Introduction Époque du sujet : actuelle Date du sujet : poisson d'avril Ordre de passage des participants : hunting - mara

Hunting avait repris son train de vie quotidien, comme si sa rencontre avec le docteur Cadwell n’avait laissé aucune trace, comme si elle n’était jamais passée chez lui en soirée et qu’elle avait cherché à effriter l’épaisse carapace qui servait de peau au jardinier. Elle avait eu des espoirs, Hunting lui avait tous écrasé, comme il avait écrasé son bras sur la gorge délicate de la femme médecin pour se débarrasser d’elle. En apparence, rien ne laissait présager qu’il avait reçu une visite des plus dérangeantes. Cependant, à quelques reprises, il se retrouva à penser – avec un amusement froid – à ce que lui avait dit le docteur, entrainant une vague de dégout pour la jeune femme, un ressentis qui ne lui était pas rare envers les habitants de cette petite ville. Cependant, rien n’avait atteint une telle envergure. Si Mara avait bien réussi un exploit, c’était de faire ressentir au tueur une émotion à un stade plus prononcé qu’il ne l’avait jamais eu pour quiconque.

Hunting ne l’avait pas perdue de vue, bien conscient qu’elle savait ce qui se cachait sous le visage taciturne de l’homme, une figure bien sombre qui faisait trembler Storybrooke. Il devrait lui envoyer un autre corps, comme la première victime qui l’avait menée sur ses traces, une sorte de souvenir, pour lui dire qu’il veillait toujours sur elle, sans que cela soit pour le meilleur. Il ferait très certainement ça, pour son prochain client. Il prendrait un soin particulier sur celui-ci. Peut-être graverait-il même le nom de la doctoresse sur la peau écorchée de sa victime, pour qu’elle se sente personnellement visée. Oui, gravé ces quelques lettres avec du fer chauffé à blanc, à un lieu qui ne se prêtait pas au regard, mais qu’il savait à coup sûr que la jeune femme observerait. Il camouflerait tout cela derrière un incendie et s’assurerait que la pauvre créature soit assez vivante pour être amenée au bloc opératoire, un jour où Cadwell serait de service, pour qu’elle puisse espérer le sauver, sans qu’elle n’y parvienne. Hunting devrait prendre soin de couper la langue de son client, ou alors de la lui carboniser. Tout était bon pour que son potentiel futur malheureux qui aurait droit aux pires soins de la part du jardinier soit incapable de parler et de révéler les agissements.

Hunting fut tellement pris dans sa réflexion que, quand il aiguisa les lames de sa tronçonneuse, sa main dérapa, à cause de son inadvertance. Et le bout de métal, fraichement aiguisé, eu l’occasion de tester son tranchant sur le bord de la main du jardinier, entamant la chair, de la base de son petit doigt jusqu’au-dessus de son poignet. La douleur lui zébra les nerfs sans que cela ne lui tire un seul cri de douleur. Ses yeux bleus, ternes, se posèrent sur la blessure qui ne prit pas long à saigner, dégoulinant de carmin sur sa main, sur le sol. Ses réflexes furent rapides, alors qu’il se saisissait d’une corde pour faire un semblant de garrot, en dessous de son poignet, pressant un chiffon propre sur sa blessure. Il était bon pour un tour aux urgences. Ce n’était pas le genre de blessure qui se soignait avec un petit pansement. Il avait besoin d’être recousu au plus vite. D’autant plus qu’un peu de désinfectant ne serait pas du luxe non plus. Il était incapable de se rappeler la dernière fois qu’il s’était servi de sa tronçonneuse.

Hunting demanda à un passant, qui s’avérait être un client, aussi, de le conduire à l’hôpital. Grâce à son teint qui virait de plus en plus pâle, malgré le calme apparent de l’homme, son vis-à-vis n’eut pas besoin d’être interpellé deux fois pour faire monter le brun dans sa voiture et l’amener aux urgences le plus vite possible, ce qui ne fut pas long. Heureusement, car la douleur était lancinante et ce n’était pas un morceau de chiffon qui ferait grand-chose pour empêcher le saignement. Hunting s’invita donc au service spécialisé, se signalant, donnant les informations nécessaires avant d’être relégué au coin des patients qui se devaient d’attendre. C’est là, la tête appuyée contre le mur, un air légèrement vaseux sur le visage, que ses pensées retombèrent sur Cadwell. Elle était de service aujourd’hui – nous ne nous intéresserons pas sur le fait qu’il soit en possession d’une telle information. Ca pourrait être intéressant, de la revoir.

Hunting était curieux, de savoir comment elle avait vécu son réveil, et les jours qui le précédèrent. S’il l’avait observé de loin, il lui était malheureusement impossible d’entrer dans la tête de la femme médecin, ce qui était probablement mieux, au risque de découvrir de nombreux arcs-en-ciel et autres papillons. Bon, il devait tout doucement commencer à se vider de son sang pour penser à une telle image. Il cligna plusieurs fois des yeux, secouant la tête. Une infirmière choisit ce moment pour arriver. Hunting avait l’air encore plus antipathique que d’habitude, les yeux cernés par un semblant de douleur, sa main tachée de sang. On lui plongea le membre dans une solution dont il ne voulut rien savoir, reconnaissant les effets de l’antiseptique sur sa peau. Il plissa un peu des yeux, un air mauvais passant sur ses traits, quand la jeune femme eut le dos tourné.

Quelques jours s’étaient écoulés depuis que l’enquête de Mara l’avait menée entre les griffes d’un criminel. Si elle semblait n’être plus aujourd’hui d’actualité, la chirurgienne ne l’avait pas pour autant reléguée au passé. Elle avait simplement eu fort à faire à l’hôpital, les accidents graves se multipliant à un rythme alarmant. Si la plupart ne s’apparentait pas à Hunting, Mara ne pouvait pas s’empêcher de penser à lui. Elle ne craignait pas seulement qu’il puisse lui balancer sur les bras un nouveau cadavre qui s’ignorait, mais elle se demandait également si son passage avait pu produire quelques effets bénéfiques. Mara avait repris connaissance chez elle, sur le canapé du salon. Aucune affaire ne manquait dans son sac, et après une rapide analyse de son corps, elle avait constaté qu’Hunting n’avait pas profité de son inconscience pour la toucher. Elle avait opposé à son reflet dans le miroir un regard indéchiffrable. Elle ne savait pas encore bien, alors, comment interpréter son étrange échange avec le tortionnaire. Tout ce qu’elle pouvait admettre, c’était que contrairement à ses habitudes et à ses penchants, il ne lui avait rien fait, se contentant de la ramener saine et sauve chez elle. La jeune femme ne pouvait pas ignorer cet aspect de la soirée. Même si ses paroles et ses gestes n’avaient pas semblé perturber réellement Hunting, force était de constater qu’il l’avait épargnée. Mara voulait voir le bien en chacun, et elle espérait qu’il n’était pas une exception à la règle. Comment aurait-elle pu passer à côté de cette inestimable lueur d’espoir ?

La chirurgienne était en poste depuis une heure particulièrement avancée de la matinée, et elle s’apprêtait à prendre une pause bien méritée. Son attention dérapa cependant alors qu’elle traversait le service des urgences. Ellery. Son air mauvais attira son regard avec une efficacité effrayante. Son estomac avait beau se tordre sous l’effet de la faim, la présence du criminel dépassait de loin les besoins vitaux de la jeune femme. Elle fronça les sourcils, alors qu’elle s’était stoppée nette. Une collègue s’arrêta à sa hauteur et suivit son regard. « Un problème, Cadwell ? » Elle ne lâcha pas l’homme des yeux, tout en agitant fermement la tête pour signaler que tout allait bien. Elle ne prit pas la peine de répondre, plantant l’autre médecin en s’avançant vers le « box » où avait été installé Hunting. Mara se posta aux côtés de l’infirmière, qui leva vers elle un œil interrogateur. « Je m’occupe de lui, Stella, d'autres doivent avoir davantage besoin de tes soins. » La femme ne se fit pas prier, et décampa efficacement. Mara jeta un œil sur la solution dans laquelle trempait la main de l’homme. Sévère, elle attrapa une serviette avant de saisir le poignet de son patient, et d’essuyer méthodiquement les contours de sa blessure. Elle grimaça. « Tu n’y es pas allé de main morte. » Elle reposa la serviette, sans pour autant délaisser la main de l’homme. Il paraissait essentiel de le recoudre, et si Mara aurait pu procéder par des méthodes modernes qui réduisaient la douleur, elle n’avait guère envie de ménager le criminel. Elle amena un chariot de soin près de son patient, fit reposer sa main sur le plan prévu à cet effet, puis s’éloigna pour se nettoyer en vue de l’opération de routine. Elle enfila ensuite des gants stériles, et s’installa sur un tabouret mobile prévu pour ce genre d’interventions mineures. Elle croisa un instant le regard de Hunting, saisit l’aiguille atraumatique qui allait lui servir à suturer la plaie, puis souffla : « Ce sera douloureux, je suis désolée. » Un sourire au coin des lèvres, elle passa son aiguille dans la chair de l’homme, le fil pénétrant par un bord de la plaie pour ressortir par l’autre. Elle aimait assez servir à Hunting les mêmes paroles dont il l’avait gratifié avant de l’étouffer. Serait-ce une façon de se venger ? Mara était trop intègre pour songer à une telle bassesse, mais elle voulait simplement faire comprendre au tortionnaire qu’il n’aurait pas toujours le dessus.

