If you meet a loner, it's not because they enjoy solitude {Pv Declan

De toute évidence, le geste n'avait pas le moins du monde dérangé Declan. Au contraire ce dernier lui fit un grand sourire, la rassurant à ce sujet. Cette réaction chaleureuse diminua un peu le malaise de la comtesse, trop heureuse d'avoir pu ne serait-ce qu'un peu réconforter l'étranger. Pourtant Dieu savait qu'elle n'était pas douée pour ce genre d'exercice. C'était peut être pourquoi cela la fit sourire ; pour une fois elle se rendait utile. Un peu de soutient. Peut être était-ce mieux que d'être seul tout compte fait ? Peut être qu'il ne regretterai finalement pas d'avoir trouvé la rive déjà occupée. Et cette éventualité suffit à insuffler un peu de bonne humeur à Elizabeth. D'autant plus que le regard de chien battu de l'homme lui donnait envie de partager ce regain d'entrain. Elle avait envie de le voir sourire, rire. Surement sa tendance naturelle à faire passer les autres avant elle qui reprenait le dessus. Quoique, pour ce qu'elle en savait, ça pouvait aussi bien être une envie purement égoïste : celle de se prouver qu'elle était de bonne compagnie. Ça faisait terriblement longtemps que personne ne prenait plus le temps de discuter sincèrement avec elle qu'elle en avait presque oublié à quel point ça pouvait être détendant. Et oui, elle ne considérait pas les mondanités qu'elle échangeait avec les hôtes de son mari ou les échanges de ragots comme une véritable conversation.

Quoiqu'il en soit, c'était au tour de Declan de poser une question. Sous son observation, elle se redressa légèrement en fixant ses yeux dans les siens, toute trace de timidité envolée. Si Lizzie était timide, la comtesse Elizabeth ne l'était pas -ne pouvait pas se permettre de l'être-. Et la petite Lizzie trouvait qu'elle s'était assez ridiculisée avec sa propension à s'excuser pour en rien et baisser les yeux tout le temps. Il était temps de se donner un peu de constance que diable ! Elle n'était plus une enfant et si elle était capable de jouer le rôle de l'épouse Bridgestone devant tout le château, elle pouvait bien s'en inspirer devant Declan. Néanmoins, elle n'eut pas à simuler le rire qui répondit à la question de lu brun. Si seulement il savait tous les rêves qu'elle avait mis de côté pour se plier aux règles et à quel point elle le regrettait dorénavant. A croire que c'était un vilain pied de nez que lui jouait le destin dans ces quelques mots. « Qu'est-ce qui vous fait croire que j'ai un problème avec les règles imposées ? Allez-vous me confesser que vous êtes un bandit de grand chemin ou un voleur ? Parce que cette question en donne grandement l'impression. » Elle secoua ses boucles blondes, reprenant son calme, un sourire amusé toujours sur les lèvres. Elle était persuadée qu'au point où elle en était, apprécier la compagnie d'un hors la loi ne l'aurait même pas dérangé alors qu'avant elle en aurait été horrifié. Repensant de nouveau à toutes les aventures dont elle avait une fois rêvé, son sourire se fit un peu plus amer et elle se pencha vers Declan pour lui murmurer à l'oreille ce qu'elle n'avait jamais avoué à personne. « Toujours. J'en ai toujours envie. »

Puis elle se redressa tout aussi vite, se recomposant le masque souriant de la comtesse. « Mais pourquoi croyez-vous qu'il y ait une telle passion pour les ragots au château ? Tout le monde meurt d'envie d'échapper aux règles. » Elle se retint d'ajouter qu'elle préférait grandement les colporteurs de ragots à ceux qui passaient le cap et s'affranchissaient des règles. Tout simplement parce que son mari était un de ceux-là et que c'était justement pour ça qu'elle lui en voulait autant. S'affranchir des règles pouvait peut être rendre une personne heureuse mais chaque chose venait à un prix. Et elle était manifestement le dommage collatéral du bonheur de son cher et tendre. Mais après tout, elle l'avait marié pour le bon comme pour le mauvais non ?

