Et voilà que l’inconnu sur qui j'étais tombé me fuyait comme la peste à présent. J'aurais pu en rester là me taire et le laisser partir, au lieu de ça je marchais dans la même direction, pressant mes pas afin de rattraper mon retard. Je ne comptais pas en rester là... J'en ignorais encore la raison mais je finirais bien par la découvrir tôt ou tard...

J'étais curieuse, un peu trop ça faisait partie de mes défauts et je le vivais très bien. Peut-être trop... En voyant que le jeune homme partait quand je ne lui donnais pas ce qu'il voulait ou ce à quoi il s'attendait, je me demandais s'il avait déjà été repoussé avant. Sa réponse ne se fit pas attendre et son ton me faisait bien comprendre de lâcher l'affaire...

- Oui, ça m'est arrivé. Et comme maintenant, je m'en vais... au lieu d'attendre que les minutes passent.

La pluie cessait peu à peu de tomber, mais des gouttes d'eau tombaient encore en provenance des arbres bordant le sentier. En le voyant réagir comme ça je pensais avoir vexé le jeune homme. J'avais encore du mal avec les convenances sociales. Et mon caractère ne m'aidait pas vraiment...

- Je ne suis absolument pas vexé. J'ai juste décidé d'abandonner la partie.

- Vous abandonnez facilement...

J'avais plutôt murmuré ça, ne sachant pas et ne cherchant pas à savoir si le jeune homme l'avait attendu mais je trouvais ça dommage, qu'il se décourage si facilement, j'espérais qu'il ne faisait pas ça pour tout... Enfin ce n'était pas mon problème et pourtant je me surpris à avoir de la peine pour cette personne que je ne connaissais absolument pas...
Et quand je lui demandais son nom, il ne tarda pas à me le donner, comme si j'allais me satisfaire d'un nom et abandonner la partie aussi facilement que lui...

- Declan Weathers. Voilà, vous me connaissez sûrement, alors...

En entendant son nom mon pied heurta une racine et je manquai de peu de tomber me rattrapant au coude du jeune homme. Mon ancien "maître" m'avait parlé d'un sorcier qu'il n'appréciait vraiment pas, prétextant que lui aussi était né sorcier et pourtant... Il n'avait jamais terminé sa phrase, mais j'étais sûre qu'il était jaloux des pouvoirs qu'avait Declan, après tout mon ancien "maître" n'avait jamais été très puissant, je n'avais jamais compris pourquoi...

- Un sorcier... C'est bien ma veine ça !

J'en quittais un pour tomber sur un autre.... Je n'avais vraiment pas de bol... Je ne savais pas si Declan savait ce que j'étais ou qui j'étais, après tout mon apparence était des plus normales, qui pouvaient réellement comprendre ce que j'étais, un autre Sorcier ? Comment pourrais-je le savoir je n'avais pas connu d'autre sorcier avant de connaître Declan.

- Quand je suis tombé pourquoi ne vous êtes pas dispersés ou évaporés, enfin le truc que vous faites à la dernière minute ?

C'est ce qu'aurait fait mon ancien "maître" il m'aurait laissé m'écraser sur le sol. Il ne se serait pas donné la peine de me soigner sauf si mes blessures auraient été mortelles, sinon qui allait le protéger... Je n'avais pas peur des sorciers, je ne pouvais pas vraiment faire mon opinion sur ces derniers sachant que je n'en connaissaient qu'un jusque-là...

Declan eut un rire en écoutant la jeune femme parler. Il avait l'impression qu'elle cherchait vraiment à se laisser séduire par sa personne. Il lui lança un bref regard, pour la jauger un peu et voir quelle tête elle affichait à cet instant. « Bien-sûr que j'abandonne rapidement. Je ne vais pas perdre mon temps pour rien. Alors, à moins que vous ayez envie de faire un petit peu la fête, non, je ne vais pas continuer à vous séduire. » Autant indiquer clairement ses intentions. Et il décida de continuer sur sa lancée. « Je ne cherche pas l'amour alors, pourquoi je devrais continuer à me battre pour une simple partie de jambes en l'air ? » Bon, Declan n'était pas réputé pour avoir la langue dans sa poche. Il disait ce qu'il pensait sans se soucier de comment il serait perçu par son entourage. En plus, il riait. Il s'amusait lui-même de ce qu'il disait, parce que, après tout, il n'avait besoin d'aucune femme pour lui tenir compagnie au delà de quelques heures. Se battre, non mais... il en riait encore sans s'arrêter.

