La journée dans la boutique avait été particulièrement longue pour Mr.Gold. Seulement deux clients étaient venus, en tout et pour tout. Un dans la matinée, qui cherchait désespérément à récupérer un objet que son ex-femme avait donné à la boutique et un autre, en début d'après-midi, qui se débarrassait d'affaires dont-il n'avait plus besoin. Chaque objet avait une signification spécifique, mais seul Gold s'en rendait compte. Certains habitants étaient attachés à des objets sans même savoir pourquoi et venait régulièrement les acheter dans la boutique, en repartant avec une sensation de déjà-vu, dans la plupart des cas. Et comme à chacune de ses visites pour réparer des objets cassés, Marco portait un regard attentif aux poupées que Gold avait exposé sur un de ses comptoirs. Dans le monde des contes, il s'agissait de ses parents, mais ici, ces poupées n'étaient rien d'autres que des objets pour le vieil homme. Gold était toujours amusé de voir la réaction des habitants lorsqu'ils pénétraient sa boutique et qu'ils s'attardaient sur un ou des objets en particulier. La malédiction était puissante, ça oui. Pourtant, lorsqu'un habitant faisait face à son ancienne vie sans le savoir, une pensée irrationnelle leur venait à l'esprit, les rattachant étrangement à un objet, le plus superficiel qui soit.

Vers la fin de l'après-midi, Gold nettoya quelques armes qu'il avait exposé dans une de ses vitrines. Une fois que ce fut terminé, il passa à l'arrière-boutique pour regarder son nouvel inventaire. Il plongea la main dans un carton qu'un client lui avait confié dans la journée et observa chacun des objets avec intérêt. Apparemment, cette personne n'avait aucune importance dans le monde des contes. Mais qu'importe, Gold comptait bien garder ces objets et les exposerait en temps voulu.
En notant quelques références sur son carnet d'objets à mettre en vente, Gold entendit la clochette de la porte d'entrée de la boutique tinter. Il ne se pressa pas pour aller voir et continuait à écrire comme si de rien était. Le client pouvait attendre. Ce que Gold ne savait pas, c'est que ce client n'en était pas vraiment un et que s'il ne sortait pas immédiatement de son arrière-boutique, il pourrait faire s'impatienter la personne qui se trouvait de l'autre coté. Sans plus tarder, la voix de Regina emplit toute la pièce. Gold eut un sourire alors qu'il posait son carnet. S'il s'était attendu à cette visite...

En sortant de l'arrière-boutique, Gold, appuyé sur sa canne, pointant son regard vers Regina. « Madame Mills, bonjour », lança Gold d'un ton courtois, en appuyant bien sur la formule de politesse que le Maire semblait avoir oublié. « Quel plaisir de vous voir ici. Vous avez besoin de quelque chose ? » Demanda le prêteur sur gage en se rendant jusqu'à un tiroir, derrière le comptoir, pour ranger quelques paperasses.

Henry. Le fils de Regina Mills et par extension, celui d'Emma Swan, qui se trouvait être la mère biologique. Depuis l'arrivée de celle-ci, Mr.Gold lui portait un intérêt tout particulier. Elle était même devenue son pantin préféré. Emma Swan ne s'en doutait pas tout le temps, mais le prêteur sur gage faisait toujours en sorte que les évènements aillent dans son sens. C'était d'ailleurs grâce à lui que la jeune femme était devenu le shérif de la ville. Et si Henry était allé la retrouvé, ce n'était pas non plus le fruit du hasard. Mr.Gold savait exactement ce qu'il faisait et avait un but précis. Alors, lorsque Regina lui annonça être à la recherche de son fils, le prêteur sur gage braqua un regard neutre sur elle. Cette simple information n'indiquait pas vraiment pourquoi le maire se retrouvait ici, dans sa boutique. Henry venait rarement par ici et Regina devait certainement le savoir.

Gold continua donc à ranger ses papiers, les oreilles attentivement mais le regard occupé. Il ne s'inquiétait pas pour Regina. Si elle avait encore à dire, elle le ferait sans tarder. Ce n'était pas le genre de femme à se faire discrète pour ces histoires là. Le maire reprit donc la parole, qui eut l'effet de faire sourire Gold. Il leva alors les yeux en fermant d'un coup sec son tiroir. « Possible... » Les deux mains appuyées contre le comptoir, la canne contre le mur non loin de lui, Gold avait le regard rivé sur Regina. Il ne craignait pas de la regarder dans les yeux, aussi longtemps que possible. Certains n'oseraient pas agir ainsi, mais Gold n'était pas comme tout le monde. Il ne donna aucune information supplémentaire à Regina, la faisant patienter, jouant avec elle et son humeur. Gold n'était pas réputé pour être la personne la plus sociable de la ville et le maire était de loin un de ses pantins préféré. Il voulait la faire languir...