Oui, Declan était un voleur. Était-ce encore un mystère pour certains ? Par cette question, il pensa que oui. Au final, seuls les loubards qui traînaient dans la taverne et les quelques pauvres habitants du royaume connaissaient les histoires que l'on racontait sur la famille Weathers. Peut-être qu'au delà d'une certaine classe sociale, ces histoires n'étaient que des futilités bonnes à faire peur à un enfant en bas âge. Tout étant que Declan souriait. Il écoutait parler Elizabeth, amusé par ses paroles et sa façon de penser. Le sorcier ne répondit même pas aux accusations véridiques de la jeune femme. Libre à elle de s'imaginer ce que bon lui semblait sur la personnalité de Declan. Lui ne se souciait pas de ce qu'elle pouvait voir au delà des apparences. Il n'allait peut-être jamais la revoir suite à cette rencontre, alors qu'importe ce qu'il pouvait bien représenter pour elle à cet instant.

Elizabeth se penchait maintenant près de l'oreille de Declan, qui restait inclinait légèrement la tête pour mieux entendre le murmure qu'elle laissa filer. La jeune femme désirait donc aller au delà des limites que l'on pouvait lui imposer. Un rictus étira doucement le coin des lèvres du sorcier, qui fut plutôt ravi d'entendre ces mots. La comtesse se redressa rapidement après sa révélation, comme si de rien était. Declan laissa son regard glisser sur elle, son sourire ne le quittant plus. Son esprit réfléchissait à comment agir pour refermer peu à peu les mailles du filet qu'il venait de jeter sur Elizabeth. Les nouvelles paroles de la comtesse aidaient. Declan se pencha à son tour à l'oreille de la jeune femme, comme s'ils étaient épiés et entendus. « Et si vous décidiez de franchir le pas. Et si vous profitiez d'un instant pour frôler la liberté ? Un court moment pour laisser votre esprit repousser toutes ces règles qui vous emprisonne et vous empêche d'agir comme vous l'entendez. » Il approcha un peu plus, murmurant plus bas qu'il le put. « Pourquoi les hommes seraient-ils les seuls à pouvoir faire ce dont-ils ont envie ? Les femmes aussi ont le droit de briser les conventions. De goûter à l'interdit. » Il recula légèrement le visage mais resta très près. Il voulait faire ouvrir les yeux de cette femme qui méritait peut-être d'avoir son instant de rébellion.

Declan ne répondit rien aux questions de la blonde, se contentant de garder un grand sourire. Alors ainsi, certaines rumeurs sur l"homme assis à ses côtés pourraient se trouver tout à fait fondées... Ce qui ne semblait pas dire qu'il menait une vie heureuse de ses larcins, loin de là apparemment. Enfin, ce n'était pas ce qui importait en ce moment mais plutôt la petite conversation qu'ils avaient sur les limites et les règles imposées. Celle que tout un chacun rêve un jour de briser. Et apparemment, sur ce sujet, le supposé voleur avait beaucoup plus de choses à dire. Elizabeth se tendit légèrement quand il se pencha vers son oreille mais ne recula pas, refusant de passer pour une jeune fille facilement intimidée. Après tout, c'était elle qui avait commencé à chuchoter sa petite confession à l'oreille de Declan. Et elle devait avouer que ce qu'il lui proposait était diablement troublant. La liberté. Juste pour un instant, bref mais réel. Seulement, et elle n'en laissa rien paraître de peur qu'il la trouve ridiculement naïve, il ne voyait pas où il venait en venir ni ce que pourrait être cette liberté qu'il lui faisait miroiter.