Il dut attendre un bon petit moment avant de se calmer et pouvoir se présenter sans être secoué de rires involontaires. Cette femme le faisait décidément rire, mais peut-être pas de la façon dont celle-ci l'aurait préféré. Declan se moquait ouvertement de son attitude et surtout de ses paroles. Il méritait bien une gifle. Bref. Il balança son nom à la figure de l'inconnue qui manqua de tomber à cause d'une racine d'arbre. Elle se retint alors au coude du sorcier qui ne l'aida même pas, figé, la laissant s'accrocher comme elle pouvait à lui. Declan aurait même pu tirer sur son bras pour laisser la jeune femme se débrouiller par elle-même, mais il n'était pas méchant à ce point. Bien qu'elle commençait à le coller un peu trop...

La jeune femme était ravie de tomber sur un sorcier et le fit comprendre à Declan qui lui adressa un sourire forcé, chargé de sarcasmes. Elle ne tarda pas à lui poser de nouvelles questions, étonnée qu'il ne se soit pas volatilisé lorsqu'elle l'avait écrasé de tout son poids au sol. Il haussa les épaules et se tourna vers elle, adoptant une moue exagérée. Il faisait comme s'il était plongé en pleine réflexion et fronça le nez en secouant la tête. « Peut-être que je ne suis pas comme les autres sorciers, allez savoir ! » Il avança près d'elle, la surplombant de toute sa hauteur. « Si vous savez qui je suis, pourquoi continuez-vous de me suivre ? Pourquoi ne partez-vous donc pas en courant ? »

Plus la conversation avancée, plus le sorcier riait, je ne pensais pas être si drôle, mais je compris bien vite que ce n'était que pure moquerie... Quand je lâchais que le jeune homme abandonné vite, il me jeta un regard comme s'il cherchait à me jauger, je me contentais de hausser les sourcils en le regardant à mon tour.

- Bien-sûr que j'abandonne rapidement. Je ne vais pas perdre mon temps pour rien. Alors, à moins que vous ayez envie de faire un petit peu la fête, non, je ne vais pas continuer à vous séduire. Je ne cherche pas l'amour alors, pourquoi je devrais continuer à me battre pour une simple partie de jambes en l'air ?

- Et bien c'est charmant !

Une personne normale, l'aurait incendié voir même gifler pour de tels propos, mais pas moi je continuais à marcher essayant de garder le rythme jusqu'à ce que je heurte cette racine. Le jeune homme ne fit aucun geste pour m'aider au contraire il ne bougea pas, j'arrivais pourtant à me rattraper à son bras. Et je tentais de regagner rapidement mon équilibre.

Je commençais de plus en plus à comprendre pourquoi il était seul, s'il se comportait comme cela avec tout le monde ça ne m'étonnait guère qu'il se retrouve seul. Pourtant quelque chose me disait que cette solitude qu'il semblait temps aimé lui peser quand même...

Puis je l'interrogeai sur le fait qu'il ne se soit pas dispersé quand je l'avais heurté, après tout je ne connaissais pas des masses de sorciers, mais tous ceux que je connaissais n'auraient pas pris un tel risque, bien au contraire.

- Peut-être que je ne suis pas comme les autres sorciers, allez savoir !

- Merci j'avais cru comprendre...

Puis il s'avança vers moi, ne sachant pas à quoi m'attendre je me raidis légèrement, j'étais méfiante de nature et puis ce jeune homme est un sorcier alors... Il valait mieux rester sur ses gardes, je serrais légèrement les poings... J'étais toujours prête à en découdre quel que soit mon adversaire.

- Si vous savez qui je suis, pourquoi continuez-vous de me suivre ? Pourquoi ne partez-vous donc pas en courant ?

Je me détendis légèrement, pourquoi je continuais à le suivre ? Parce que je n'avais rien d'autre ni de mieux à faire et parce que nous étions au milieu d'une conversation... Pensait-il que tout le monde le détestait ? Je n'étais pas tout le monde...

