A force de se tourner autour, ces deux-là finiraient bien par se rentrer dedans, de manière abrupte et charnelle. Pour des observateurs extérieurs, cela était évident. Pour les principaux intéressés, cela paraissait impossible. Il était vrai que Galaad ressentait une certaine attraction pour Mahélia, c’était une femme d’une grande beauté. Si seulement c’était une femme. Et qu’elle n’avait pas ce caractère vif et piquant, qui lui allait si bien. Il but une gorgée de son vin, chassant cette pensée. C’était ça, être à ses côtés, la sentir non loin. Mahélia l’avait toujours fascinée. Gamin, pour l’inconnue qu’elle était, le mystère qui l’entourait. Adulte, pour tout ce qu’il avait appris sur elle. La raison cherchait à l’empêcher de s’approcher du génie. Parce qu’elle l’avait mise au monde, que c’était une chieuse de première, qu’elle n’était pas humaine. Pourtant, elle était le seul point fixe qui lui restait dans sa vie, seule figure familière, femme qui savait tout de lui, aussi frustrant ce fait soit-il. Il ne lui faisait, de manière générale, pas confiance, sans cesse sur ses gardes, connaissant la propension du génie à s’attirer de mauvaises histoires. Mais même si elle restait une présence agaçante, Galaad était apaisé en sa présence. C’était un fait indéniable. « Si tu veux tellement de moi sur ton dos tu n'as qu'à le dire, tu sais ? Pas besoin de m'affamer. » Il lui offrit un sourire goguenard, prêt à ne pas se laisser faire, si le besoin s’en faisait sentir. Car oui, à forcer de se tourner autour, ils finiraient bien par déraper.

En attendant, il veillait sur elle, sur son état. Ou plus exactement, il tentait de comprendre ce qui n’allait pas. Il aurait été le plus heureux des hommes, si elle crevait – plus de visite à l’improviste, cette joie. Mais elle restait tout de même une personne importante, à laquelle il ne pouvait s’empêcher de noter les dissonances qu’il attrapait. Mahélia était une sale gosse capricieuse. Mais elle fonctionnait suivant un rituel bien défini, reconnaissable. Il n’était pas dupe. « J'ai tendance à mieux me débrouiller quand je travaille seule, c'est vrai. » Galaad hocha la tête, n’en doutant pas une seconde. Qui avait besoin de compagnon, quand son être se composait de magie ? Plus que quiconque, cependant, il comprenait les bienfaits de la solitude, qu’il appréciait un peu trop pour son propre bien. Et, s’il devait se joindre à Mahélia, il ne doutait pas une seule seconde qu’il serait un poids pour elle. Galaad ne voulait pas lui donner la chance, ni la satisfaction à la blonde sulfureuse de se sentir supérieur à lui. Il la subissait bien assez comme ça. « Quelques mois, tout au plus. » Il ne cacha pas son expression de douleur, il n’eut pas le temps. Galaad se tourna vers elle, les sourcils froncés. Est-ce que c’était sa punition pour avoir chassé les créatures du monde des contes ? Il n’était pas prêt pour ça. « Evite de te précipiter. Avec un peu de chance, ça ne prendra que quelques semaines. » Il y eut un blanc, durant lequel il réalisa l’improbable de ce qu’il venait de dire. Avec les Charmings qui s’occupaient de les sauver, ils finiraient en poussière avant qu’ils ne retrouvent le sol fertile de la forêt enchantée. « Mouais. » Pessimiste, il pinça les lèvres. « Ou pas. » Galaad fini son verre de vin d’une traite, marmonnant une insulte sur la situation actuelle, tout en se redressant, pour aller chercher la bouteille de vin.

Il s’arrêta en chemin, en passant devant le four, pour observer l’avancer de la cuisson. Il sorti les pains qu’il avait mis au four, à l’étage inférieur. En un tour de main, il eut vite fait de les recouvrir d’huile d’olive, d’un peu de sel, recouvrant le tout de tomates et d’olives émincées. Il dressa les bruschetta élémentaires dans deux petites assiettes, et revint, finalement, se poser, à côté de Mahélia, où il s’était attribué la place, la bouteille de vin sous le coude. « Pour te faire patienter, parce que j’imagine que tu me foutra pas la paix avant d’être devant ton assiette. » Voyez, pas difficile à comprendre, le génie. Une fois qu’on la connaissait bien, il était même possible de deviner ses attentes avant qu’elle ne les exige haut et fort. Il resservit modérément les verres vides, relançant un autre sujet de conversation, un qui serait moins sensible. « J’ai vu que tu avais arrêté ton entreprise estivale. C’est bien. » Pas qu’elle n’était pas douée pour ce boulot, Mahélia connaissait parfaitement la position de Galaad sur le perfectionnisme de Mia. Ce qu’il appréciait, c’était qu’elle ne se soit pas laissée dictée par une vie fabriquée de toute pièce. A peu près comme lui. S’il continuait de cuisiner, ce n’était plus au même endroit. Au contraire. Dès qu’il avait eu les idées clair, il avait tout plaquer de cette vie fausse, sauf l’appartement, ça avait un côté pratique, pour retourner dans le monde des contes… jusqu’à être forcé de revenir.