Comme pour répondre à ses interrogations, il se rapprocha encore plus, son souffle chaud sur sa peau la faisant légèrement frissonner. Mais encore une fois, elle ne recula pas, inclinant seulement la tête de manière à mieux percevoir ce qu'il murmurait si bas qu'elle eut peur de ne pas l'entendre. Et à vrai dire, peut être n'aurait elle pas préférer entendre. Aussi rouge qu'on pouvait l'être, elle se leva vivement, plus choquée qu'elle ne l'avait été depuis un long moment. Elle ne savait pas pour quelle genre de personne ce Declan avait pu la prendre, mais elle était à des lieux de ça ! « Je... Je..- Désolée mais ce genre de proposition, ce n'est vraiment pas pour moi. » Trop surprise par les derniers propos et le calme de la rencontre laissé bien loin derrière elle, Elizabeth balbutiait nerveusement. Se voyant mal rester plus longtemps à discuter tranquillement après un tel évènement, elle se mordilla la lèvre inférieure tout en repoussant une boucle blonde derrière son oreille. Finalement, l'homme n'avait rien du gentil nounours au regard de chien battu que sa barbe, ses cheveux en bataille et son sourire un brin triste laissaient imaginer. Et quand diable s'était-il imaginé pouvoir lui faire du rentre-dedans ? Etait-ce de sa faute à elle ? L'y avait-elle incité en posant sa main sur la sienne ? « Je crois que je vais vous laisser profiter de votre solitude, Monsieur Weather. » Le ton avait été plus sec que prévu, maintenant que la surprise laissait place à l'indignation. La comtesse se dirigea à grand pas vers son cheval sans même un regard en arrière. Cependant, les rênes s'étaient emmêlées dans les branches basses avec les déplacements de la monture et la colère rendait ses mains tremblantes, rendant la tâche encore plus difficile.

Declan était allé bien trop vite dans son petit plan. Au lieu de continuer à amadouer la jeune femme, il était entré dans le vif du sujet, en laissant une pointe de subtilité, fort heureusement. Et Miss Birdgestone ne fut pas très à l'aise face aux paroles du sorcier. Elle s'était alors levée brusquement et sa voix faisait ressortir la nervosité qu'elle ressentait. Elizabeth n'appréciait pas les propositions de Declan et les refusait sans hésiter. Le sorcier laissa son regard posé sur elle alors qu'il se donnait des baffes imaginaires. Sa solitude forcée avait des conséquences. Declan n'était même plus capable de jouer trop longtemps au gentil homme. Et puis, sans se mentir, en temps normal, le sorcier arrivait à séduire. Preuve que Elizabeth n'était pas comme les autres femmes. Même si elle avait semblé naïve aux yeux de Declan au premier abord, celle-ci prouvait qu'il ne fallait pas se méfier des apparences. Il la laissa donc s'éloigner après qu'elle ait annoncé son départ et lui donna un temps d'avance avant de se lever à son tour.

Il approchait d'Elizabeth, décidé à s'excuser quant à son comportement. Il avait déjà calculé ce qu'il allait lui dire et le type de personnage qu'il allait jouer. Après tout, il était un homme et avait le droit à l'erreur. Ses pas étaient lents alors que la jeune femme se débattait avec les rênes de son cheval. Celles-ci s'emmêlaient de plus en plus aux branches basses à mesure que l'animal s'agitait. Declan approcha tout près d'Elizabeth pour l'aider dans sa tâche. Il fut très prudent et plutôt calme, ne souhaitant pas effrayer la comtesse davantage. Lorsqu'il réussit à défaire les rênes, il les présenta à Miss Birdgestone, un très léger sourire désolé affichait à son visage. « Je ne voulais pas vous paraître désagréable et je suis désolé que mes paroles aient pu vous choquer. » Il adopta une pseudo carapace, jouant son rôle comme il l'avait imaginé quelques secondes plus tôt. Peut-être serait-il convainquant, puisqu'il y avait une part de vérité dans ce qu'il comptait dire. « J'ai une sœur vous savez. Elle était un peu comme vous. Elle s'est laissé avoir par une soit-disant amie qui l'avait manipulé jusqu'à lui dérober son bonheur. » Le sorcier marqua une pause, baissant un peu les yeux pour sembler le plus sensible possible. « Alors, quand je vois d'autres femmes ne pas suivre leurs instincts, je me révolte un peu. Je ne voulais vraiment pas vous obliger à quoi que ce soit. Mais vous avez le droit d'écouter votre cœur plutôt que votre esprit, qui est prédisposé à suivre les règles qu'on a pu lui dicter. » Il soupira, faisant mine d'être attristé de ses gestes précédents le départ d'Elizabeth. « Et je n'avais aucune arrière pensée non plus. Je peux vous l'assurer. » S'il aurait été Pinocchio, son nez ce serait allongé.

