Introduction Époque du sujet : actuelle Date du sujet : 23 decembre Ordre de passage des participants : sheri - grace

Sheri resserra l’écharpe noire autour de son coup, plongeant son nez à l’intérieur de la fabrique en laine pour lutter contre le froid. Y avait pas à dire, depuis qu’elle découvrait les joies de Storybrooke et de pouvoir suivre toutes ces histoires d’amour d’une distance raisonnable, son ancienne tanière ne lui manquait qu’à moitié. Quand bien même à ce moment elle regrettait le confort de sa demeure centenaire. L’entremetteuse estimait que suivre l’évolution d’une belle histoire méritait bien qu’elle se gelât les fesses une petite heure ou deux.

Sheri était occupée à suivre un possible couple, qui n’était pas très doué avec les sentiments, avouons-le. Ce qui désespérait au plus haut point la noiraude. C’était bien dommage qu’elle ne puisse pas se pointer devant la paire d’individu, leur foutre le carnet sous le nez en disant qu’ils étaient faits l’un pour l’autre, puisque c’était écrit sur ces feuilles et qu’ils ne leur restaient plus qu’à se rouler un patin magistral. Eh non, l’amour était complexe et que trop rarement évidente. Alors, Sheri était là, à marmonner dans sa barbe envers les incapables qu’elle suivait.

Elle était tellement prise dans ses réflexions à la limite du morose, qu’elle ne vit que trop tard la petite fille dans laquelle elle rentra. Qu’elle fit tomber. Aussitôt, Sheri s’arrêta de poursuivre en prédateur des mauvais jours, son couple, pour se tourner vers l’enfant. « Oh. » C’était Grace. De fait, elle se sentit encore plus désolée d’avoir faire tomber l’enfant. Elle se pencha vers la petite, une expression désolée sur le visage. « Je ne t’avais pas vu. Je suis désolée. Tu ne t’es pas faite mal ? » Ses paroles étaient un peu hâtives - elle avait un couple à suivre, pardi ! – ce qui ne l’empêcha pas de relever Grace pour la remettre sur ses deux pieds.

Une idée surgit dans son esprit, en pleine réflexion. Cela pouvait marcher, Grace avait déjà prouvé sa valeur à plusieurs reprises, petite fille curieuse des mystères de l’amour. Un allier ne serait pas de trop dans cette quête qui ne manquait pas de désespérer Sheri. Ainsi, elle se pencha à nouveau vers Grace, passant un bras autour de son épaule, jouant de la confidence que l’Entremetteuse partageait avec elle. « Mais tu tombes bien. J’aurais une mission pour toi. Est-ce que ça te tente ? » Sheri lui adressa un clin d’œil joueur, ne songeant pas un instant à ce que la petite ait des occupations bien à elle, comme aller à l’école ou retourner voir son père. Car, Sheri, après tout, n’avait jamais connu ce genre d’obligation. Elle ne pouvait donc même pas y songer.

D’autant plus que ce couple avait vraiment besoin de se faire secouer les puces…

Il n'y avait pas à dire, la journée était froide : l'hiver était bien installé à Storybrooke. Equipée de bottines, d'une robe en laine enfilée par dessus de gros collants, d'un blouson, d'une longue écharpe et de gants épais, Grace ressemblait plus à une boule de vêtements qu'à une petite fille. Mais elle se fichait bien de quoi elle pouvait avoir l'air. Le fait est qu'elle ne voulait absolument pas tomber malade et que son Papa lui aurait probablement interdit de sortir en étant moins couverte que ça. Et dire qu'elle n'avait presque plus le temps de parcourir Storybrooke et ses bois depuis le lever de la malédiction... Même si la vie de la petite Paige avait été marquée par une impressionnante sociabilité, elle réussissait toujours à se libérer du temps pour profiter des bienfaits de la solitude et mettre de l'ordre dans ses pensées. C'était surement quelque chose qui lui était restée de son passé dans le Monde des Contes où elle et son père vivaient, loin de tous villages, des champignons qu'ils cueillaient dans les bois. Toujours est-il qu'elle avait décidé de remédier à cela et se retrouvait maintenant seule dans le froid, à parcourir les trottoirs de la petite ville du Maine. Et elle profitait du calme de cette promenade pour voir à quel point elle avait de la chance dans sa vie : sans la malédiction elle n'aurait sans doute jamais retrouver son Papa. Bon, certes, la responsable était aussi celle qui lui avait enlevé sa seule famille en premier lieu. Seulement il fallait savoir savourer les petites victoires.