Tout au long de sa suture, Mara ne cessa pas de jeter de légers coups d’œil à Hunting, le jaugeant et le surveillant. Mais ça ne l’empêchait pas de se concentrer sur son opération. Les sutures étaient l’une des premières choses qu’un apprenti chirurgien se devait d’apprendre à réaliser. Mara en avait fait tellement qu’elle aurait pu procéder les yeux fermés. Et si elle les gardait bien ouverts actuellement, c’était davantage à cause de son patient que de la suture. Il n’y avait rien à faire, elle n’était pas rassurée en présence du criminel. Et pourtant, elle ne pouvait pas laisser une infirmière prendre soin de lui. Elle avait l’étrange sensation qu’il serait son fardeau désormais. Ayant compris le danger qu’il représentait pour Storybrooke, Mara ne pouvait pas décemment laisser quiconque d’autre pénétrer dans sa vie. Elle ferait tout pour protéger ses futures victimes. Si la douceur ne marchait pas, elle n’hésitait pas à se placer seule dans son angle de tir afin de capter toutes ses mauvaises intentions. Ainsi, si son entreprise de réhabilitation de l’esprit d’Hunting venait à échouer, elle serait la seule à en supporter les conséquences. Le fuir serait trop simple, et ça reviendrait à fermer les yeux sur les malheurs qui guettaient Storybrooke. Ce serait de la non-assistance à personne en danger. Et parce qu’elle avait prêté serment, Mara ne pouvait s’y résoudre.

« Et voilà. » Elle reposa ses outils, et s’enquit de recouvrir la plaie nouvellement suturée d’un baume spécifique. Considérant Hunting, tout en massant délicatement les contours de sa plaie, elle ajouta : « Les fils se résorberont d’eux même d’ici quelques semaines. Normalement, ton organisme devrait les avoir complètement éliminés, mais si une inflammation se déclenche, il faudra revenir me voir. » Ses traits s’adoucirent, tandis qu’elle se décidait finalement à traiter le criminel comme un patient ordinaire.

Hunting expira longuement, laissant la brulure de l’alcool nettoyer sa blessure fraichement acquise, endormant partiellement sa main, dont les nerfs renvoyaient encore des signaux douloureux à son cerveau. S’il identifiait le mal et qu’il le ressentait, il restait néanmoins indifférent, les traits sur son visage tendus par le manque de sang, mais c’était tout. Il n’avait aucune horreur devant sa chair ouverte, ni un haut les cœurs à cause de la douleur vivre. Il y était habitué, d’une certaine manière. Il ne se souvenait pas avoir jamais subi de blessure grave, mais il présentait une certaine résistance au mal que pouvait subir son corps. Cela l’embêtait plus qu’autre chose. Il devrait faire attention à sa main pour plusieurs jours, voire même éviter les travaux trop sollicitant, ce qui était une mauvaise chose avec l’arrivée du printemps et donc la reprise de son travail à son plein potentiel. Sa maladresse ne pouvait pas mieux tombé en soi. Hunting tourna ce genre de pensée encore un temps, attendant que l’infirmière revienne et s’occupe de lui. C’est là que son regard attrapa la présence de Cadwell. Il savait qu’elle travaillait aujourd’hui, cependant, il ne l’attendait pas à la voir ici. Ses iris reflétèrent sa surprise passagère, alors qu’il se ferma un peu plus. La doctoresse ne pouvait pas tomber au pire moment.

Hunting lui adressa un regard inquisiteur quand elle congédia l’infirmière. Cela voulait-il dire qu’elle se chargerait de lui ? elle, une si grande chirurgienne. Il devait se sentir honoré… ou juste désagréablement dérangé par ce geste de bonté pure qu’elle faisait. Ici, il ne pourrait ni lui échapper, ni l’assommer pour qu’elle le laisse en paix. Il serait obligé d’attendre qu’elle lui déverse ses saintes paroles ennuyeuses tandis qu’elle prenait un soin particulier de sa main. Non, il voulait que l’infirmière revienne, même si elle était moche, elle serait moins embêtante que Cadwell. Tu n’y es pas allé de main morte. Son regard vide, quoiqu’un peu fiévreux, se posa sur la jeune femme, haussant les épaules comme seule réponse. Les accidents arrivaient, mêmes aux tueurs. Personne n’était à l’abri. Devrait-il lui avouer qu’il s’était fait cette blessure en pensant à elle ? Oh oui, il était curieux de voir sa réaction, comment elle réagirait à cette nouvelle. Ce serait avoué qu’il ne l’avait pas effacé de sa mémoire, mais Hunting n’était pas du genre à se cacher de ce genre de pensées. D’autant plus si elles permettaient de déstabiliser la femme médecin.

Il n’eut cependant pas le temps de s’exprimer, l’observant mettre ses gants, tandis qu’elle s’attelant à recoudre sa main, sans aucune anesthésie. Ses muscles, instinctivement, se tendirent. « Vous ne sauteriez pas une étape ? » Si elle le tutoyait déjà, lui ne lui réserverait pas cet honneur avant un certain temps. Sa voix était crispée, preuve qu’il n’était pas insensible au contact de l’aiguille dans sa peau, ressentant le fil lui traverser sa peau blessée. Tout était diffus, cependant, se perdant dans l’amalgame de son membre blessé. Il resta silencieux le reste du temps, se contentant de serrer sa main indemne sur son genou, attendant sagement qu’elle termine son travail. Cadwell n’était plus aussi bavarde que durant leur première rencontre. S’il mit cela sur sa concentration, il en fut tout de même soulagé. Il n’aurait pas voulu entretenir une conversation alors qu’elle s’amusait à refermer la plaie, de la manière la plus vive qu’il soit pour sa sensibilité. Aucun de ses regards ne lui échappa, car à chaque fois qu’elle leva la tête vers lui, les yeux du chasseur étaient posés sur ceux du médecin. Il ne prêtait pas attention à sa blessure, il en avait vu assez. Etudier la femme médecin était une activité qui le détournait des soins actuellement prodigués. Il se demandait pourquoi elle avait choisi de venir près de lui. Il devait très certainement voir des gens qui méritaient son attention, pour plus qu’une simple coupure.

Le baume fut posé sur ses points de sutures tous frais et il regarda enfin le travail accompli par la chirurgienne. Il n’écouta pas ses explications, se moquant bien que les fils partent d’eux-même. Dans une dizaine de jours, s’ils étaient toujours là, il les enlèverait. Il ne bougea pas trop sa main, des faibles tremblements secouant ses doigts, sa peau encore tordue par la douleur. « Je ne sais pas si je viendrai vous voir si j’ai droit à un traitement identique. » Lui ne la considérerait pas comme une femme ordinaire, il ne le pouvait pas. Et il venait de faire un effort. Les quelques mots échappés ressemblaient à une plaisanterie. C’en était une. Même s’il ne souriait pas et qu’aucun amusement ne passa dans ses prunelles. Pourtant, c’était bien une tentative de faire un peu d’esprit. « Pourquoi avez vous fait ça ? » Là, il n’y avait plus d’humour, que la constatation froide qui lui était habituelle. La conversation qu’ils avaient eue, plusieurs jours dans le passé, il ne l’avait pas oublié. Hunting aurait bien voulu, l’effacer de sa mémoire, cependant, elle n’avait eu de cesse de la poursuivre. Il lui était déjà arrivé de recoudre des gens, sans anesthésie, juste pour la satisfaction sadique que produisait une telle procédure. « Est-ce une manière de vous venger ? Est-ce une manière de vous montrer supérieur ? » Sa tonalité représenta le dangereux de ses propos, de ce venin qu’il prendrait plaisir, petit à petit, à disperser sur Cadwell.