Elizabeth ne semblait pas devoir parvenir à démêler ces maudites rênes toute seule, chacun de ses gestes tremblant dû à l'indignation échouant à arranger le sac de noeuds. Et plus les secondes passaient, plus elle s'énervait de rester encore près de ce lac et près de Declan. Lequel, après être resté un moment immobile, semblait venir vers elle d'après les bruits de pas qu'elle pouvait entendre. Prête à répliquer avec une parole acide au moindre mot de l'homme, il la surprit encore une fois en entreprenant de démêler les rênes à sa place. Consciente qu'elle n'aidait pas le moins du monde, elle lâcha les liens et croisa les bras autour de sa poitrine. Le mal aise était toujours présent et elle se butait à garder le silence. Pourtant, mis à part les derniers évènements, la comtesse avait apprécié la présence du soit-disant sorcier. Aussi s'efforça-t-elle de ne pas sourciller devant le sourire triste avec lequel il lui tendit les rênes, les reprenant avec un glacial Merci. Elle allait monter en selle quand il reprit la parole, apparemment désireux de s'expliquer. Que ses paroles aient pu la choquer ? La blonde leva les yeux au ciel. Elle ne savait pas à quel genre de femmes il avait l'habitude de s'adresser mais elle voyait difficilement comment elle aurait pu ne pas être choquée par de tel propos. Lui proposer aussi clairement de s'envoyer en l'air comme n'importe quelle fille de joie ? Pire. L'inciter à tromper son seigneur et mari ? Oh Dieu savait qu'elle se l'était plusieurs fois imaginé, rien que pour la joie qu'elle pourrait en retirer s'il le découvrait. Pour lui apprendre quel goût avait la trahison. Mais jamais, oh grand jamais, n'avait-elle un instant envisagé de passer à l'acte.

Elle écouta avec attention Declan lui parler de sa soeur, se demandant où se trouvait la vérité et où se cachait le mensonge dans les propos de l'homme. Elle n'arrivait plus à déterminer s'il était sincère ou juste terriblement bon acteur. Et ça la dérangeait. Car si elle ne souhaitait pas faire preuve de plus de naïveté en se laissant prendre au jeu, elle voulait moins que tout refuser de compatir au sort d'un étranger qu'elle avait mal jugé. Partagée entre la méfiance et la compassion, elle resta immobile pour l'entendre jusqu'au bout. Et plus il parlait, plus elle se perdait. Plus il était difficile de savoir à qui elle avait à faire. Décidant soudainement de rester un peu plus longtemps et de continuer cette petite discussion, elle leva la tête pour fixer Declan droit dans les yeux, espérant peut être y découvrir la preuve de sa sincérité. « Je suis désolée pour votre soeur mais je ne vois pas en quoi son histoire ressemble à la mienne. Aux dernières nouvelles personne ne m'a dérobée mon bonheur. » Défendre l'illusion selon laquelle elle allait parfaitement bien, encore et toujours. Et dire qu'elle s'était justement éloignée du château pour ne plus avoir à le faire. « Mais puisque vous semblez avoir une telle connaissance de ma vie et de mes instincts, je vous en pris, éclairez moi. Qu'à donc mon coeur à me dire que je refuserais d'entendre ? » Le menton levé et le ton sarcastique, la comtesse Elizabeht avait très vite reprit le dessus sur la petite Lizzie. Le comportement de la blonde n'avait plus rien à voir avec le début de conversation aimable et agréable qu'ils avaient eu sur la rive et, si elle restait, c'était uniquement par curiosité pour l'étrange individu qui lui faisait face.