Perdue dans ses pensées, elle ne vit pas arriver la jeune femme avant qu'elle ne lui rentre dedans. Grace tomba en arrière, bénissant la masse de tissu qu'elle portait pour avoir amorti le choc avec le bitume. De toute évidence la petite fille n'était pas la seule à être absorbée par ses idées. « Je ne t’avais pas vu. Je suis désolée. Tu ne t’es pas faite mal ? » Surprise par la vitesse à laquelle les excuses de mise avaient franchis les lèvres de la jeune femme, elle répondit tout en se relevant et en époussetant sa jupe. « Pas de mal, j'aurais du faire plus attention. Mais heureusement je suis plus solide que ça. » Heureusement oui. Elle ne savait vraiment pas comment son père aurait réagi si elle s'était blessée ; si c'était possible, il était encore plus protecteur envers elle qu'avant. Pas que ça la dérange réellement, seulement elle avait été habituée à une certaine indépendance pendant la malédiction. Mais chassant ses pensées de sa tête, elle releva le visage pour croiser le regard de celle qui venait de la bousculer. Et quelle surprise que de reconnaître Sheri ! Que faisait donc la rédactrice des grands amours dans la rue ? Cette dernière, exactement comme si elle lisait dans l'esprit de Grace, ne lui laissa pas le temps de poser la question avant de lui proposer une mission. Ni une ni deux, la curiosité et l'optimisme naturels de l'enfant s'affichèrent dans un grand sourire. Quelle meilleure occupation que de jouer aux cupidons en herbe ? Car connaissant la jeune femme, c'était sans aucun doute de ça dont il était question. « Toujours prête, chef ! Quelle est la cible ? On a un plan d'action ? » La gamine était à deux doigts de trépigner d'impatience tant la simple idée de donner un coup de main à un couple l'enthousiasmait. Autant pour une promenade en solitaire... Il y avait bien mieux à faire dans la vie !

Sheri avait toujours douté d’avoir la fibre maternelle. Ce n’était pas parce qu’elle avait mis au monde deux enfants qu’elle était faite pour être mère. Loin de là. Elle n’avait jamais vu ses fils après l’accouchement et, à cette époque, elle avait la tête beaucoup trop occupée par un certaine Prince Peace pour se soucier de l’avenir de ses bâtards. Sheri, à cette époque, était trop jeune pour être une mère, quand bien même la société se serait attendue à un semblant d’inquiétude pour eux. Elle avait, par le passé, songé à de nombreuses reprises à se descendance, avant de se rendre compte qu’elle n’aurait jamais la joie de connaitre ses enfants. Le deuil était fait.

Alors, quand l’entremetteuse avait l’occasion de passer du temps avec les enfants, que ce soit en compagnie des élèves d’Aileen ou de la présente Grace, Sheri ne pouvait que difficilement fermer les yeux. C’était dans des moments comme ceux-ci qu’une part d’elle, anciennement insoupçonnée, l’encourageait à répondre aux attentes des plus jeunes. D’autant plus que Grace avait un esprit particulièrement vif et curieux. C’était toujours agréable de se savoir écouter pour Sheri, qui avait passé de nombreuses années dans sa solitude. Et c’était bon, de partager ses connaissances.

Quand bien même, actuellement, il n’était nullement question de partage de connaissance, mais bien d’action. « Toujours prête, chef ! Quelle est la cible ? On a un plan d'action ? » Sheri eut un sourire tendre sur les lèvres, et sans se décoller de Grace, pointa le couple qui marchait bien au-devant d’elles. Bien que, pour le moment, rien ne laissait présager que ces personnes pouvaient avoir un quelconque intérêt l’une envers l’autre. « J’aime cet optimisme ! » Bah oui. Quoi d’autre. « Ce sont ces deux, là-bas. » Jugeant qu’ils s’éloignaient de trop, Sheri s’empara de la main gantelée de Grace, commençant à marcher calmement, l’esprit de la filature incarné. Ou pas.

« Ils ont des atomes crochus. Mais ils sont trop timides pour faire le premier pas. » La timidité. Voilà une notion qui échappait totalement à Sheri. Elle ne comprenait pas comment les gens, en face de leur Véritable Amour, étaient incapables de se jeter dans les bras de chacun. Question de point de vue, surement. Ah, les obstacles de la société et du manque de confiance en soi. Sheri secoua un peu la tête, surveillant le rythme de ses pas, pour rester assez loin. Elle n’avait pas besoin d’entendre ce qu’ils se disaient. Sheri avait juste besoin que la magie se produise, si elle se permettait l’expression. « Ils ne sont même pas capable de se tenir la main… » Sa voix mettait bien en évidence l’étonnement d’une telle retenue.