- Et ? Vous pensez m'effrayer ? Croyez le ou non mais je suis habituée au sorcier, enfin à un plus précisément.

Je savais très bien que je le déranger et pourtant je voulais en savoir plus, et si on oublier son air grognon et ses remarques il était de bonne compagnie. Et puis mon ancien "propriétaire" craignait le sorcier, alors si jamais il me retrouvait, il n'oserait pas vraiment mettre son grain de sel et tenter de me faire revenir.

Declan faisait bien une tête de plus que moi, alors je tentais de me grandir, et de rendre ma voix la plus neutre possible, et c'est avec un regard de défi que je tentais de paraître un peu plus farouche ce qui était loin d'être gagné...

- J'ai peut-être tort mais vous ne faites pas peur...plutôt de la peine en fait...

Je n'étais pas cassante, et j'étais sûre que je paierais cher pour cet aveu, mais c'était plus une remarque ce que je pensais vraiment, un témoignage de ma franchise qui en général n'était pas accepté. Après tout on dit bien qu'on accepte l'amour qu'on pense mériter, et vu comment se comporter le jeune homme je me demandais bien qu'elle image de lui il pouvait bien avoir...

Declan aurait bien voulu effrayer la demoiselle, mais elle ne semblait pas très inquiète au sujet des sorciers et en évoqua même un, sans dévoiler son identité. Les traits de Declan devinrent sombre. Il connaissait peu de sorciers aux alentours et avait toujours peur de revoir un ami du passé. Un ami qui était devenu un ennemi. Le sorcier soupira, chassant de son esprit toutes les images qui faisaient références à ces mauvais souvenirs. Il ne voulait même pas demander à l'inconnue quel était le nom de son sorcier. Et celui-ci ne devait pas être très agréable, vu comment elle s'exprimait au sujet des sorciers en général. Peut-être qu'il avait été son compagnon, allez savoir. Declan n'en avait rien à faire.... non, en fait, il était curieux mais ne posa pas de questions. Pas tout de suite en tout cas.

Il restait là, face à Ilyia, écoutant ce qu'elle avait à lui dire. Il lui faisait de la peine ? Tiens donc. Et pourquoi, au juste ? Il croisa les bras, soudainement intrigué. Était-ce encore au sujet de ses relations intimes ? Declan faisait ce qu'il voulait et il n'avait de compte à rendre à personne. « Oh, voyez-vous ça ! Et qu'est-ce qui vous donne envie de vous apitoyer sur mon sort ? Si c'est encore au sujet de mes aventures d'un soir, ça ne regarde que moi et je me contente de cette vie qui me convient parfaitement. » Enfin, parfaitement... c'était vite dit. Disons plutôt que Declan n'était pas prêt à se lancer dans une relation et ne pensait pas l'être avant très très longtemps - peut-être à l'aube de sa mort, qui sait ? Lorsqu'il ne serait plus qu'une vieille chose incapable de penser correctement. « Alors, dites-moi, pourquoi je vous fais de la peine ? Que savez-vous de moi au final ? Vous m'êtes tombée dessus par hasard, on a échangé trois mots et je vous fais pitié ? Pour quelle raison ? »

Impatient d'entendre les confessions de l'inconnue, Declan gardait les bras croisés, le dos droit comme un piquet, les jambes légèrement écartés. Et il se balançait un peu d'avant en arrière, incapable de rester tranquille ne serait-ce que pour discuter. Le sorcier avait sans cesse besoin de bouger, de se sentir vivant. « Et quel est votre nom ? Que je sache au moins à qui je m'adresse. »

S'il avait tenté de me faire peur c'était bel et bien raté, je n'avais pas peur des sorciers, peut-être parce que celui que j'avais connu n'avait rien de vraiment effrayant. Plutôt pathétique mais pas effrayant, quant à Declan il ne me faisait pas peur, mais j’éprouvais une certaine méfiance à son égard...

Et le jeune homme restait là à me faire face, me surplombant de sa hauteur, écoutant ce que je disais, prêtant même attention aux mots que j'employais, c'était une première, alors que je balançais tout ce qui me passait pas la tête, ma franchise en action.

- Oh, voyez-vous ça ! Et qu'est-ce qui vous donne envie de vous apitoyer sur mon sort ? Si c'est encore au sujet de mes aventures d'un soir, ça ne regarde que moi et je me contente de cette vie qui me convient parfaitement.