Hunting laissa flotter quelques secondes, avant de regarder la femme médecin. Il avait pleins de question à lui poser. C’était étrange, ça ne lui arrivait jamais. Normalement, le seul intérêt qu’il avait pour les gens, s’étaient ses clients. Et bien qu’il ait dans ses projets de mettre fin à la vie de la femme médecin dans un futur pas trop éloigné, l’envie de lui disséquer le cerveau se fit moins oppressante. Il mit ça sur ce qu’il venait de subir. Bien que, plus tard, une fois son énergie récupérée, il ressentirait la même chose, plus forte encore. « Finalement, il semblerait que nous ne soyons pas si différents l’un de l’autre, Mara. » Ses lèvres s’étirèrent, fines, cruelle, à la constatation.

« Vous ne sauteriez pas une étape ? » Mara fit mine de n’avoir rien entendu. En temps normal, une telle remarque l’aurait fait réagir. La chirurgienne n’était pas du genre à laisser quoi que ce soit au hasard. D’ailleurs, l’absence d’anesthésie n’avait rien d’hasardeux. Hunting avait à faire à une professionnelle, comment pouvait-il imaginer qu’elle sautait la moindre étape ? C’était par choix que Mara avait décidé de passer directement à la suture, sans s’encombrer de la douleur que pourrait ressentir le criminel. L’homme était un tortionnaire, elle en avait eu le cœur net en se risquant chez lui. Il était alors passé de suspect à criminel notoire dans son esprit. Et si, jusqu’au bout, Mara avait voulu croire en ses possibilités de repentir, elle n’était pas pour autant dupe. Elle avait beau rechercher le bien en chacun, elle ne pouvait pas nier l’évidence. Hunting avait poussé aux portes de la mort le dernier patient qu’elle avait perdu. Et ce n’était de toute évidence ni la première ni la dernière de ses victimes. L’homme pouvait donc bien souffrir d’une anesthésie "oubliée". Il pouvait bien ressentir l’aiguiller s’enfoncer dans sa chair, et le fil la suivre. Il pouvait endurer cette légère suture, pour tout le mal qu’il avait dispensé autour de lui. Mara n’était pas quelqu’un de sadique, elle jugeait simplement que ce n’était rien que le criminel n’avait mérité.

A chaque fois qu’elle relevait les yeux pour surveiller Hunting, ses prunelles la fixaient. Un étrange sentiment l’étreignit. Mara ne pouvait pas croire que tout espoir était perdu. A chaque regard, elle scruta le tortionnaire, à la recherche d’une lueur digne d’intérêt. Mais son travail fut accompli avant qu’elle ait la chance de repérer le moindre signe encourageant. « Je ne sais pas si je viendrai vous voir si j’ai droit à un traitement identique. » Un sourire étira les lèvres de la chirurgienne. Si le visage du criminel ne trahissait pas la moindre émotion, Mara réussit à y voir un indice de bonne humeur. Sans doute était-elle folle de continuer à courir après l’espoir en ce qui concernait cet homme, mais elle ne pouvait tout simplement pas faire autrement. « Pourquoi avez-vous fait ça ? » Mara ne bougea pas, plantant définitivement son regard sur Hunting, qui poursuivait déjà : « Est-ce une manière de vous venger ? Est-ce une manière de vous montrer supérieur ? » Elle haussa légèrement les sourcils, et se redressa de son siège, un main sur l’établi sommaire qui lui avait servi à réaliser la suture. « Plutôt venger ceux sur lesquels tu as accompli ton travail malsain. » Elle fit rouler le chariot de soin jusqu’à son emplacement originel, tout en précisant : « Mais l’altruisme est une notion que tu ne maîtrises pas encore. » Pas encore. Signe que Mara ne baissait pas les bras. Elle retira ses gants et les jeta rapidement dans la poubelle prévue à cet effet, puis elle se tourna vers Hunting, qui posa ses yeux fins et imperturbables sur elle. « Finalement, il semblerait que nous ne soyons pas si différents l’un de l’autre, Mara. » Le sourire qui se déploya sur les lèvres du criminel lui fit arquer un sourcil, plus encore que ses mots.

Elle ne s’approcha pas de lui, observant une distance de sécurité malgré la confiance qu’elle souhaitait placer en lui. « Si seulement ça pouvait être vrai. » Elle ne voyait pas les choses sous le même angle. Ne s’estimant pas sadique, ou avide de vengeance personnelle, elle ne pouvait pas se laisser atteindre par ses propos, qui ne visaient qu’à la déstabiliser. En revanche, elle voulait croire qu’ils n’étaient pas si différents, car alors l’espoir ne serait plus une folie. Si Hunting pouvait lui ressembler, Mara ne douterait pas de pouvoir le ramener sur le droit chemin. Mais c’était loin d’être le cas, et c’était pourquoi elle n’avait pas réussi à obtenir grand-chose de concluant de sa part lorsqu’elle s’était invitée à l’improviste chez lui. Hunting était un grand mystère aux yeux de la chirurgienne. Mais ça ne l’incitait pas pour autant à baisser les bras. « J’aimerais que tu sois capable d’empathie, comme moi, malheureusement, j’ai peur que tu te sois trop longtemps satisfait de ta vie d’égoïste et de reclus. » Elle croisa les bras, et s’appuya contre un meuble derrière elle. Son regard plongea dans celui du criminel, et elle l’observa quelques secondes avant d’ajouter : « Mais si je suis capable de te recoudre la main sans anesthésie et sans état d’âme, alors tu es peut-être toi-même capable d’état d’âme. » Un sourire balaya l’air soucieux qui flottait sur ses traits. Elle décroisa les bras et avança vers Hunting. Ne lâchant pas une seconde son regard, elle glissa ses doigts sur sa joue et attrapa son menton. Elle se pencha légèrement, et ses prunelles s’illuminèrent alors que la distance qui séparait leurs visages diminuait. « Tu ne seras jamais en paix avec moi. » Ignorant sciemment les répercussions de ses mots et de ses actes sur un esprit malade, Mara effleura les lèvres du tortionnaire, et l’embrassa dans une caresse légère. Ça ne dura qu’un instant, et elle se redressa presque aussitôt. S’ils étaient isolés dans un box, ils n’en étaient pas pour autant à l’abri des regards, et la chirurgienne ne donnait pas cher de sa peau si un supérieur venait à la surprendre dans une telle position. Elle s’écarta plus parfaitement d’Hunting, retirant ses doigts de son menton, mais ne détournant pas pour autant les yeux.

Mara ne réalisait pas les ennuis dans lesquels elle se jetait en agissant ainsi avec un psychopathe de la trempe d’Hunting. Mais tant qu’elle gardait espoir, elle ne pourrait pas le lâcher. Il fallait qu’elle règle les problèmes à leur source, à défaut de pouvoir sauver les pauvres victimes du criminel. Ce serait certainement un travail de longue haleine, mais Mara était suffisamment obstinée et confiante pour réussir. Elle ne songeait pas qu’elle pourrait se perdre dans cette tâche purement altruiste. Elle n’imaginait pas que l’égoïsme n'arrivait jamais loin derrière la générosité.

A présent que Hunting avait sa main soignée, il aurait pu repartir, laisser Mara à son hôpital et lui retourner à ses jardins. Ça aurait été tellement simple, de se lever, de passer à côté d’elle, la pousser si nécessaire et tenter de ne plus penser à elle. Tenter, seulement, parce que la doctoresse ne le lâcherait pas d’une pensée. Il s’était déjà trop attardé sur le cas de la femme médecin et il savait que chaque seconde passée en sa présence dissipait le peu d’indifférence qu’il lui restait encore envers la brunette. Cadwell l’intriguait, comme une bête de foire, comme une curiosité qu’on ne trouve nulle part – et qui pourtant, habitait à moins d’un kilomètre de chez lui. Elle prêchait le bienêtre des autres, l’horreur de ce qu’avait fait Hunting. Ils étaient différents. Il le sentait. Il le vivait, ce précipice qui les écartait tous les deux, d’une manière qu’aucun ennemis naturels ne l’auraient ressentis. Ils n’avaient rien en commun, de parfaits opposés. Si elle sauvait des vies, lui les arrachait. Il n’y avait rien qui aurait pu les obliger à se confronter. Il n’y avait rien qui retenait le jardinier dans cette pièce.