Sheri eut une œillade vers Grace, son attention toujours particulièrement fixée sur le couple en devenir. « Pourquoi tu n’utiliserais pas ta curiosité naturelle ? Pour les décoincer un peu ? » C’était encore la meilleur technique que Sheri connaissait. Et si ça ne fonctionnait pas, il y aurait toujours les bons plans à l’ancienne. Quand bien même elle chérissait particulièrement de voir le gêne des tourtereaux.

Si Sheri aimait l'optimisme, il n'y avait pas mieux pour lui tenir compagnie que la jeune Grace. La joie et l'insouciance de l'enfance avaient certes étaient un peu entachées par la perte -momentanée mais effrayante- de son père mais elle s'y accrochait de nouveau avec plus de force. Elle n'était pas pour autant naïve : c'était un choix qu'elle avait fait. Pendant ses semaines qui avaient suivi le lever de la malédiction, elle avait presque perdue tout espoir avant de retrouver son Papa. Et elle s'était ainsi rendue compte d'une étrange vérité : être heureux n'était pas un fait mais le résultat d'un état d'esprit. Alors oui, elle choisissait de voir le meilleur dans les autres, de croire dans les secondes chances et, surtout, de continuer à voir le monde qui l'entourait sous son plus beau jour. Son temps était certainement mieux employé à se concentrer sur les bons côtés des choses que sur les mauvais. C'est donc avec une grande assurance qu'elle acceptait d'aider la jeune femme ; ça la rendait aussi malade que son aînée de voir le temps que les gens perdaient en niant aveuglément la présence de leur âme sœur. La petite fille étudia donc les deux individus désignés par sa rencontre fortuite. Rien ne semblait les désigner comme partenaires idéaux dans la vie mais si Shéri l'affirmait, Grace la croyait sur parole. Après tout, c'était son boulot que de s'occuper des amours. Elle poussa un petit soupir exaspéré devant l'exposé de la situation. « Le premier pas... C'est toujours l'étape la plus délicate, n'est-ce pas ? Tu penses qu'une fois ce cap passé tout ira bien ? »

C'était la question naïve d'une enfant qui n'avait jamais été confrontée à la réalité de ce sentiment fragile et délicat qu'était l'amour. Oh, elle avait cru en ressentir les premières étincelles dans l'existence de Paige, avait pris son courage à deux mains quand invitée par son élu à un rendez-vous pour finir la risée du gentleman. Heureusement, le découragement n'avait pas duré longtemps et elle s'était vite remise de cette mauvaise expérience, surtout grâce à la présence d'un adulte qui avait eu la bonne idée de venir avec un chocolat chaud. Pour autant, elle comprenait presque la peur qu'on pouvait ressentir à se jeter à l'eau, à tout risquer pour une mince chance de faire avancer les choses. Suivant le rythme instauré par sa complice dans cette mission cupidon, la gamine essayait de déchiffrer l'état d'esprit du peut-être-couple. Si l'homme semblait presque mal à l'aise à changer toujours ses mains de place, la femme semblait douter. Elle jetait des regards à la dérobé à son compagnon, presque comme si elle attendait qu'il dise quelque chose. Effectivement, aucun des deux ne semblaient décidé à faire évoluer les choses. Grace réfléchit à comment elle pouvait bien aider. Sa curiosité naturelle, hein ? Si elle parlait de celle qui avait failli faire s'étouffer Gold en lui demandant si Belle était sa fille, elle doutait que ce soit la méthode la plus appropriée. Puis, plus important, elle ne connaissait aucune des deux personnes impliquées. Quelle question qui amènerait à une embarrassante conclusion pourrait-elle poser à un inconnu ?

Faisant la moue devant ce dilemme, elle leva les yeux vers son amie. « Je ne les connais pas, je ne sais pas ce qui pourrait les aider à se lancer. » LA petite fille haussa les épaules en considérant les quelques idées clichées qui germaient dans son jeune esprit. « Je peux faire semblant des croire qu'ils sont en plein rendez-vous et demander des conseils sur quel est le meilleur moyen d'annoncer ses sentiments à quelqu'un ? Ou si j'avais un chocolat chaud, je pourrais accidentellement en renverser sur l'un d'eux : j'ai vu ça dans un film, c'est comme ça que le couple se rencontrait... » Pensive, elle attendit le verdict de Sheri. Après tout, c'était elle qui était en charge de toute cette histoire et elle avait bien plus l'habitude de ce genre de situations. Dès qu'elle aurait reçu un feu vert ou une nouvelle idée, elle irait agir sur le terrain mais elle ne voulait pas risquer de mettre en péril les chances de voir un nouveau couple se former.