L'attitude d'Elizabeth amusait beaucoup le sorcier qui essayait de paraître le plus aimable possible. Il devait regagner la confiance de la jeune femme en montrant une part de gentillesse dont-il ne faisait pas réellement preuve. Tout n'était qu'un jeu, une très bonne comédie de la part de Declan qui cherchait de nouvelles idées dans son esprit machiavélique. Peut-être n'était-il pas mauvais envers miss Birdgestone elle-même mais contre ce qui constituait son univers. Les règles, les obligations. La jeune femme reprit rapidement ses rênes et remercia le sorcier d'un ton sec. Celui-ci eut un rictus en essayant de réprimer un rire. La situation était comique à voir et il fut très difficile pour Declan de ne pas s'en amuser ouvertement. Contenir son coté sarcastique était certainement la chose la plus compliquer à faire pour un homme comme lui. Heureusement, il avait appris à évoluer dans l'art de la manipulation et tentait de rester de marbre face aux situations imprévues et celles où les émotions menaçaient de prendre le dessus.

Declan commençait donc à s'excuser et à parler de sa soeur, Mallory, qu'il comparait à la comtesse. Elles n'avaient pas les mêmes histoires mais le thème de la liberté était présente dans chacune d'elles - du moins, c'est ce que le sorcier pensait. Elizabeth répliqua aussitôt, se sentant désolée pour la soeur de Declan mais pas du tout concernée par les dires du sorcier. Celui-ci gardait un visage neutre et accrochait le regard de la comtesse qui voulait encore le défier. Elle lui demanda alors de lui ouvrir les yeux quant à la discussion qu'ils avaient eu un peu plus tôt. Declan prit appui contre une grosse branche basse en posant son avant bras dessus, réfléchissant à ce qu'il pourrait bien répondre à la jeune Elizabeth. Il retroussa son menton et leva les yeux au ciel, faisant mine de creuser un peu plus dans son esprit. « Je n'en ai aucune idée. » Declan baissa les yeux pour les poser une nouvelle fois dans le regard de la comtesse. « En réalité, je pensais que votre vie ne devait pas être des plus agréable. Après tout, votre époux ne se gêne pas pour vivre son bonheur, lui. Il ne se prive pas de sa liberté, peut-être parce qu'il pense que les femmes n'ont pas le droit de donner leur avis face à la situation. » Il ne connaissait pas cet homme et disait ce qu'il voulait de lui, défendant Elizabeth, d'un certain point de vue. « Vous êtes enchaînée à un homme qui ne vous rendra jamais vraiment heureuse. Mais qu'en sais-je après tout ? Ce ne sont peut-être que des rumeurs. »

Jouant distraitement avec les rênes dans sa main, Elizabeth ne lâcha pas des yeux Declan alors que ce dernier s'appuyait contre une des branches basses d'un arbre. Elle ne savait pas pourquoi elle restait. Elle ne savait pas pourquoi elle ne remontait pas à cheval pour rejoindre le château. Après tout, c'est ce qu'elle aurait dû faire, n'est-ce pas ? Seulement peut être qu'une part d'elle voulait avoir confirmation que Declan n'était pas quelqu'un de mauvais : elle avait eu le sentiment qu'ils se ressemblaient un petit peu plus tôt, s'était-elle trompée ? Ou peut être était-elle simplement curieuse. De toute façon, une petite voix murmurait dans sa tête que tout était mieux que de retourner d'où elle venait, même si ce tout englobait un rustre de premier ordre capable de faire des avances à une femme mariée. Alors elle restait sur place, étonnée que la part d'elle qui n'était pas occupée à s'indigner des paroles maladroites de l'homme soit étrangement heureuse de la distraction qu'il lui offrait. Ce qui ne l'empêcha pourtant pas de lever les yeux au ciel une énième fois alors qu'il lui répondait qu'il ne savait pas. Pas une des réponses les plus constructives qui lui aient été données.