Vraiment ça lui convenait ? Si ça lui convenait tant que ça pourquoi prenait-il le temps de me demander pourquoi il me faisait de la peine, il serait tout simplement partis s'il s'en fichait royalement, je restais donc planter là à mon tour.

- Alors, dites-moi, pourquoi je vous fais de la peine ? Que savez-vous de moi au final ? Vous m'êtes tombée dessus par hasard, on a échangé trois mots et je vous fais pitié ? Pour quelle raison ?

- Parce qu'à faire ça vous finirez seul. Voilà pourquoi vous me faite de la peine, vivre dans la solitude et mourir dans la solitude ce n'est pas un bon moyen pour vivre votre vie. Personne ne mérite ça...

Pourquoi je m'en mêlai au fait ? Je ne le connaissais pas ? Pourquoi est-ce que je tentais de vouloir régler les problèmes que pouvait avoir le jeune homme. J'étais supposé veiller sur un sorcier d'accord mais là ce n'était même pas le même ?

Deux opposés autant physiquement que moralement pour le peu que je connaissais Declan... C'était pourtant simple de se taire et de partir en silence, mais j'avais fait ça tellement de fois, qu'une fois libre j'avais du mal à me contenir.

- Et quel est votre nom ? Que je sache au moins à qui je m'adresse.

Je relevais la tête vers le jeune homme, un nom, une des premières choses que mon ancien "propriétaire" c'était empressé de faire... Sur ça non plus je n'avais pas eu mon mot à dire...

- Zéphyr c'est le nom qu'on m'a donné...

J'attendais patiemment la réaction du jeune homme, le regardant droit dans les yeux, m'imaginant plusieurs scénarios possibles sur sa potentielle réaction...

Finir seul ? Et bien tant mieux ! Declan n'en espérait pas moins, dans sa petite tête de masochiste qu'il était. S'il disait oui au bonheur, à la joyeuseté, il était persuadé qu'on le lui reprendrait bien vite. Cette idée, cette théorie, était ancrée dans sa tête et ce n'était certainement pas une inconnue qui lui ouvrirait les yeux à ce sujet. Il avait déjà tenu quelques discussions concernant le bonheur et toutes ces belles choses qu'il ne pouvait obtenir et franchement, c'était son problème. C'était sa vie privée, personne ne devait lui dire quoi faire ni comment agir envers autrui. Qui était cette femme pour s'apitoyer sur son sort avec insistance ? Personne. Declan soupira une nouvelle fois, ne comptant plus le nombre de fois qu'il l'avait fait. L'inconnue se présenta sous le nom de Zéphyr. Drôle de nom. Declan leva les yeux au ciel, se demandant bien d'où cette femme sortait. « Zéphyr ? C'est quoi ça ? Un nom de fée ? » Avec la chance qu'il avait, le sorcier pensait qu'on tentait de lui refiler une autre petite créature ailée pour l'accompagner dans sa petite vie misérable. « Ou vous êtes une sorte de créature ? Ah non, je sais ! » Elle disait "le nom que l'on m'a donné", alors, il songea à une idée saugrenu. « Un sorcier vous a fabriqué et vous a donné le nom de Zéphyr ! Et il aurait un peu trop forcé sur la dose de bons sentiments, puisque vous vous obstinez à être peinée pour moi.»

Après tout, qui était-elle pour vouloir suivre un inconnu, sorcier qui plus est, et lui donner des conseils sans même connaître sa vie en détail ? Cette Zéphyr ne savait rien de lui, de son passé. Declan s'approcha près d'elle, à quelques centimètres. S'il pouvait l'intimider avec un simple regard, il en serait très ravi. « Maintenant, vous allez arrêter de me suivre en me disant ce que vous pensez de ma condition de vie, est-ce bien clair ? Que vous me suiviez, encore, à la limite, je m'en fiche. Mais ne me dites plus que je vous fais de la peine. Vous ne savez absolument rien de ma vie, rien ! Vous ne savez pas si je suis un sorcier bénéfique ou maléfique. Qui sait, je suis peut-être même prêt à vous tuer si vous parlez trop. Vous en pensez quoi ? Vous voulez encore me dire que vous êtes triste de mon sort ? Vous pensez que je vais verser une petite larme et me confier à vous ? Qui que vous soyez, vous avez tort de penser ça. » Il se fichait bien d'être blessant ou non, après tout, Zéphyr avait affaire à Declan Weathers et non à un quelconque prince écervelé. « Je mène une vie qui me convient. Si le malheur me permet d'avancer, alors laissez-moi continuer dans cette voie-là. » Sur ces dernières paroles, il tourna les talons, prêt à continuer son chemin, agacé.