« Le premier pas... C'est toujours l'étape la plus délicate, n'est-ce pas ? Tu penses qu'une fois ce cap passé tout ira bien ? » Sheri eut un mince sourire sur les lèvres. C’était illusoire, une telle croyance. Et penser, une seconde, qu’elle serait celle qui enlèverait cette idée innocente de Grace lui fit pincer les lèvres, mimique qu’elle garda de longues secondes, tandis qu’elle replaçant une mèche de cheveux, détaillant la petite fille, et le couple, au loin, faisant plusieurs aller-retour entre eux. « Eh bien. » Mais il y avait bien une chose que Sheri ne ferait pas, ce serait le mensonge. Car elle n’avait jamais appris à mentir et qu’elle avait toujours découvert les mystères de la vie quand elle était confrontée face à ceux-ci. Il était hors de question que Grace se rende compte que, quand bien même la bonne personne avait été trouvée, ce n’était que le début d’une aventure tout aussi éreintante que fantastique.

Sheri et Grace continuèrent donc leur filature plus ou moins discrète, tout en discutant de ces sujets trop philosophiques pour une fille de l’âge de Grace. « Je pense que c’est l’étape la plus simple, en fait. Conquérir la flamme est une chose, faire en sorte qu’elle ne soit pas volée en est une autre. » Et jamais l’entremetteuse ne perdait l’éclat rayonnant de sa voix, quand bien même il lui aurait été si simple de se rendre compte qu’elle pouvait être douée d’un certain talent pour conseiller, elle n’avait jamais été la meilleure praticienne de son état. L’amour avait la belle vie, cloitrée dans sa grotte.

Sheri n’avait pas peur de parler Vérité devant Grace. Cela soulèverait d’autres questions, que l’entremetteuse serait plus qu’heureuse d’élucider. Il n’y avait rien de plus gratifiant que de répondre au besoin de savoir des plus jeunes. « Je ne les connais pas, je ne sais pas ce qui pourrait les aider à se lancer. » Ou tout simplement de leur apprendre les rudiments de la vie, à l’ancienne. Sheri étudia un instant la situation, ne voyant pas où était le problème. Une bonne intervention réussie ferait toujours son effet. Elle écouta les différents plans d’action que la petite Grace proposait, hochant attentivement la tête. « J'ai vu ça dans un film, c'est comme ça que le couple se rencontrait... » et elle ne put retenir un rire, malgré elle. Ah oui, les joies des films et de leurs conceptions toutes construites du monde… Si une oracle avait été dans la conversation, elle aurait souligné que c’était aussi de cette manière que Neal avait rencontré sa traitresse…

Mais ça ne serait pas le bon rp, n’est-ce pas ? Pour en revenir à notre chasse aux amoureux et aux espions en herbes qui les suivait, une vingtaine de mètres en arrière, Sheri prit la parole, explorant les potentiels qui s’offraient à elles. « Bon plan, cependant la vie n’est pas aussi simple qu’un film. Et nous pouvons très certainement y arriver sans sacrifier un pauvre chocolat chaud. » Il y avait des délices sucrés qui ne se devaient pas d’être gaspiller. Le chocolat chaud en faisant partie. « Tu pourrais faire semblant de t’être perdue, mais ça ne fonctionnerait pas ici. » Tout le monde se connaissait et Storybrooke n’avait pas la prétention d’être assez grande pour y perdre ses habitants. Dommage, se comporter de manière compatissante avec un enfant aurait été des points facilement gagnés pour le jeune homme.

Sheri fit mine de réfléchir encore plusieurs secondes. « Ou tu pourrais faire semblant d’avoir perdu ton chien et de demander à ces deux-là de t’aider. A quel point es-tu bonne actrice, Grace ? » Ses yeux brillaient d’une malice enfantine, tandis qu’elle constatait la simplicité du plan. Il suffisait qu’ils cherchent un peu ensemble, ce serait toujours ça de gagner.