La reine s'énervait. Bien. Gold n'effaça pas son sourire. Il aimait lorsque la colère de Regina montait crescendo, que ses émotions l'envahissaient, la rendant si caractérielle. C'est ce qui avait amené la malédiction. Sans cette rage intérieure, Gold et tous les autres habitants de la ville n'auraient pas été amenés ici. Jamais le ténébreux n'aurait eu de chance de retrouver le monde sans magie où se trouvait son fils. Le prêteur sur gage avait réussi à fixer son regard dans celui de madame le maire et pouvait y voir les émotions qui animaient son âme. « Je ne suis pas devenu gâteux. Je sais très bien qui vous êtes... », répondit-il en laissant sa phrase en suspend, par pur plaisir. Gold aimait jouer avec Regina. Il aimait lui faire croire qu'il voulait parler de son identité dans le monde des contes, alors qu'il n'oserait jamais le lui en faire part aussi vite. « Vous êtes le Maire et je ne suis...que le propriétaire de la ville, après tout. »

Gold rangea de nouveau des feuilles qui traînaient en dessous du comptoir, dans un compartiment qui servait à placer ce qui était à trier. Regina voulait savoir où se trouvait Henry et continuait de le demander, encore et encore, jusqu'à ce que Gold se décide à délier sa langue pour lui donner cette information cruciale. Assez joué. Gold leva les yeux vers le Maire, puis les leva au ciel et fit mine de réfléchir. « Il doit certainement se trouver avec celle qu'il nous a ramené ici. Emma. » Il souriait, provocateur. « Vous venez vous-même de le dire tout à l'heure. Mais non, je ne l'ai pas vu durant ces dernières heures. » Et il ferma à nouveau son tiroir, en ayant réellement terminé avec son petit inventaire de papiers. « Je vous suggère donc de demander à d'autres habitants de la ville. Emma Swan n'est pas franchement adepte de ma petite boutique. Êtes-vous réellement venu pour vous renseigner sur Henry ou voulez-vous d'autres informations ? » Gold doutait que Regina avait fait tout se chemin pour retrouver son fils. Mais qui sait, était-ce peut-être le cas après tout.

Venue simplement pour Henry ? Bien. Gold pouvait le concevoir, mais que faisait-elle encore ici ? Le prêteur sur gage préféra donc s'occuper de sa boutique, comme si Regina n'était pas là. Après tout, pourquoi y prêterait-il attention ? Elle était planté là, dans sa boutique et voyait bien que Henry n'était pas là, que Gold ne savait rien.
Pensant qu'elle allait partir, Gold lui tourna le dos pour changer deux objets de place. La lampe magique, que Regina devait déjà avoir vu dans une autre vie, puis une toute petite babiole sans importance. Il épousseta ses articles lorsque madame le maire reprit la parole. Gold quitta doucement la lampe qu'il avait entre les mains, puis le chiffon à poussière. Il ne se tourna pas mais ses oreilles étaient très attentives aux paroles de Regina. Les doigts de Gold se crispèrent contre le comptoir, son visage changea de couleur. Comment osait-elle parler de la sorte ?! Une rage commençait à envahir Gold de l'intérieur. Il devait se contenir, oublier sa colère. C'était difficile, très difficile, mais il fallait tenir bon.

Pourquoi mettait-elle le sujet du fils sur le tapis ? Mr.Gold avait perdu Bae et il n'avait pas besoin d'entendre toutes ces paroles empoisonnées. Son regard, remplis de tristesse, ne quittait pas le comptoir. Il revoyait dans son esprit le visage de Bae, emporté par le haricot magique, dans une lumière éblouissante et verte. Puis, plus rien. Rumplestiltskin avait même l'impression d'entendre les cris de son enfant dans sa tête. C'était insupportable. Gold resta de dos, ne voulant pas croiser le regard de la sorcière lorsqu'il s'exprimerait. « Je vous demande de sortir. » Puis, il se tourna, le regard sombre, un visage grave. « S'il vous plaît », conclu t-il en appuyant bien sur ces derniers mots. Ce n'était pas la première fois qu'il usait de cette formule de politesse pour faire taire le Maire. Avant que la malédiction ne soit lancée, il avait conclu une petite affaire avec elle. Dans le nouveau monde, Rumplestiltskin pouvait lui demandait ce qu'il voulait et Regina devait lui obéir... à condition qu'il lui dise "s'il vous plait". Gold avait dû y avoir recourt lorsque Emma Swan était arrivée en ville alors que le maire désirait obtenir des informations auprès de lui. Puis, aujourd'hui, pour les mêmes raisons. Gold en avait assez, cette fois-ci.