Mais qu'à cela ne tienne puisque leurs regards s'accrochèrent de nouveau, chacun semblant défier l'autre. Elle n'était pas sure mais, en plus de la compassion dans sa voix, il semblait à la comtesse apercevoir une pointe de moquerie dans ses yeux. Mais peut être n'était-ce qu'une délire paranoïaque causée par les propos de Declan. Elle n'appréciait jamais qu'on lui rappelle à quels points les rumeurs voyageaient vite, surtout lorsqu'il s'agissait de rumeur sur son couple. Levant inconsciemment le menton et se tenant plus raide que jamais, elle encaissa tout ce qu'il lui balançait, agacée de voir ainsi sa vie jugée. Qu'avait-elle fait pour mériter ce genre d'humiliation ? Balayant l'air d'un geste de main anodin comme pour chasser cette histoire elle reprit la parole d'un air désinvolte. « Si cela peut vous rassurer mon mari accorde de l'importance à l'avis d'au moins une femme. » Le défendre envers et contre tout était une habitude qui avait visiblement la vie dure. Pourtant rien ne l'aurait empêché d'en dire du mal : elle n'était pas face à un aristocrate devant lequel elle devait maintenir l'illusion. « Mais je ne pense pas que mon bonheur vous concerne, merci bien. Par contre, au sujet des rumeurs... Je pense que vous vous y connaissez aussi, n'est-ce pas ? » Avec un faux sourire aimable, Elizabeth essaya de se rappeler d'un maximum d'informations qu'elle pourrait racheter au nom de Weather. Dire que les deux s'étaient mutuellement avoués fuirent tous ces ragots seulement quelques minutes auparavant... Et pourtant, aussi généreuse qu'elle pouvait se montrer, la comtesse préférait tout de même attaquer que de se contenter des maigres défenses sur sa vie conjugale. Tout valait mieux que de s'attarder sur le sujet. « Voleur, brigand, sorcier fils d'une sorcière,... Bien des rumeurs courent sur vous. Aucune ne fait étalage d'une vie heureuse. Ne feriez-vous pas mieux de vous occuper de votre bonheur plutôt que du mien ? »

Pensant avoir les cartes en main, Declan se délectait intérieurement de son petit manège dont-il pensait tenir les ficelles. Décidément, il avait passé bien trop de temps en compagnie du ténébreux, à moins que son caractère n'ait aucun lien avec Rumplestiltskin. Non, ce n'était pas la bonne raison. En réalité, Declan s'était forgé ce caractère, ce personnage, à force de voir l'espoir s'échapper. Plus le temps passait et plus le sorcier comprenait que la vie n'était pas simple, que les gens autour de lui n'étaient pas forcément des amis, même ceux qu'ils n'auraient jamais soupçonné. Combien de fois lui avait-on tourné le dos après qu'il ait accordé sa confiance ? Combien de fois s'était-il fait prendre pour un imbécile par des gens qui n'avaient aucun problème à jouer avec les sentiments d'autrui ? Pas étonnant que Declan soit devenu ce qu'il était aujourd'hui. Un homme dépourvu de gentillesse, sarcastique, manipulateur, qui ne pensait qu'à lui et à sa famille. Pourtant, il aidait bien Elizabeth à laisser tomber sa carapace, à vivre comme elle l'entendait. Pourquoi ? Qui s'en souciait. Oui, il était charmé par le physique de cette femme et voulait en profiter. Mais ce n'était pas uniquement pour cette raison qu'il se donnait autant de mal. Il n'en était pas amoureux, loin de là et heureusement. Non, Declan voulait juste s'amuser tout en faisant une bonne action, à sa façon.

Au départ, le sorcier voulait juste passer du bon temps en compagnie de la comtesse. Puisqu'elle n'était pas femme facile et puisqu'ils avaient pris le temps de discuter, le choix de Declan pour l'aider à se rebeller fut vite pris. Il se fichait totalement, au final, qu'elle le suive ou non, qu'elle décide de l'écouter ou qu'elle fuit. Au moins, il aurait essayé. Mais le sorcier n'appréciait pas la défaite et espérait vraiment obtenir ce pourquoi il vomissait de bonnes paroles.