Visiblement lui dire le fond de ma pensée ne rimait à rien, j'aurais du m'y attendre je n'étais personne pour lui... C'était sa vie après tout, pourquoi je voulais à tout prix lui éviter de finir seul et malheureux, après tout s'il se suffisait à lui-même ça ne me regardait pas...

Quand il me demanda mon nom, je ne tardai pas à répondre précisant que je ne l'avais pas choisi... La réaction du jeune homme ne se fit pas attendre levant les yeux au ciel, il ne manquait plus qu'un petit rire moqueur, et il ne tarda pas à prendre la parole.

- Zéphyr ? C'est quoi ça ? Un nom de fée ? Ou vous êtes une sorte de créature ? Ah non, je sais !

Je levais les yeux au ciel en l'entendant me traiter de fée... Avant de lui accorder toute mon attention en l'entendant dire que j'étais une créature... Puis il ne tarda pas à s'exclamer qu'il savait ce que j'étais ? C'était si évident que ça ?

- Un sorcier vous a fabriqué et vous a donné le nom de Zéphyr ! Et il aurait un peu trop forcé sur la dose de bons sentiments, puisque vous vous obstinez à être peinée pour moi.

Je le foudroyais du regard, comme si mon comportement allait changer quelque chose, c'était stupide, mais en même temps il avait en partie raison, j'avais bel et bien été créé par un sorcier, mais...

- Non il n'a pas forcé sur les "bons sentiments " comme vous dites ! J'ai eu de la peine pour vous voilà tout !

Je ne savais pas vraiment à quoi je m'attendais, je l'avais trouvé gentil de ne pas me laisser tomber au sol alors qu'il aurait pu, n'ayant pas de pouvoirs magiques je ne pouvais pas prendre la peine des gens et l'effacer, je ne savais même pas si c'était possible... J'avais tenté de le "raisonner" à ma manière, mais le résultat était loin d'être concluant...

Puis je vis le jeune homme s'approcher à nouveau, mais ce coup-ci je ressentais l'hostilité dont il faisait preuve. N'importe qui aurait pu s'en rendre compte, je n'aimais soudainement pas cette proximité.

- Maintenant, vous allez arrêter de me suivre en me disant ce que vous pensez de ma condition de vie, est-ce bien clair ? Que vous me suiviez, encore, à la limite, je m'en fiche. Mais ne me dites plus que je vous fais de la peine. Vous ne savez absolument rien de ma vie, rien ! Vous ne savez pas si je suis un sorcier bénéfique ou maléfique. Qui sait, je suis peut-être même prêt à vous tuer si vous parlez trop. Vous en pensez quoi ? Vous voulez encore me dire que vous êtes triste de mon sort ? Vous pensez que je vais verser une petite larme et me confier à vous ? Qui que vous soyez, vous avez tort de penser ça.

N'appréciant absolument pas la tournure que prenait les événements, mais ne voulant pas reculer devant le jeune homme, il ne me faisait pas peur, hors de question de le laisser faire je relevais mes bras avant de prendre appui sur son torse avant de le repousser.

- Me tuer et bien qu'est ce que vous attendez puisque cette idée à l'air de vous réjouir ! Je vous ai dit ce que je pensais, au moins j'ai osé être franche avec vous, à quand remonte la dernière fois que quelqu'un à oser faire une telle chose ?

- Je mène une vie qui me convient. Si le malheur me permet d'avancer, alors laissez-moi continuer dans cette voie-là.

Avant même que je n'ai eu le temps de répliquer il reprenait son chemin, je restais immobile quelque seconde, avant d'entendre un craquement, ce n'était probablement rien, vu le temps qui faisait qui serait assez fou pour sortir, je préférais pas attendre avant de me remettre à marcher me retrouvant derrière le jeune homme, qu'allait-il me dire qu'allait-il faire ? se mettre à nouveau en colère ? grand bien lui fasse...