Hunting ne se leva pas, pas plus qu’il ne partit. Il resta là, écoutant le docteur Cadwell precher sur une notion de vengeance qu’elle ne connaissait pas, s’égarant sur l’altruisme. Lui, être altruiste ? Il eut un sourire cruel qui se posa sur ses lèvres en relevant les mots, relevant par la même occasion un regard sombre et parfaitement sadique de par cette lueur mauvaise et amusée qui paraissait dans ses yeux bleus. Il s’humecta les lèvres, tâtant en même temps sa plaie fraichement soignée, ressentant à peine la douleur qui lui lécha la peau. « C’est une bien piètre compensation que vous leur apportez dans ce cas, docteur. » Tous ceux qu’il avait torturés, tués, fait disparaitre, ils ne devaient vouloir qu’une chose : la mort de Hunting. Quelques minutes de souffrance ne suffiraient pas à tarir leur soif de vengeance. C’était presque mignon, que Cadwell s’imagine pouvoir rembourser ces défunts par un acte aussi puéril que celui-ci. Elle ne rendait en aucune cas service à ceux qui croupissaient sous terre –ou ailleurs. Quoiqu’il en soit, elle n’était pas si blanche que ça, si elle ne sourcillait pas une seule seconde à faire souffrir le jeune homme. Hunting garda ce sourire de prédateur, continuant sur sa lancée. « Ce n’est pas de l’altruisme si vous faites souffrir quelqu’un d’autre. » Il continuait de se masser la main, sans le remarquer. « Ou est-ce que vous ne me considérez pas comme un Homme ? » Il aurait pu être prit comme étant taquin, il était malin. Il cherchait à piéger sa proie, à l’acculer dans un coin pour la forcer à reconnaitre ce qu’elle avait fait.

Hunting ne s’attarda pas sur ce besoin qu’il avait, de faire en sorte que Cadwell ait un point de ressemblance avec lui. Ils se savaient parfaitement opposés. Plus tard, quand il repenserait à ce moment, ça ne lui sautera pas plus au visage. Les faits étaient là : il voulait qu’elle reconnaisse que son acte n’était pas un acte qualifiable de bon. Ainsi, s’il ne l’était pas, il était forcément mauvais, dans la vision bidimensionnelle de ce monde. Et si elle était mauvaise, elle se rapprochait de Hunting. Car lui, il ne pourrait jamais être bon. C’était contre sa nature. Le sang ne disparaissait jamais, qu’importent les nettoyages qui seraient apportés. Le sang assombrissait les cœurs & celui du serpent était bien sombre. Pourtant, la doctoresse ne le reconnut pas. Elle retournait à sa belle parole, pour tenter de voir le bien en cet homme perdu qu’il était. Il se frotta un œil, amusé sournoisement par la constatation de la femme médecin. Ta vie d’égoïste et de reclus. Commencerait-elle à voir clair, enfin ? S’il avait voulu se reconvertir, il l’aurait fait depuis longtemps. Hunting se complaisait trop dans sa vie monotone, parfois totalement sanglante, que pour rêver à changer les choses. Il était corrompu jusque la moelle. Et si le sang qui avait coulé aujourd’hui ne lui avait pas rappelé qu’il était rouge, le tueur aurait juré qu’il était devenu noir, depuis.

Hunting haussa un sourcil, ses doigts s’enfonçant sur le rebord du matelas sur lequel il était installé. Tu es peut-être toi-même capable d’état d’âme. Il allait répondre, oui, il avait même commencé à ouvrir la bouche. La main de Cadwell lui fit serrer la mâchoire, une mauvaise impression de déjà vu, alors qu’il lui adressait le regard le plus sombre qu’il possédait, la mettant ainsi, silencieusement, en garde. Mara aurait mieux fait de réfléchir à deux fois, avant de se pencher vers le tortionnaire, pour l’embrasser. Il n’esquissa aucun mouvement, restant de marbre, appuyant sur sa blessure pour ne pas attraper le docteur par la gorge et la serrer, le plus fort possible, jusqu’à lui briser la nuque, ou simplement la priver d’air trop longtemps, pour qu’elle en meurt. Il s’était promis qu’il serait patient, bien que la doctoresse réduise sa patience avec une facilité déconcertante. L’agneau venait-il de montrer ses crocs ? Hunting captura une dernière fois la fragrance de Cadwell avant qu’elle ne recule, faisant revivre les souvenirs de cette fois, où il l’avait étranglé. Il voulait lui faire subir les pires sévices possibles, ceux qui laissaient des traces, qui détruisaient. Effectivement, il n’aurait jamais la paix avec elle.

Hunting se surprit en songeant qu’il ne voulait peut-être pas qu’elle le laisse en paix. Il arrêta de triturer sa blessure, se redressant calmement, alors qu’il se rapprochait de Mara, ne faisant cas de l’attention qu’ils pouvaient attirer. Il tira sur le rideau, fermant le box à la vue des curieux. S’il n’avait cure de ce que les gens pouvaient penser de l’acte intrépide de la chirurgienne, lui avait une couverture à garder. Il devait rester le jardinier taciturne de Storybrooke. La seule personne qui connaissait son secret se révélait être bien assez dérangeante comme ça. Il avait assez d’une bonne sœur qui cherchait à récupérer son âme et la laver de ses péchés, si jamais Hunting en avait possédé une. Une fois le semblant d’intimité assuré, il se planta face à Cadwell, posant sa main sur le haut du cou de la jeune femme, laissant son pouce reposer sur la mâchoire de la brune. « A quoi jouez-vous ? » Il parla bas, bien que la colère aide ses mots à percer la personnalité de Mara. Il était, de toute évidence, particulièrement dérangé par le baiser dont elle l’avait gratifié. Il ne comprenait pas. Il devait être l’un des êtres les plus répugnant de la ville, et pourtant, elle était là, à lui faire preuve d’un acte qui… il n’arrivait pas à l’expliquer.

Hunting n’était pas idiot, il savait qu’il n’y avait aucune tendresse entre eux, il serait incapable d’en ressentir envers elle. Il n’y aurait qu’une obsession sourde à toute raison, qui lui ferait rêver d’une peau pâle tranchée par ses soins. Le baiser lui avait électrisé la nuque et il avait fait un effort pour ne pas s’emporter. Il passa d’ailleurs ses doigts sur ses lèvres, chassant le goût de la jeune femme. Elle l’empoisonnait de l’intérieur. Elle était dangereuse pour lui, parce qu’il s’était appliqué une limite de temps, avant de pouvoir disposer d’elle comme il le désirait. De fait, elle était en quelque sorte intouchable, et elle pouvait bien s’autoriser tout type de comportement, le plus déstabilisant qu’il soit. « Je n’ai pas d’état d’âme. » Sa main glissa jusqu’à l’arrière du crâne de Cadwell, où il saisit la racine de ses cheveux, la tirant en arrière alors qu’il penchait son visage sur elle. Il n’imposa pas la même proximité, la sienne était froide, meurtrière, alors qu’il la faisait reculer par la même occasion, l’entrainant vers lui. « Vous avez de. » Il s’arrêta. C’était encore des menaces. Elles ne servaient plus à rien, il l’avait compris. Et il ne voulait pas lui laisser la chance de rebondir sur un sujet déjà abordé. Il se reprit bien vite, continuant. « Vous ne devriez pas vous intéressez à ce point à moi. Vous savez que je ne suis pas un ange, Mara. Et vous ignorez clairement ce que je suis capable de faire. » Il expira brièvement. « Puisque je ne peux pas vous empêchez de me tourner autour, je suppose que je n’ai plus qu’à vous poursuivre aussi, Mara. A votre avis, au jeu du chat et de la souris, qui gagne ? »

« C’est une bien piètre compensation que vous leur apportez dans ce cas, docteur. » Elle trembla légèrement, mais ne se laissa pas davantage impressionner. La chirurgienne avait de la suite dans les idées. Elle n’aimait pas que Hunting lui rappelle à quel point son acte était minime en comparaison des horreurs qu’avaient pu endurer ses victimes. Mais elle ne pouvait pas les venger davantage, pas de cette façon tout du moins. Mara croyait en la rédemption, et elle préférait voir les victimes du tortionnaire vengés par sa réhabilitation et un changement possible de sa personnalité. Si elle ne pouvait pas ramener à la vie ceux qui avaient enduré ses tourments, elle pouvait toujours faire en sorte que ces horreurs s’arrêtent. « Ce n’est pas de l’altruisme si vous faites souffrir quelqu’un d’autre. » Mara voyait bien ce qu’était en train de tenter le criminel, un sourire désagréable accroché aux lèvres. Mais son esprit restait déterminé. « Ou est-ce que vous ne me considérez pas comme un Homme ? » La chirurgienne arqua un sourcil, mais ne prit pas la peine de répliquer. Elle n’avait pas l’intention d’entrer dans le jeu du psychopathe. Bien sûr qu’elle le considérait comme un Homme, un de la pire espèce cependant. Mais elle estimait faire preuve de suffisamment d’altruisme envers lui en cherchant à sauver son âme. Il ne pouvait pas trop lui en demander.