Elizabeth décida de répliquer quant aux dernières paroles de Declan. Son époux se souciait d'une personne, oui, mais peut-être pas d'elle. Le sorcier en avait quasiment la certitude, s'il se fiait aux rumeurs. Il fut donc secoué d'un seul rire, peut-être moqueur envers Elizabeth qui semblait défendre son mari. Puis, la jeune femme se défendait elle-même en posant une question à Declan dont-elle ne tarda pas à donner quelques réponses d'avance. Miss Birdgestone prouvait alors que le sorcier n'était pas le seul à connaître les secrets de l'autre. Surtout que les derniers mots d'Elizabeth semblèrent toucher le coeur de Declan d'une façon dont-il ne se serait pas douté. Il changea alors de visage et fut réellement attristé de ces paroles qu'il entendait encore. Il se redressa, levant sa main de la branche pour se tenir droit comme un piquet, pris au vif. « Peut-être que je n'ai plus de raison de croire en mon propre bonheur. » Declan disait la vérité et ne pouvait être plus sérieux qu'à cet instant. La douleur lui broyait les entrailles mais il était bien décidé à répondre à Elizabeth, puisqu'elle voulait des réponses. Donnant donnant. « Et puisque je ne peux pas m'occuper de moi-même, je perds mon temps à essayer de retrouver le bonheur des autres. » Il recula d'un pas, puis deux. « Si vous préférez laisser filer le bonheur comme je l'ai fait pour moi-même, alors faites. Avec un peu de chance, vous finirez comme moi. »

L'éclat de rire, si il surprit légèrement Elizabeth de la part de quelqu'un qui venait s'excuser, ne l'atteignit pas autant qu'il aurait pu. Elle supposa amèrement qu'elle commençait à s'y habituer et, même si généralement c'était fait de manière plus discrète, elle n'était pas assez naïve pour croire que les gens ne s'amusaient pas de son obstination à défendre son mari. Peut être que ce fut ce qui l'énerva assez pour jeter toutes ces rumeurs au visage de Declan, lui rappelant finalement qu'elle n'était peut être pas la plus mal lotie des deux. Et aussitôt, le visage de l'homme se décomposa. Ce fut si brusque qu'au fond d'elle elle savait que ce ne pouvait être feint. Elle avait véritablement touché un point sensible et, au lieu de s'en réjouir, elle s'en voulu. Après tout, il n'avait rien fait pour mériter qu'elle se montre aussi agressive. A aucun moment elle ne pensa que c'était précisément ce qu'il venait de faire en mettant le sujet de l'adultère de son époux sur la table. Declan adopta le même ton qu'un peu plus tôt alors qu'ils étaient tous deux assis sur la rive et, cette fois, elle se retint de ne pas lui prendre la main de nouveau.

Et encore une fois, on en revenait à la notion d'espoir. Alors qu'Elizabeth croyait encore en un possible bonheur, Declan avait laissé tombé. Il ne voulait apparemment plus croire que quelqu'un puisse valoir le coup de se battre, plus croire que quelqu'un puisse l'aimer, plus croire qu'il puisse un jour être heureux. Et à quoi rimait tout ça ? Quel était donc le point de rester en vie si on ne croyait pas que les choses pouvaient un jour s'améliorer ? De ce qu'il disait, sa seule motivation était donc de rendre les autres heureux. Vu de l'extérieur cela paraissait être assez, seulement la comtesse avait l'intime conviction que ça ne l'était pas. C'était ce qu'elle était en train de faire au château, jouant son rôle à la perfection pour protéger le bonheur de son mari et de sa maîtresse. Et elle détestait ça. Elle les haïssait et se haïssait elle-même de plus en plus à cause de cette constante comédie. Et c'était pour ça qu'elle ne voulait pas que Declan parte. Parce que, peut être, avec lui elle n'aurait pas besoin de jouer ce rôle qu'on lui imposait. Seulement elle n'arrivait pas à retirer son masque de comédienne aussi facilement que cela.

