était excusé toute sa vie et les choses n'allaient pas changer de sitôt apparemment. Je tâcherai de marcher plus rapidement... je m'habitue juste à ce nouveau rythme. Ca me fait bizarre de ne plus avoir cette corde, vous savez. Pardon.

Keenan sentait que Declan allait lui reprocher de trop s'excuser. Il faisait tout de travers, malheureusement. Un peu déboussolé, il suivit l'homme en faisant de son mieux pour ne pas le ralentir. Ce qui sortit de la bouche de Declan le surprit. Il voulait en savoir plus à son sujet. Qu'y avait-il à raconter hormis son calvaire avec une corde pour seule compagnie et les coups en rappel de sa douleur et de sa solitude? Il était persuadé que Declan ne voudrait rien entendre de tout ceci, qui le voudrait de toute façon? Mais il avait aussi peur. Allait-il l'abandonner en réalisant qu'il avait choisi un être faible en compagnon de route? Keenan ne supporterait plus la solitude, il en deviendrait probablement fou. Il était d'ailleurs étonné de ne pas l'être devenu après tout ce temps. Il préféra demeurer silencieux durant un long moment, se contentant de marcher derrière Declan, alors qu'il cherchait ses mots. Il n'allait pas pleurer sur son passé, non, trop de larmes avaient déjà été versées à cause de cet enfer. Il pourrait verser des larmes de joie lorsqu'il maîtriserait totalement sa magie et se sentirait bel et bien libre.

- Je vous épargne l'histoire détaillée de ma vie. Je ne pense pas que vous voudriez savoir le nombre exact des cicatrices et des bleus sur mon corps, ni de mes innombrables échecs quand j'essayais d'utiliser la magie. J'ai le souvenir d'avoir toujours été faible, impuissant, incapable de faire quoi que ce soit de bien dans ma vie, Keenan soupira longuement, décidant de se confier à Declan. Mais peu lui importait en réalité si l'homme l'écoutait ou non, il semblait se parler à lui-même et cela le soulageait énormément. Je me souviens de mon amitié avec cette fée, Evelyn... c'était la plus jeune des fées du monde enchanté... elle tenait absolument à m'aider, optimiste, et brave. J'admirais sa bravoure et cette petite étincelle dans ses yeux. J'ai l'impression que je n'ai jamais eu cette étincelle dans ma tête. Et hormis elle, personne n'a voulu m'aider. Jusqu'à vous. Sinon, comme vous avez pu le remarquer, je suis terriblement lent et je ne sers à rien. Le jeune sorcier dépassa Declan dans sa marche sans le réaliser, emporté par ses souvenirs. Il réalisa ce fait et tourna la tête vers l'homme. Au moins, le problème du rythme semblait réglé, il suffisait juste de faire parler Keenan. Et vous alors? Devrais-je savoir quelque chose en particulier?