L’initiative de Mara recouvrit d’un voile sombre le visage d'Hunting. Un frisson lui lécha la colonne vertébrale lorsqu’il se releva et s’approcha pour tirer sèchement sur le rideau. Elle ne recula néanmoins pas, se laissant isoler, prendre au piège, par un homme qui n’avait plus à prouver la noirceur de son esprit. Mara ne bougea pas davantage lorsqu’il cala sa main dans son cou, effleurant sa mâchoire du pouce. « A quoi jouez-vous ? » Sa voix sombre ne parvint pas à déstabiliser Mara, dont le regard se mit à briller. Elle ne s’inquiéta pas de le voir passer les doigts sur sa bouche pour chasser toute trace de leur baiser. Un sourire illumina ses traits, et elle releva légèrement le menton, faisant fi de la main dans son cou. « Je veux t’aider. » Elle plongea son regard au plus profond des prunelles du criminel, les scrutant avec application. « Je n’ai pas d’état d’âme. » La réplique tomba sèchement, mais Mara ne pouvait pas baisser les bras aussi facilement. La prise d’Hunting dans ses cheveux la fit néanmoins ravaler sa salive. Son regard retrouva rapidement celui du tortionnaire qui se penchait au-dessus d’elle. « Vous avez de. » Mara avait conscience de ne pas être en position de force, mais elle trouva dans l’hésitation de l’homme une raison de se battre. La peur ne faisait pas partie de ses pensées aujourd’hui, car elle savait qu’elle n’avait qu’à crier ou à se jeter sur le rideau pour s’extirper des griffes du criminel. Il n’avait pas la même emprise ici qu’il n’avait pu en avoir dans sa propre tanière. Malgré la froideur de son regard, l’implacabilité de ses traits et la férocité de ses gestes, il ne serait jamais en position de force.

Mara se contenta de serrer la mâchoire, rivant un regard féroce sur Hunting tandis qu’il reprenait : « Vous ne devriez pas vous intéressez à ce point à moi. Vous savez que je ne suis pas un ange, Mara. Et vous ignorez clairement ce que je suis capable de faire. » Elle accrochait toujours ses prunelles brunes à celle d’Hunting, et chacun de ses mots trouvaient un écho dans sa conscience. « Puisque je ne peux pas vous empêchez de me tourner autour, je suppose que je n’ai plus qu’à vous poursuivre aussi, Mara. A votre avis, au jeu du chat et de la souris, qui gagne ? » Elle sourit, bien que ses lèvres se raidirent rapidement, tandis qu’elle glissait une main sur celle de son actuel tortionnaire. Elle ne pensait pas pouvoir le faire lâcher prise aussi facilement, mais elle n’avait pas non plus l’intention de se laisser traiter comme une victime toute désignée. Le ton serein, elle se décida à répondre : « Ceci n’est pas un jeu. Il n’y aura pas de gagnant. » Elle soupira de consternation, ne lâchant jamais le regard d’Hunting. « Je suis sûre que ton esprit retors trouvera ça très amusant de me poursuivre, mais ça n’a rien d’un jeu pour moi. » Sa seconde main se posa sur le torse de l’homme, instaurant un contact qu’elle savait qu’il n’apprécierait pas. Le regard plus fin, elle ajouta : « Je sais que tu n’as rien d’un ange, et j’ai compris que tu étais capable de torturer un homme et de le laisser pour mort sans état d’âme. » Elle lia ses doigts à ceux d’Hunting dans ses cheveux, sachant pertinemment qu’il ne tarderait pas à la relâcher pour ne serait-ce que se libérer d’un contact qu’il estimait désagréable. « Mais seras-tu capable de me tuer de la même façon si tu apprends à me connaître ? »

Elle lutta contre l’emprise d’Hunting, rapprochant son visage du sien. Ses yeux survolèrent lentement les traits sévères du criminel, mais elle n’arrivait toujours pas à le craindre. Malgré tout ce qu’elle savait, malgré leur première rencontre et ce qu’il lui avait fait subir, Mara ne pouvait pas s’empêcher de s’accrocher aux signes positifs. Comme elle ne pouvait pas ignorer l’extrême beauté de ses traits, et chercher au fond de ses prunelles bleues et sombres une lueur qu’elle seule pouvait soupçonner. « Je ne veux pas croire que tu pourras me faire du mal sans rien ressentir. » Ses lèvres frôlèrent celles du criminel, une nouvelle fois, mais elle ne put pas aller plus loin, toujours contrainte par la prise qu’il exerçait à l’arrière de son crâne. Elle cessa de forcer, et éloigna son visage. Elle avait conscience que ses paroles pourraient se retourner contre elle. Mais elle ne pouvait pas se résoudre à abandonner tout espoir, alors qu’elle avait de bonnes raisons de croire qu’Hunting n’était pas perdu. Détachant sa paume du torse du tortionnaire, elle concéda dans un dernier souffle : « Il y a de l’espoir pour tout le monde. »

Hunting voulait la tenir en respect, qu’elle n’osa pas prononcer une syllabe de plus, qu’elle soit figée d’effroi. Il n’y arrivait pas. Qu’importe le venin qu’il plaçait dans ses propos, les regards dangereux qu’il lui adressait, Cadwell revenait. Il avait beau la pousser plus loin, elle se rapprochait toujours plus. Il avait beau la repousser plus fort, elle revenait plus vite. Il se dit qu’il aurait été si facile d’en finir avec elle, de lui planter un scalpel dans la gorge et elle tomberait, avant que quiconque ne puisse l’aider. Il lui aurait suffi de faire glisser la lame de l’outil, lui ouvrant la peau, faisant couler le sang ainsi que sa vie. Et tout aurait été fini. Fini cette frustration, fini cette colère, fini cette attraction incompréhensible qui lui battait les tempes. Mara n’avait pas fait que s’infiltrer dans sa vie, elle s’insinuait aussi dans ses pensées, libérant les parties les plus sombres du jardinier, le faisant vivre de cette noirceur, plus fort que ce qu’il n’avait jamais ressentis, plus attirante que jamais. Il voulait lui faire du mal, la faire souffrir, pour qu’elle comprenne de ne plus l’approcher. Sa proximité était un poison pour sa tête, une démangeaison sur sa peau. Il voulait l’écarter, car plus ses doigts se perdant dans ses longs cheveux bruns, plus il la voulait proche d’elle. Il voulait sentir la chaleur de son corps, de ses organes, aussi. Il voulait la serrer, maintenir son cœur –au sens littéral- dans ses doigts et serrer, serrer encore, serrer plus fort, pour qu’elle se meurt devant ses yeux. Il avait envie de la mordre, de lui déchirer la lèvre et de l’avaler.