Bien que toujours un peu perplexe quand on tentait de lui expliquer à quel point la vie était plus compliquée que ce qu'elle croyait -une part d'elle continuait de penser que les adultes aimaient bien compliquer certaines choses sans raison-, Grace appréciait la sincérité dont faisait preuve Sheri. Il était bien plus agréable d'avoir une conversation honnête bien que l'éloignant de l'innocente conception du monde des enfants que de faire face à la condescendance et aux mensonges d'adultes voulant protéger cette conception. Alors l'écolière s'efforça de digérer les informations. Le premier pas restait ainsi l'étape la plus facile... Elle n'osait pas vraiment imaginer à quel point la vie de couple devait être compliquée. D'un autre côté, le sentiment valait sans doute la peine qu'on se batte un peu pour le conserver alors la chose paraissait logique. Cela se saurait si un tel bonheur était simple, non ? La petite fille hocha pensivement la tête, signe qu'elle acceptait tranquillement la vérité. « C'est pour ça que tonton Andrew et Jamie ne se voient plus ? Quelqu'un est venu voler la flamme ? » Même si elle ne lui rendait plus aussi souvent visite, même si elle ne savait presque rien de sa véritable identité, il restait "tonton Andrew". Et elle se rappelait encore clairement de la façon dont ils se regardaient avant. Mais contrairement à Snow et Charming, ils ne se regardaient plus de cette manière. Preuve s'il en était que l'amour n'était jamais gagné. Tout comme les parents de ses amis divorcés. Vraiment, elle était pour l'instant bien contente de ne pas se trouver dans une telle situation. Elle avait sa famille -agrandie-, ses amis et même des mentors en la personne de Sheri et Aileen. Qui donc aurait besoin de plus à son jeune âge ?

Revenant sur un sujet plus pressant, alias les deux jeunes gens qui marchaient loin devant elles, Grace exposa ses idées à Sheri. « Bon plan, cependant la vie n’est pas aussi simple qu’un film. Et nous pouvons très certainement y arriver sans sacrifier un pauvre chocolat chaud. » Voilà quelque chose qu'elle ne pouvait pas facilement nier. S'il y avait moyen d'éviter un tel gâchis, elle était preneuse. Après tout les chocolats chauds ne poussaient pas sur les arbres et, si Paige avait moins de scrupule vis à vis de l'argent, Grace n'oubliait pas qu'elle et son père en avaient longtemps manqué et que ça avait justement été l'origine de leur séparation. Elle écouta donc sagement les propositions de la spécialiste. Perdue ? Comme si quelqu'un pouvait se perdre à Storybrooke. La bourgade n'était pas assez grande pour avoir une telle prétention et ils y vivaient tous depuis vingt huit ans. Perdre son chien, en revanche, c'était autre chose. Un peu de marche à pied pour éviter à une petite fille un gros chagrin, tout ça en les forçant plus ou moins à travailler en équiper... Grace commençait à voir l'attrait du plan. Elle répondit donc à la question avec un sourire malicieux, après tout chaque enfant était acteur à ses heures perdus, surtout quand il s'agissait d'attendrir son monde. « Meilleure que la plupart ne le soupçonne. » Ayant finalement de quoi aborder le couple en devenir, la petite fille s'élança en courant dans la rue, espérant que son sprint suffirait à lui couper un peu le souffle par soucis de crédibilité.

« Excusez-moi ! Pardon ! Vous n'auriez pas vu un chien ? » Et la voilà, bégayante, le regard volant de droite à gauche comme si elle guettait l'apparition miraculeuse d'un canin dans la rue. Et que le chien était à elle depuis peu, qu'il s'était en allé alors qu'elle était responsable, qu'elle ne savait pas où chercher,... Vraiment, la panique, ça marchait. La jeune femme était déjà en train de s'agenouiller à côté d'elle, toute attendrie, et d'essayer de la calmer en vain. Quant au jeune homme, il proposait déjà son aide pour les recherches, demandant des précisions sur le physique de la bestiole et où est-ce qu'elle l'avait vu pour la dernière fois. La petite fille reçue même deux nouveau contacts dans son répertoire, les jeunes adultes insistant pour qu'ils puissent se joindre à tout moment. Ainsi ils pourraient l'avertir s'ils mettaient la main sur "son chien" et elle de même. En moins de temps qu'il n'en fallait pour le dire, ils étaient parti en courant vers la plage et elle revenait toute fière d'elle vers Sheri. « Ils sont partis chercher sur la plage, là où j'ai perdu de vue mon chien. Et comme j'ai leur numéros, on peut les suivre discrètement et les appeler pour leur dire que je l'ai retrouvé quand on jugera qu'ils se seront suffisamment rapprochés. A moins que tu n'aies d'autres plans pour la journée ? »