Cette jeune femme parlait toujours de peine. Declan se fermait comme une huître et refusait que l'on s’apitoie sur son sort, surtout que Zéphyr était une parfaite inconnue. Il ne savait rien d'elle, elle ne savait presque rien de lui. Comment accepter l'aide d'une étrangère alors qu'il refusait même celle de ses proches amis ? Declan était ainsi et il fallait l'apprendre à ses dépends. Il était un homme froid, distant et repoussait volontiers toutes sympathies de la part des autres. Il pouvait se montrer mauvais, blessant, voir menaçant, juste pour être sûr de ne jamais se faire d'amis, pour rester seul et surtout pour ne risquer la vie de personne dans son entourage. Voyez comment cet homme avait fini par devenir, après avoir été proche d'une mauvaise personne, qui lui avait mis de mauvaises idées en tête. Declan n'en était même pas conscient. Sa vie n'était pas maudite. Les malheurs arrivaient, comme à n'importe qui et ce n'était pas une fatalité. Mais le sorcier s'était tellement persuadé de ne pas pouvoir être heureux qu'il rejetait systématiquement les gens, sympathiques ou non. Cette pauvre Zéphyr n'avait rien demandé, après tout. Il l'avait charmé, elle n'avait pas suivi, il s'était lassé et était déjà prêt à partir, comme si de rien était. Declan aurait pu au moins se montrer plus courtois, mais non.

Il entama alors un petit discours pour tenter de faire fuir une bonne fois pour toute la jeune femme. Ses veines battaient dans son cou et sur son front tant il était habité par la colère. Apprendre à se défendre et se battre en même temps, pour être le plus horrible possible, le mettait dans un état de nervosité presque extrême. Et apparemment, son petit numéro faisait réagir Zéphyr, qui se fichait bien que le sorcier veuille la tuer. Elle répliqua ensuite, se défendant à son tour. Mais Declan se fichait de toutes ces paroles, il ne pouvait pas se montrer abordable, c'était impossible. Alors, il fit quelques pas en arrière avant de reprendre son chemin, les poings serrés. Il détestait être ainsi, mais c'était pour le bien de tous. Zéphyr n'était pas en faute dans cette histoire. Elle avait juste eu le malheur d'être tombée sur un homme torturé qui n'acceptait aucune aide extérieure à sa famille et à ses très proches et rares amis. Cependant, sa dernière phrase le fit réagir. J'ai osé être franche avec vous, à quand remonte la dernière fois que quelqu'un a osé faire une telle chose ? Declan serrait la mâchoire, à s'en faire craquer les os. « Je ne vous permets pas de penser que mon entourage n'est pas franc avec moi. Vous ne les connaissez pas.» Malgré sa réponse, il commençait à mettre en doute sa naïveté. Et s'il avait fait une erreur en laissant entrer quelques personnes dans sa vie ? Après tout, il avait déjà montré ses faiblesses par le passé et l'avait payé très cher, au point de devenir cet être exécrable qu'il était aujourd'hui. Au final, il tourna les talons, lançant une nouvelle réplique qui montrait clairement qu'il n'avait pas besoin d'aide. Et il ne parla plus, décidé à ignorer la présence de la jeune femme derrière lui.

Je le suivais toujours, un choix légèrement forcé puisque d'un côté se trouvait Declan, de l'autre se trouvait mon ancienne maison... La question de ma future direction ne se posait même pas. S'il pensait qu'un discours et des menaces allait me faire fuir il me connaissait mal, même très très mal.

Qu'il soit capable de me tuer était une possibilité, mais de là à ce qu'il le fasse c'était une autre histoire. Et puis me tuer pour ça, c'était accorder à mes mots bien plus d'importance qu'il n'en avait réellement... Donc je n'étais pas loin du compte puisqu'il prenait toutes mes remarques personnellement...

- Je ne vous permets pas de penser que mon entourage n'est pas franc avec moi. Vous ne les connaissez pas.

Je réfléchis pendant quelques secondes à ce que j'avais dit à aucun moment je n'avais mentionné ni sa famille ni ses amis, je continuais de marcher tranquillement derrière lui, pensait-il vraiment n'avoir besoin de l'aide de personne ? On finit toujours par avoir besoin d'aide un jour, il ne faut pas laisser passer sa chance sous prétexte qu'on n'est pas prêt pour ça...