Hunting jouit de sa prise, de l’expression de la doctoresse. Ça ne dura pas, tandis qu’il lisait dans son regard qu’il ne l’avait pas brisée. Et l’envie surgit, comme toutes les autres, de prendre une batte en fer et de lui briser le dos, à coup de violence et de parjure, lui casser les os un à un, pour se régaler de la musique de la moelle qui cède, des ligaments qui craquent. Il frissonna dangereusement à son sourire, referma sa prise quand elle lui toucha les doigts. Il tira un peu plus en arrière, sentant des cheveux se libérer de la tête de Cadwell. Ca n’a rien d’un jeu pour moi. Aussitôt qu’elle se posa sur son torse, Hunting chassa cette main malvenue, les muscles de sa nuque tendus à l’extrême. Cette fille n’était pas saine d’esprit. Plus il lui offrit du sursis, plus elle devenait néfaste pour le jardinier. Il le sentait en lui, et n’aimait pas ce qu’il sentait. Ça n’était pas un jeu, non. Le tueur ne plaisantait pas, il avait fermement l’intention de tuer Mara, d’une manière ou d’une autre. Le seul impératif était le temps. Il se donnait un mois. Il aurait de quoi faire disparaitre les soupçons, noyer le poisson dans l’eau, éventuellement la noyer elle aussi. Il pourrait récupérer assez d’informations, de même s’amuser avec elle, un peu, avant que son heure ne vienne. Ce n’était très certainement pas un jeu, car actuellement, c’était plus douloureux pour le jardinier. Il aurait tant voulu mettre un terme à tout ceci la semaine passée. Là, ça aurait été un jeu.

Hunting ne bougea pas quand les doigts de la femme médecin se lièrent aux siens. Il était figé, encore, cherchant à éviter tout mouvement, en risque d’en produire un brusque, mortel. La question l’intrigua. Pas pour la réponse, la réponse, il la possédait déjà clairement dans sa tête. Ce qui l’intriguait vraiment, c’était le fait que Cadwell eut songé à cette potentielle fin de sa vie et que pourtant, elle était encore là, confrontant la bête, une lueur si certaine dans son regard. Elle n’avait pas foi envers le jardinier, c’était impossible, comme il était impossible qu’il lui fasse confiance. Elle prétendait vouloir l’aider. Il ne se souvenait pas avoir fait appel à l’aide. Que cherchait-elle vraiment en se présentant comme sainte salvatrice de sa personne ? Une quelconque gloire personnelle ? La satisfaction d’avoir fait quelque chose de bien ? Hunting ne savait pas. Cependant, ce dont il ne doutait pas, c’était que plus les efforts de Mara seraient visibles pour tenter de ramener l’homme sur le droit chemin, plus il plongerait dans les méandres de sa cruauté personnelle. Et à défaut de faire souffrir la brune, attirante, il en torturerait d’autres, se montrant plus sadique avec ses victimes, s’exorcisant ainsi de son impatience et de sa frustration de ne pouvoir passer ses pulsions sur elle. Il le ferait sur les autres. Ainsi, dans la tentative de reconversion, Cadwell serait d’autant plus responsables du malheur des autres. Et ça, il ne se prierait pas pour le lui faire connaitre.

Hunting sourit, effleurant les lèvres de Mara, de sa propre volonté, cette fois, avant de tirer un peu plus sur les cheveux de la femme médecin, la reculant de cette trop grande proximité. Elle se trompait sur toute la ligne, se plongeant dans un déni effarant. « Et il y a du désespoir pour tout le monde. Je me demande à quel point il pourra vous tourmenter. » Lui, en était un expert. Il savait à quel moment l’espoir des hommes se brisait pour se rependre à des sentiments bien tristes et brumeux. Mara voyait le bien partout, à tel point qu’elle ne voyait plus l’obscurité qui pouvait naitre dans un homme. Il lui offrirait un exemple, peut-être quelqu’un, d’encore assez vivant pour lui faire comprendre. Ce fut à son tour de se pencher sur le visage de la doctoresse, imposant cette proximité qui plaisait tant à la jeune femme, vraisemblablement. « Ne pensez pas que je peux m’occuper que de simples inconnus. » Il la tira un peu plus vers lui. « Si j’apprends à vous connaitre, j’apprends vos peurs, Mara. » Il murmurait encore, tandis que ses doigts glissèrent de ses cheveux, jusque sur sa nuque, qu’il serra, empoignant son cou de ses doigts. « Si j’apprends vos peurs, je sais comment vous faire mal, là. » Il tapota la tempe de la jeune femme.

Ses peurs, il les apprendrait, il en créerait, même. Elle ne devait pas avoir peur du sang, mais les serpents n’étaient déjà pas ce qu’elle appréciait le plus. Il devrait miser sur les insectes, aussi et sur quelques drogues. Il n’y avait rien de plus facile, que de manipuler l’esprit humain, quand on savait comment faire. « Mais vous avez raison pour un point. Je ressentirais bien quelque chose, en faisant courir mes instruments sur vous. » Pour appuyer ses dires, son index glissa de la base de son cou, passant entre ses seins, sur son ventre, avant de l’attraper par sa ceinture. « Ce sera une satisfaction énorme. Vous n’avez pas idée à quel point j’ai envie de vous tuer. » La confession tomba. Et c’était une promesse. Il aurait sa peau. D’une manière ou d’une autre. Ce n’était qu’une question de temps. En attendant, il aurait de quoi préparer Mara du mieux qu’il le pouvait.

La chirurgienne ne mentait pas. Pour elle, il ne s’agissait pas d’un jeu. Mais ce dans quoi elle se lançait était dangereux, et sans doute aurait-elle du y réfléchir à deux fois avant de parler de sa propre mort, et de tenter un criminel. Mara n’était pas complètement stupide, mais elle était sans doute trop naïve, et elle croyait qu’Hunting pouvait se départir de sa haine du genre humain. Elle ne voyait pas la situation du tortionnaire comme un fait arrêté. Les choses pouvaient évoluer, si quelqu’un avait l’audace de tendre la main à cette âme égarée. Mara restait persuadée qu’elle pouvait parvenir à ses fins. Jusque-là, le tortionnaire l’avait à peine touché. Le seul mal qu’il avait pu lui faire était de l’avoir privé d’oxygène jusqu’à ce qu’elle perde connaissance, et encore n’était-ce que dans le but qu’elle le laisse en paix. S’il avait réellement été un tueur sans foi ni loi, il n’aurait pas hésité avant de lui ôter la vie et de balancer son cadavre. Mara avait certes réussi à couvrir ses arrières, ce qui pouvait expliquer que l’homme l’ait laissé en vie. Mais il aurait pu se contenter de ça, et la tourmenter par ailleurs. Or Mara n’avait pas eu à se plaindre de sévices ou de harcèlements morbides par la suite. Hunting n’était donc pas un cas désespéré. Il s’était simplement enfoncé sur un chemin duquel peu revenait indemne. Mais la chirurgienne s’évertuait à le ramener sain et sauf sur le droit chemin, tout comme il l’avait ramené saine et sauve chez elle, le soir où ils s’étaient rencontrés.

Après ses derniers mots, Hunting finit par sourire, et il rapprocha à son tour leurs visages, ses lèvres frôlant celles de la chirurgienne, qui sentit poindre un soupçon de victoire à travers cet acte. Mais elle ne put pas se réjouir longtemps, l’homme raffermissant sa prise dans ses cheveux, tirant sur ceux-ci pour l’éloigner à nouveau. « Et il y a du désespoir pour tout le monde. Je me demande à quel point il pourra vous tourmenter. » Elle grimaça légèrement et fronça les sourcils, ne lâchant pas des yeux le criminel. Il se pencha au plus près d’elle, et elle resta interdite, ne cherchant plus à donner un sens au moindre de ses mouvements. « Ne pensez pas que je peux m’occuper que de simples inconnus. Si j’apprends à vous connaitre, j’apprends vos peurs, Mara. » Elle frissonna à cette constatation lâchée dans un murmure, tandis que les doigts d’Hunting délaissèrent ses cheveux pour contraindre sa nuque et son cou dans sa globalité. « Si j’apprends vos peurs, je sais comment vous faire mal, là. » Mara plissa légèrement les yeux, alors que l’homme effleura sa tempe. Elle réalisa alors la précarité de sa situation. Si elle avait toute confiance en sa sécurité sur l’instant, elle ne pouvait plus être aussi sûre en ce qui concernait l’avenir. Hunting mettrait-il ses menaces à exécution ou cherchait-il simplement à lui faire peur ? Mara ne pouvait pas entrer dans sa tête, et donc elle ignorait s’il était sérieux ou non. Elle pensait simplement que, tout monstre qu’il était, il avait sans doute mieux à faire que de s’occuper du sort d’une chirurgienne trop curieuse. Elle s’accrochait à cette idée, cet espoir, puisque cela semblait devoir être son leitmotiv en ce qui concernait ses rapports avec Hunting.