« C'est pour ça que tonton Andrew et Jamie ne se voient plus ? Quelqu'un est venu voler la flamme ? » Sheri avait déjà entendu parler une ou deux fois de ce couple-là. Enfin… Ancien couple. Elle était allée voir, dans son carnet, l’évolution des deux hommes. La vie sentimentale n’était pas aussi simple que certains le prétendaient. Andrew et Jamie en étaient le parfait exemple. Quand bien même ils s’étaient trouvés – perdus – retrouvés, leurs chemins avaient fini par se séparer. « On peut dire ça. Certains sont jaloux de l’amour des autres. Ou d’autres, on trop peur de continuer. » Ca avait été le cas pour Jamie, qui était retourné avec Vera. Quand à Andrew, Sheri ne s’inquiétait pas particulièrement pour lui, il y avait un autre nom qui l’attendait.

Mais le temps n’était déjà plus à s’attarder sur cet adorable couple. L’entremetteuse, accompagnée de son acolyte, avait une autre pairs de coincés à faire bouger. Le plan, tout doucement, se mettait en place, promettait un piège qui arriverait à ses fins, elle l’espérait. D’ailleurs, Sheri apprécia fortement l’enthousiasme habituel de Grace, tandis qu’elle observait la petite prendre les devants et arrêter les passants. La brune s’arrêta, croisant les bras, un sourire amusé sur les lèvres, tandis qu’elle captait des brides de l’excuse de la petite fille sur ce chien imaginaire. Ça avait l’air de fonctionner, tandis que ses yeux bruns étudiaient attentivement l’interaction entre l’homme et la femme. Elle hocha de la tête pour elle-même. C’était un bon plan. Et Grace était une très bonne actrice.

« Ils sont partis chercher sur la plage. » Sheri sourit un peu plus à Grace qui revenait, approuvant le fait que les deux futurs amoureux iraient se perdre sur l’étendue sablée. Ce n’était pas un secret, la plage pouvait faire des miracles. Et si quelques vagues ne seraient pas suffisantes, le fait de passer une heure ensemble rapprocherait les deux bougres. Foi d’entremetteuse. « On peut les suivre discrètement et les appeler pour leur dire que je l'ai retrouvé quand on jugera qu'ils se seront suffisamment rapprochés. A moins que tu n'aies d'autres plans pour la journée ? » Quand bien même l’idée ferait pâlir les gens sains d’esprit – suivre les inconnues c’est mal – Sheri ne pouvait qu’approuver la proposition. C’était tellement excitant de découvrir les fils de l’amour se resserer entre deux personnes.

Anciennement, dans le monde des contes, Sheri ne jugeait pas cela utile. Déjà parce qu’il lui aurait été impossible de parcourir toute la forêt enchantée, aussi parce qu’elle ne se sentait pas prête. Il y avait toujours une part d’elle qui regrettait cette page déchirée, dans le carnet. Et la sécurité de sa caverne lui plaisait largement. Une fois arrivée à Storybrooke et forcée de regarder la vie évoluer autour d’elle, le tout doublé de l’optimise de Romane pour le genre humain, Sheri ne pouvait d’apprécier ce genre d’aventure. Ainsi, elle secoua positivement la tête. « Non, je suis parfaitement libre. On va pouvoir étudier la magie de l’amour en directe. » Sheri reprit la main de Grace, petit habitude à elle, suivant le couple d’un peu plus loin, maintenant qu’elles savaient où ils se rendaient. « Ça te donnera l’occasion de me poser toutes sortes de question. Je suis sûre que notre dernière conversation t’as laissée sur ta faim. » Ah, les joies d’un esprit aussi vif que celui de la petite Grace.

Fière de son travail improvisé et encore plus heureuse de pouvoir en observer les résultats, Grace abandonna sa main à Sheri. C'était une des choses que la plupart des adultes faisaient sans même y penser : prendre sa main. Pas que ça la dérange, seulement elle trouvait ça un peu étrange de voir à quel point les gens pouvaient partager un tel instinct. « Ça te donnera l’occasion de me poser toutes sortes de question. Je suis sûre que notre dernière conversation t’as laissée sur ta faim. » Voilà quelque chose qu'elle pouvait difficilement nier. Après tout, elle était curieuse. Qui ne le serait pas ? On parlait tout de même de la romancière de l'Amour en personne. Et même sans ça, la petite fille avait soif de connaissance en tout genre. Elle était avide de comprendre les merveilles qui l'entouraient, de se figurer les engrenages qui se cachaient derrière l'image qu'elle avait du monde. Même pendant la malédiction, Paige se passionnait pour l'Histoire -Egypte, Europe médiévale, Chine et Japon, Guerre Froide, tout était bon à apprendre- et les quelques aperçus de physique qu'ils avaient à l'école. Alors maintenant que Grace avait retrouvé la mémoire, maintenant qu'elle était consciente que les contes de fées étaient sa réalité, elle était presque instopable. Il y avait tout un tas de chose inimaginables à découvrir et elle était déterminée à en voir un maximum. Ça finirait sans doute par lui attirer des soucis, mais elle était bien loin de s'en soucier pour le moment.