- Je parlais des gens en général, pas de votre entourage, si vous étiez moins braqués vous l'auriez remarqué.

Mon ton était neutre limite chantant, je ne comprenais pas pourquoi il se fermait autant et se braquer comme ça. Ce n'était pas mon problème bien au contraire, mais malgré ce que j'avais vécu avec mon créateur j'avais préféré ne pas juger tous les sorciers de la même façon...

Visiblement le jeune homme ne semblait plus s'en prendre à moi malgré le fait que je sois toujours derrière lui, il avait surement choisi de m'ignorer, j'avais tenté de l'aider, de faire en sorte qu'il sorte toute cette rage et peine qu'il avait en lui et pour résultat il m'ignorait simplement ?

- Non mais je rêve là. Vous m'ignorez ?

Bien... Puisqu'il le prenait comme ça... M'ennuyant rapidement je soupirais avant de me mettre à siffloter, s'il veux jouer à ça, on va être deux. J'imaginais déjà la suite, il allait encore s'énerver et s'en prendre à moi, grand bien lui fasse, s'il ne comprenait pas tout de suite que je ne voulais que l'aider à aller de l'avant, il finirait bien par comprendre plus tard que j'agissais pour son bien... Et comme je sentais qu'il n'allait pas tarder à râler je pris la parole.

- Me dites pas que m'entendre siffler vous énerve ?

Declan avait réagi au quart de tour en pensant que Zéphyr puisse parler de ses proches amis. Comme quoi, le sorcier avait beau se faire passer pour un homme mauvais et solitaire, dès qu'il laissait des personnes entrer dans sa vie, un fort lien se tissait avec eux et il pouvait se montrer très protecteur. C'était également la raison pour laquelle il ne voulait pas trop se laisser envahir dans sa vie sociale. Declan avait une facilité d'attachement assez exceptionnelle. S'il arrivait quoi que ce soit à son entourage, le sorcier s'en tiendrait responsable. Il se pensait maudit, porteur de malheurs, capable de menacer la vie de ses amis involontairement, juste en les laissant entrer dans son univers. C'était triste mais rien n'avait encore prouvé à Declan qu'il n'était pas le coupable. Sa famille ne cessait d’enchaîner les mauvaises passes depuis qu'il les avait rejoins à la mort de leurs parents. Comment pouvait-il apaiser son esprit ? Comment pouvait-il réaliser que tout ce qu'on avait pu lui dire n'était que mensonge ? Malheureusement, ce ne serait pas Zéphyr qui pourrait lui apporter la paix. Il ne la connaissait pas, elle ne le connaissait pas. Declan ne pourrait donc pas lui faire assez confiance si elle venait à lui dire qu'il n'avait rien à se reprocher pour les malheurs qui avaient frappé sa famille ces dernières années. Personne ne le pouvait réellement... à part peut-être quelqu'un d'assez proche pour lui ouvrir les yeux, une bonne fois pour toute.

Declan essayait d'apaiser sa colère en marchant et en ignorant la jeune femme qui le suivait. Celle-ci ne semblait d'ailleurs pas apprécier ce mutisme et se mit à siffler. Le sorcier ne dit cependant rien mais soupira légèrement. Pourquoi avait-il fallu qu'il tente de la séduire ? S'il s'était montré agressif d'entrée de jeu, peut-être qu'il n'aurait pas à subir la présence de cette parfaite inconnue. Elle ne semblait pas bien méchante, mais pourquoi continuait-elle de ne suivre ? « Vous comptez vous attacher à moi aussi, pendant que vous y êtes ? » Il lui lança un regard en biais mais ne s'arrêta pas de marcher pour autant. « Vous me suivez pour quoi au juste ? Vous avez besoin d'un sorcier ? Vous avez craqué sur moi ?» Peut-être avait-elle était séduite en fin de compte. Declan ne pouvait pas deviner ce qui motivait Zéphyr à rester derrière lui. « Vous savez, il y a des tas d'hommes seuls et beaucoup plus désespérés que moi dans le coin. Si vous voulez en trouver, rendez-vous à la taverne. »