« Mais vous avez raison pour un point. Je ressentirais bien quelque chose, en faisant courir mes instruments sur vous. » Elle arqua un sourcil, mais eut du mal à ne pas frémir lorsque le doigt du tortionnaire glissa contre sa gorge, puis descendit le long de son buste, pour finalement lui laisser l’opportunité de l’attraper férocement. « Ce sera une satisfaction énorme. Vous n’avez pas idée à quel point j’ai envie de vous tuer. » Désormais libre de bouger complètement la tête, Mara n’en resta pas moins droite et immobile. Son regard tomba, sec, dans celui d’Hunting, et elle cracha avec vélocité : « Non, je n’ai pas idée. » Elle souffla, tentant de rassembler ses idées pour donner plus de poids à ses mots. « Ce n’est pas exactement ainsi que je conçois mon aide. » Plaquant ses deux mains contre le torse du criminel, elle le repoussa rageusement, instaurant à nouveau une distance raisonnable entre eux. Étonnée par son agressivité soudaine et le besoin de l’éloigner, Mara ne voulait pas songer aux motivations de son geste. La chirurgienne ne pouvait pas admettre la nature non équivoque du frisson qui lui avait léché l’échine, ni la morsure des mots d’Hunting.

« D’où te vient cette envie malsaine ? » Elle gardait toujours ses distances, mais son visage s’était radoucit, comme le ton de sa voix. Pour aider Hunting, avec ou sans son consentement, elle devait chercher à en savoir plus. Elle doutait cependant qu’il ne se montre conciliant. La prudence au coin des lèvres, elle releva le menton et planta un regard interrogateur dans le fond des prunelles bleues du criminel. « Comment arrives-tu à sévir impunément à Storybrooke ? » Elle ne laissa s’écouler que quelques secondes d’un silence sombre, avant d’ajouter : « Comment puis-je être la première à avoir découvert ta vraie nature alors que… » Elle réfléchissait tout en parlant, et alors l’horreur de la situation la transperça. Son dos lui fit mal alors qu’elle se crispait subitement. Une lueur effrayée passa au fond de ses yeux bruns, et elle murmura : « Tu as des complices, n’est-ce pas ? » Lui poser la question de but en blanc n’était pas l’impulsion la plus sensée qu’elle ait eu aujourd’hui, mais elle semblait condamnée à enchainer les maladresses en ce qui le concernait.

La curiosité de Mara finirait sans doute par la perdre. Mais elle ne pouvait pas s’empêcher de parler. Elle n’arrivait pas à se méfier autant d’Hunting qu’il l’aurait mérité. A mesure que les secondes s’écoulaient, elle ressentait de manière plus pressante l’envie de sortir le criminel de son quotidien sanglant. Ce n’était pas uniquement pour ses victimes potentielles, c’était plus profond, et plus diffus à la fois. Son regard s’était perdu sur un point indistinct et, l’esprit ailleurs, elle murmura : « Tu ne me feras pas de mal. »

Hunting l’avait dit, énonçant ainsi cette vérité déchirante qui lui hantait le corps. Mara, dans l’élément dérangeant que présentait sa personne – il ne perdait pas de vue qu’elle pouvait toujours aller prévenir les autorités, même si celle-ci ne croiseraient certainement pas la femme médecin – elle n’était plus simplement une menace des apparences et de sa liberté, Cadwell devenait aussi une menace pour l’équilibre mental qu’il avait su instaurer chez lui. Plus rien ne lui semblait suffisant, ne laissant qu’un goût de dépit dans sa gorge. Trancher la peau d’une victime ne le ferait plus autant vibrer, effrayé les enfants ne l’amusait plus autant, même se trancher la main ne lui tirait plus la même réaction que celle qu’il était accoutumé à émettre. La doctoresse occupait trop ses pensées. Il devait impérativement trouver une solution pour se débarrasser d’elle. Quoique, la solution avait déjà été trouvée, cependant, Hunting se révélait manquer cruellement de patience quand cela touchait à des sujets dans lesquels il se trouvait irrémédiablement attirer. Hunting avait beau la menacer, il voulait plus. Il lui promettait des peurs, qu’il voulait lui faire vivre. Il lui promettait des douleurs, qu’il voulait lui faire subir. Il lui promettait une mort, qu’il voulait violente au possible. Les mots, avec Cadwell, n’étaient pas suffisants. Il avait ce besoin, vénal, de la tourmenter. Ainsi, plus elle sombrerait, plus lui s’élèverait dans les méandres de l’extase. Il voulait la fin du docteur, il l’aurait.

Hunting sourit, dévoilant ses crocs, quand elle le repoussa, faisant peu de cas de sa parole. Il avait compris. Qu’importe ce qu’il dise, Mara Cadwell resterait sur ses positions droites et vertueuses. A tel point que ça en deviendrait presque ennuyeux. Elle devait franchir le pas, sortir de ses sentiers battus. Et Hunting, lentement, y arrivait. Tout comme elle lui avait recousu la main sans anesthésie, se trouvant une bien pauvre excuse, quand elle le repoussa, il y eut ce même sursaut, d’acte non justifié, mais qui pourtant était là. Si la femme médecin n’avait pas un mauvais fond, Hunting créerait l’espace dans son cœur –cette fois-ci, au sens non littéral, bien que le faire physiquement, créer un trou dans sa chair soit une idée des plus charmantes – et il y placerait le germe du vice. Hunting la ferait sombrer. Elle n’en tomberait que plus facilement dans ses bras et il ne lui suffira plus qu’à se baisser pour la tuer. Oui. Il serrerait ses doigts sur sa gorge, lui arracherait la peau, les membres, boirait son sang, s’exalterait de ce jubilé morbide. Mara était la proie, il planterait ses crocs dans son cou, lui volerait le souffle de sa vie, lui volerait tout, aussi.

Hunting eu une grimace. D’où te vient cette envie malsaine ? Voilà, elle était à nouveau ennuyante, retournant dans son interrogation qui n’avait pas de sens, car il n’y avait pas de réponse. Pas de réponse que Cadwell pouvait concevoir. Elle était tellement révulsé à l’idée qu’il puisse rêver de la tuer, et pourtant, elle revenait, laissant son intellect surpassé l’instinct. Ils fonctionnaient dans les opposés parfaits. Il observa l’écart qu’elle cherchait à mettre entre eux et, automatiquement, pour l’oppresser, encore, s’approcha d’un pas et d’un deuxième. Maintenant, il lui suffirait de tendre la main pour la toucher, ce qu’il ferait, assurément. A nouveau, elle se perdait dans un fruit de réflexion qui n’intéressait plus le tortionnaire, qui se contenta de l’observer intensément, les muscles bandés par cette envie cruelle de la faire souffrir. Il la voulait mourante entre ses bras. A la place, elle mettait le doigt sue ce qu’elle n’aurait pas dû relever, qu’elle aurait dû taire. des complices. Bien évidemment qu’il en avait. Cependant, il ne devait pas la conforter dans cette idée. Il ne devait rien faire. Il se fit même violence pour ne pas la saisir par la gorge et la soulever du sol, pour la tuer, sur le coup, évitant ainsi qu’elle ne continue son enquête mentale plus loin.

Hunting n’était qu’un outil. Bien évidement. Il ne tuait pas impunément, par simple plaisir, prenant une victime dans la foule ennuyeuse de la ville. Il se serait fait attraper depuis bien longtemps s’il suivait ses pulsions. Il travaillait pour le maire. Il en avait même fait vaguement allusion, lors de leur première rencontre, mais Mara n’avait pas relevé et le début de piste avait été oublié. Le jardinier se contenta de sourire, perfide, s’approchant une nouvelle fois de Cadwell, posant sa main sur l’épaule de Mara. Il ne dirait rien, pas plus qu’elle ne découvrirait qui étaient ses complices. Et, une fois encore, la brune se réconforta dans une idée qui n’avait aucun fondement, mais qui pourtant, s’avérerait être juste aujourd’hui. Non, il ne lui ferait aucun mal, même si, à chaque seconde, il trouvait une nouvelle façon de la faire souffrir un peu plus, dans sa tête. Il s’imaginait l’attacher, la retourner, la bruler, la briser, la transpercer… Dans un mois, il n’aurait plus que l’embarras du choix. En attendant, il se devait d’être patient. En attendant, il se devait d’être sage. Dommage qu’il n’ait jamais été très doué pour ça. « Vous avez raison. Pas aujourd’hui. Ni demain. » Sa main remonta le cou de Cadwell, lui attrapant le menton, alors qu’il l’attirait jusqu’à lui. A nouveau, il parlait relativement bas, ses paroles n’étant audibles qu’aux oreilles de la doctoresse. « Soyez tranquille pour ces deux jours. » Il espérait qu’elle le prenne pour du bluff. Hunting commençait déjà la chasse, instaurant une pression, un potentiel de crainte. L’imagination des victimes fonctionnait toujours très bien. Il était curieux de voir les cauchemars que pourrait faire Mara.