A vrai dire, elle réfléchissait pour un moment à quelle question poser. Elle avait tellement d'interrogations quand il s'agissait de l'entremetteuse qu'elle ne savait jamais par où commencer. Peut être se débarrasser des préjugés idiots des contes de fées serait une bonne idée. « Cette histoire d'âme soeur, ce n'est pas totalement vrai, si ? Il n'y a pas qu'un seul partenaire idéal pour quelqu'un, il doit forcément y avoir plus de possibilité que ça... » C'était peut être une réflexion surprenant pour une jeune fille de son âge mais la question n'était pas si innocente que ça. Grace refusait juste de concevoir qu'on ne puisse avoir qu'une seule et unique chance de trouver le bonheur. Parce qu'elle avait admis depuis longtemps que son Papa avait aimé sa mère de tout son coeur. Parce qu'elle refusait cependant d'admettre qu'il pouvait avoir perdu toute autre chance d'aimer autant à nouveau. L'écolière leva les yeux vers Sheri avec un grand sérieux, attendant le verdict avec espoir. Et pas que pour son père. Pour Andrew aussi et pour tous ceux qui avaient un jour perdu pour une raison ou une autre un être aussi cher.

La mission était un succès. Certes, il pouvait être trop tôt pour que Sheri arrive à cette conclusion, mais les deux tourtereaux étaient partis dans la même direction. Chaque seconde qu’ils passaient ensemble étaient une petite victoire pour l’entremetteuse. Et elle n’y serait jamais arriver sans l’aide de la petite Grace. Elle devrait songer à lui proposer un contrat à long terme. Pourquoi changer une équipe qui gagne, n’est-ce pas ? D’autant plus que la petite fille était d’une agréable compagnie, aux yeux de Sheri. « Cette histoire d'âme soeur, ce n'est pas totalement vrai, si ? Il n'y a pas qu'un seul partenaire idéal pour quelqu'un, il doit forcément y avoir plus de possibilité que ça... » Elle eut un petit sourire. Grace était beaucoup plus futée qu’elle, à cet âge-là.

La brunette se demanda, un instant, pourquoi il en était ainsi, pourquoi Grace, assurément, ne tomberait pas dans tous les pièges de la vie, comme il avait été le cas. Après un peu de réflexion, il lui était apparu que Grace ne se laissait pas abattre par le sort. Sheri, quand elle était une servante avait embrassé son sort, défaite. C’était quand elle avait décidé de prendre sa vie en mains que tout avait changé. Dans les premiers mois qu’elle avait passé en compagnie d’Agape, elle s’était souvent trouvée à regretter cette idée d’aller trouver celle qui écrivait l’amour. Aujourd’hui, il lui était difficile d’apprécier la vie qu’elle aurait eu, si elle était resté au service de Peace.

Sheri replaça une mèche de cheveux, hochant la tête à l’évidence que Grace venait de soulever. « Bien vu. Ceux qui prétendent le contraire le font pour se donner de l’importance. Et ceux qui refusent d’accepter cette possibilité ont trop peur d’aller en avant. » Oh, elle avait un parfait exemple de ce genre de comportement. Madame le Maire refusait toujours d’admettre la vérité, alors qu’une fée l’avait mise devant le fait accompli. Un peu trop brusque, éventuellement. Enfin, l’entremetteuse espérait que Regina accepterait ce qui était écris. Non pas à cause de son métier, mais parce qu’elle appréciait Regina et que, comme tous, elle avait droit à une seconde chance.