Pourtant, dès qu'il fit quelque pas en arrière, son bras se leva instinctivement vers lui comme pour le retenir, avant qu'elle ne fige sa main en l'air et la laisse retomber contre son corps. C'était idiot, une minute avant elle le fuyait et voilà maintenant qu'elle recherchait sa compagnie ? Depuis quand était-elle devenue une telle girouette ? « Je suis désolée. Je n'aurais pas du parler de ça. Après tout, si on est ici c'est parce qu'on cherche tous les deux à échapper à ce genre de rumeurs non ? » Elle offrit un mince sourire à Declan, espérant par là prouver qu'elle regrettait sincèrement. Une chose était sure : elle ne voulait pas finir comme lui. Il n'y avait rien de méchant ou condescendant dans cette affirmation seulement l'envie de garder espoir. Et aussi vite qu'elle était venue, la comtesse Elizabeth repartit pour laisser la place à la petite Lizzie. Peut être qu'un jour elle apprendrait à ne pas se laisser adoucir aussi facilement mais ce n'était surement pas pour aujourd'hui. Tout ce qu'elle pouvait voir en ce moment, c'était qu'elle était responsable du malheur d'autrui et elle n'avait jamais pu le supporter. « Je n'ai aucune envie de le laisser filer seulement je ne sais même pas encore où il est. C'est bien généreux à vous d'aider les autres à le trouver mais vous, qui vous aidera en retour ? »

Declan avait bien vu la main d'Elizabeth qui cherchait à attraper son bras. Elle s'était arrêtée en plein élan et le sorcier fit comme s'il n'avait rien vu. Il l'écouta parler et elle avait raison. Tous deux cherchaient à échapper aux rumeurs et voilà qu'ils s'étaient enfermés dans une sorte d'arène, se lançant chacun à la figure les ragots qui courraient sur l'autre. Declan décida donc de se montrer bien plus calme, moins fougueux. Il n'allait plus chercher à pousser la comtesse à l'extrême mais se tiendrait prêt si elle désirait lâcher le masque qu'elle portait - encore fallait-il qu'elle veuille se rebeller en l'utilisant, lui. « Vous avez entièrement raison. Et je crois que ma grande solitude me joue parfois des tours, sur ma façon d'être envers les autres. Je m'en excuse, une nouvelle fois. » Sincère ou non ? Il y avait une part de vrai là-dedans. Seulement, sa vérité était utilisée avec intelligence. S'il pouvait obtenir ce qu'il désirait en étant franc, alors soit, il le ferait. Il n'ouvrait pas totalement son cœur après tout. Ce n'était pas comme s'il devait se lancer dans une relation sérieuse avec cette jeune femme. Sa vie n'allait pas être mise en danger juste parce qu'elle tenait compagnie au sorcier. Seuls les proches de Declan traversaient des périodes de malheurs et c'est pour cette raison que le sorcier refusait toute attache. Elizabeth n'était pas une prétendante à qui il voulait faire la cour pour vivre une folle histoire romantique, loin de là.

La discussion reprit entre les deux étrangers qui apprenaient à se connaître à travers quelques échanges d'opinions. Le bonheur avait été mis sur le tapis et Declan mettait en garde Elizabeth suite à sa propre expérience personnelle. Il se refusait une vie de bien-être et finissait par avoir un caractère parfois déplorable. La comtesse rectifia les dires de Declan en précisant qu'elle ne laissait pas filer le bonheur. Au contraire, celui-ci ne semblait pas frapper à sa porte. Puis, peut-être par curiosité, elle demanda au sorcier si quelqu'un s'occupait de lui. Il eut un très bref sourire et soupira en relâchant ses épaules. « Je n'ai pas besoin qu'on s'occupe de moi. Je suis une âme déchue, errante. Je ne suis plus qu'une ombre, alors, je me fiche totalement qu'on se soucie de mon bien-être ou non. Tant que ma famille est en paix, c'est tout ce qui m'importe. Je ne me refuse cependant pas quelques bons moments de temps en temps, comme aujourd'hui, à profiter de la nature et de cette conversation. » Il était plus doux, moins agressif, moins envahissant. « Pour votre bonheur, peut-être que vous ne cherchez pas au bon endroit. Peut-être que vous vous focalisez uniquement sur un point. C'est tout à fait plausible, mais qu'en sais-je, je ne suis pas philosophe ni devin malgré mon statut de sorcier. »