Ses doigts glissèrent jusqu’à la blouse blanche de la jeune femme, l’attirant plus facilement, lui empêchant de filer comme elle pourrait le souhaiter. « Après, vous découvrirez que je suis parfaitement capable de vous faire du mal. Vous savez ce que l’on dit sur l’observation participante. » Son regard se perdit dans les yeux de Cadwell, brillant par ce même éclat indomptable et diabolique. « J’espère que ça ne vous enlèvera pas le goût de votre prétendue curiosité scientifique. » Il se détacha de Cadwell, faisant quelques pas en arrière, gardant cette contenance impeccable, cette expression indéchiffrable. « D’ici là, dormez sur vos deux oreilles. Je sais ce qui vous attend. Mais vous, le savez-vous ? » Hunting récupéra ses affaires et les documents nécessaires. « Encore merci pour le soin, docteur. Je vais avoir grandement besoin de ma main… » Et le funeste ne devait pas échapper à Cadwell. Hunting tira sur le rideau, s’en alla.

Hunting n’avait rien d’ordinaire. D’aussi loin qu’elle s’en souvienne, Mara n’avait jamais eu ce type de conversation, de « rapports », avec quiconque. Avec la plupart des gens, elle se contentait de discussions plates, qui valaient essentiellement pour le réconfort qu’elles pouvaient apporter à autrui. Mais avec le criminel, ça n’avait rien à voir. Mara ne s’obstinait pas pour le sport ou pour le plaisir d’une joute verbale. Si elle manquait parfois de recul dans ses propos, elle pesait néanmoins chacun de ses mots, car tout avait de l’importance en ce qui le concernait. Ce n’était pas qu’une simple œuvre de charité. La chirurgienne sentait que le lien entre eux était plus profond qu’elle ne pouvait le dire, sans pour autant pouvoir l’expliquer. Elle se sentait désormais irrésistiblement tenue de lui venir en aide. Elle avait instauré un certain écart entre eux, car elle souhaitait avoir les idées claires pour s’exprimer et, que d’une façon ou d’une autre, c’était impossible avec Hunting qui la frôlait. Mais il ne semblait pas décidé à lui faciliter la tâche. A peine eut-elle reculée qu’il fit un pas, puis deux, comblant presque intégralement la distance qui les séparait. Elle tâcha néanmoins de ne pas s’y arrêter, et poursuivit son raisonnement, finissant par murmurer une vérité à laquelle elle s’accrochait désespérément.

La main du tortionnaire sur son épaule attira son attention. Ses prunelles brunes revinrent accrocher les siennes, et elle tressaillit en réalisant qu’il était à nouveau bien trop près. Mara avait à peine réalisé son déplacement, perdue dans ses pensées, mais déterminée à contrecarrer les plans sadiques d’Hunting. Son sourire lui apparut redoutable, et elle resta un instant muette, le visage figé. « Vous avez raison. Pas aujourd’hui. Ni demain. » Il lui donnait raison, mais Mara sentait assez bien dans ses mots et à son ton, que ça n’avait rien d’une victoire pour elle. Les doigts du criminel serrèrent son menton, et il tira pour la rapprocher de lui. Le regard de la chirurgienne reprit du mordant, bien qu’elle ne répliqua pas. « Soyez tranquille pour ces deux jours. » Sa voix basse et sombre n’avait rien pour la mettre en confiance. Mara comprenait très bien à quoi il jouait. Car contrairement à elle, il continuait à penser que tout ceci n’était qu’un jeu. Mais elle était plus que disposée à lui prouver son erreur. Elle s’apprêtait à réagir, mais la main du criminel s’accrocha à sa blouse, la retenant décidément à une distance de plus en plus réduite. Si à peine quelques minutes plus tôt, Mara était celle qui avait cherché à instiguer ce rapprochement, afin de troubler le psychopathe, elle détestait désormais sa proximité.

« Après, vous découvrirez que je suis parfaitement capable de vous faire du mal. Vous savez ce que l’on dit sur l’observation participante. » Elle n’aimait ni ses paroles ni son regard, mais elle demeura bien droite, soutenant les yeux d’un obscur céruléen. « J’espère que ça ne vous enlèvera pas le goût de votre prétendue curiosité scientifique. » Il la lâcha enfin, et se recula de quelques pas, Mara ne laissa pas son soulagement filtrer de son attitude. Elle n’aimait pas la tournure que prenait la conversation, mais pouvait-elle réellement s’attendre à autre chose de la part d’un tel criminel de bas étage ? Elle serra les dents et ses lèvres se crispèrent. « D’ici là, dormez sur vos deux oreilles. Je sais ce qui vous attend. Mais vous, le savez-vous ? » Il récupérait déjà ses affaires, alors que Mara encaissait péniblement ses menaces. Ne lui avait-elle pas déjà dit d’arrêter ? « Encore merci pour le soin, docteur. Je vais avoir grandement besoin de ma main… » Il fit volteface et ouvrit le rideau aussi sèchement qu’il l’avait tiré précédemment. Les pensées de Mara ne s’éparpillèrent pas longtemps, et elle fit un pas précipité à la suite du tortionnaire pour attraper fermement son avant-bras. Son visage était fermé, lorsqu’elle souffla : « Je n’ai pas peur de toi, Hunting. » Elle aurait dû, et sans doute une parcelle de sa conscience était-elle suffisamment prudente pour nourrir une peur sourde envers le criminel, mais Mara était loin d’assumer cette partie-là d’elle-même. Tout comme elle n’assumait pas celle qui l’incita à tirer sur le bras d’Hunting pour le forcer à se retourner, et l’attira par là même plus proche d’elle qu’elle ne l’avait prévu.

Paradoxalement déterminés et incertains, les yeux de la chirurgienne se plantèrent dans ceux de celui qui était encore son patient. « Je t’ai dit d’arrêter avec les menaces la dernière fois. Pourquoi est-ce que tu t’acharnes à vouloir jouer avec moi ? » Un sourire sans joie s’immisça sur ses lèvres. « Je suis d’une intégrité sans limite, je te promet que ça sera réellement ennuyant. » Ses doigts glissèrent de l’avant-bras de l’homme, pour se caler dans sa main. Elle se contenta de la presser distraitement, sans instiguer le moindre rapprochement supplémentaire. « Je comprends ce que tu essayes de faire. Tu veux me faire peur afin que je te laisse en paix. C’est un mécanisme d’auto-défense très naturel … » Sa seconde main effleura la joue d’Hunting, avant qu’elle ne se risque à la poser complètement, faisant parfaitement fi des regards qui pouvaient les surprendre. « Tu te sens en danger, alors tu attaques avant de me laisser la possibilité de faire des dégâts. » Son regard était imprégné de douceur. La notion de peur et de danger était loin en ce qui la concernait. Elle avait le sentiment d’être en train de mettre le doigt sur un élément capital. Elle retira sa main de la joue d’Hunting, et pressa sur la sienne pour le décaler, refermant dans le même temps le rideau. Elle ne le laisserait pas fuir aussi simplement. Rompant tout contact avec le criminel, elle se tourna parfaitement vers lui, et plongea son regard dans le sien. « Je ne te laisserais pas fuir. » Le coin de ses lèvres s’étira tandis que ses sourcils se haussèrent, et qu’elle captura avec plus de fermeté encore le regard d’Hunting. « Tu pourras me menacer autant que tu veux, et me faire mal, je ne te lâcherais pas. » Elle baissa un instant la tête, offrant un répit aux prunelles pleines de vices du tortionnaire. Lorsqu’elle releva le menton, ce fut pour ajouter avec une simplicité qui l’étonna presque : « Je n’ai pas peur de ce que tu pourras me faire subir en échange de mes soins. »