Elles perdirent tout doucement la vue des futurs amoureux, sans que Sheri ne s’inquiète. Elle savait où ils allaient. Et le plus dur, pour le moment, avait été fait. Le reste n’était plus qu’une question de patience. « Les gens ont parfois peur de se lancer dans l’inconnu. » Elle poussa un faible soupir. Ah, si tout le monde se lançait dans l’incroyable aventure de l’amour, sans une seconde pensée. « Ou alors, ils craignent que la deuxième histoire ne soit qu’une répétition de la première. » L’être humain était une créature compliquée. Sheri en avait bien conscience pour l’avoir été une vingtaine d’années. Mais plus elle vieillissait, plus elle se rendait compte du complexe de l’Homme. « Mais pour toi, ça ne sera pas aussi compliqué, n’est-ce pas ? » Elle lui offrit un grand sourire confiant. « Je n’aimerai pas te piéger pour que tu te retrouves en face de cette personne. »

Bien vu. Comme si Grace avait un quelconque mérite à poser cette question et remettre en doute toute cette idée d'âme soeur alors qu'elle ne faisait qu'éliminer ses inquiétudes. Le compliment non mérité ne l'empêcha pas de sourire de toutes ses dents, plus heureuse qu'elle ne l'avait été depuis ses retrouvailles avec son Papa. Lequel avait bien des soucis à se faire car sa fille avait déjà l'esprit occupé à établir des plans pour que le Chapelier renoue avec l'amour. Une part d'elle était tentée de demander des renseignements à Sheri mais elle n'en fit rien : Jefferson et elle étaient heureux tous les deux et ça ne servait à rien de vouloir accélérer les choses. Puis si c'était aussi facile d'arranger toutes leurs histoires, la vie perdrait sans aucun doute son piquant. Cependant, malgré l'euphorie du moment, la seconde partie de la réponse n'échappa pas à Grace. Elle la laissa d'ailleurs légèrement perplexe. C'était dur pour un enfant d'une douzaine d'année de comprendre ce genre de peur. Généralement les gamins fonçaient tête la première sans songer aux conséquences et trouvaient bien un moyen de les gérer en cours de route. Ou quelqu'un pour les aider à gérer. Peut être était-ce là la difficulté quand on était un adulte célibataire ; on devait assumer les conséquences de ses actions et ce souvent seul. Sans compter que même si elle était sage, son Papa devait surement passer une bonne partie de son temps à assumer celles des actions de sa fille.

Petite fille qui se reconcentra sur les explications de la plus grande spécialiste des relations humaines à sa connaissance tout en essayant d'assimiler ce qu'elle apprenait. La peur de l'inconnu, elle ne comprenait pas vraiment. Grace vivait pour l'inconnu, pour découvrir toutes sortes de choses, de lieux et de personnes. Pour elle la vie se résumait à un socle sociable stable et une suite d'inconnus plus ou moins grands. En revanche, la deuxième angoisse lui semblait plus compréhensible. Elle s'imaginait assez facilement que ce ne devait pas être agréable de vivre une répétition de toutes les premières fois merveilleuses avec une personne différent de la première. Comme une mauvaise reprise d'une chanson familière et aimée. Pourtant, même elle pouvait voir que c'était une peur injustifiée. Tout le monde était différent et commencer une nouvelle histoire avec quelqu'un d'autre devait surement dire repartir de zéro et découvrir toutes les habitudes, les angoisses et les joies de l'autre. Un nouvel inconnu à conquérir. Grace se demanda un instant si son Papa avait fui une seconde chance pour une de ses raisons ou encore autre chose. Il y avait tellement d'excuses possibles que c'en devenait ridicule. Puis elle balaya l'interrogation en songeant que ça n'avait aucune importance : elle était là, avec l'enseignement de Sheri elle devenait plus consciente de comment les choses fonctionnaient et elle veillerait à ce que son père ne rate pas sa chance quand elle se présentera.

Perdue comme elle l'était sur comment elle pourrait aider son Papa à trouver l'amour, la question de sa compagne la prit un moment au dépourvu. Puis la remarque qui suivit la fit finalement éclater de rire. Elle espérait de tout coeur qu'elle ne serait pas aussi aveugle que certains des habitants de Storybrooke mais tout ça lui paraissait bien éloigner. L'amour ne faisait pas partie des priorités de la petite fille. D'autant plus que si elle devenait Marraine la Bonne Fée elle devrait surement faire une croix là-dessus. Qu'à cela ne tienne, elle en avait encore toute la vie devant elle ! « Je ne peux rien promettre mais c'est bon de savoir que tu pourras me piéger et me remettre dans le droit chemin si ça arrive. » Et la voilà qui laissait tomber son énorme sourire pour prendre un air plus hésitant. Cela faisait longtemps qu'elle voulait poser la question mais n'osait pas. Aujourd'hui, elle prendrait son courage à deux mains en espérant ne pas commettre une gaffe monumentale. « Et pour toi, comment ça se passe ? Tu écriras aussi ton nom à côté d'un autre un jour où tu n'as pas accès aux informations sur ton histoire d'amour ? »