« Evite de te précipiter. Avec un peu de chance, ça ne prendra que quelques semaines. » Mia eut un sourire goguenard mais tint sa langue en attendant que le jeune homme remarque de lui-même ce qui n'allait pas dans sa déclaration. Oh, elle savait bien qu'il avait angoissé à la pensée de devoir l'héberger pendant un temps aussi long. Seulement le plus tôt il se confronterait à la réalité de la situation, le mieux ce serait. Se voiler la face sur ce genre de choses ne l'aiderait pas à prendre la présence du génie avec philosophie. Génie qui s'amusait plutôt bien de voir l'expression de son hôte forcé se fermer comme il prenait conscience de l'énormité de l'hypothèse qu'il venait d'énoncer. « Ou pas. »  Profitant de ce que Galaad partait vers la cuisine, la blonde étendit ses jambes sur le canapé, poussant un soupir de bien être en étirant ses muscles fatigués. « Tu ne voudrais pas brusquer les Charming, quand même ? Déjà qu'ils ne sont pas d'une efficacité redoutable avec tout le temps dont ils disposent, qui sait ce qu'ils pourraient déclencher comme catastrophe sous pression.. » Le ton était joueur, comme d'ordinaire, mais il y avait une pointe d'amertume bien cachée dans le discours de Mahélia. C'était qu'elle, elle n'avait pas tout son temps. Elle le sentait filer entre ces doigts sans qu'elle puisse la moindre prise à laquelle se raccrocher. Et tout ça à cause des histoires d'une fichue famille pas capable de cantonner leurs problèmes relationnels à un fichu univers. Le génie ferma les yeux, se forçant à ne pas laisser la colère l'envahir. Respirer, ne pas y penser. Ça ne ferait que donner plus d'importance à la douleur.

Elle eut tout juste le temps de ramener ses jambes vers elle que Galaad réinvestissait l'espace, amenant avec lui vin et nourriture. Voilà qui était une distraction plus que bienvenue. Mia se redressa et s'empara de l'assiette avec plaisir. Enfin quelque chose à se mettre sous la dent ! « Tu imagines plutôt bien. » Comme s'il avait à faire un grand effort pour deviner ça. Après tout, il avait déjà vécu avec elle, même si dans un autre monde. Ecoutant d'une oreille distraite les commentaires du brun sur l'emploi qui l'avait occupée pendant la malédiction, elle croqua dans la bruschetta offerte. Sans surprise, c'était bon. On parlait de la cuisine d'un homme qui avait gagné sa vie sur les mets qu'il préparait. Elle savoura une deuxième bouchée histoire de combler peu à peu le vide dans son estomac avant de gratifier son compagnon d'une réponse. « Je ne vois pas quel intérêt il y avait à continuer. Mais apparemment la plupart de nos compagnons d'infortune se sentent en sécurité dans ces petits rôles qu'on leur a imposé. » Oui, elle était un poil condescendante. Il n'empêche qu'elle comprenait mal pourquoi tous ces gens continuaient de s'accrocher à un quotidien illusoire, inventé dans le but de les moquer. Soit, certaines fonctions étaient nécessaires pour assurer des conditions de vie acceptables en attendant le retour au pays. Pourtant on ne lui ferait pas avaler que maintenir les écoles ouvertes était une préoccupation primordiale. Ah ça, si tout ce beau monde se bougeait un peu pour trouver une solution à leur problème actuel, ce serait bien plus rapide ! Mais est-ce que quelqu'un y avait pensé ? Absolument pas. « Toi aussi tu as arrêté. » C'était autant une affirmation qu'une question sur les raisons derrière l'acte. Puis peut être un peu de fierté mal placée à voir que le miracle qu'elle avait accordé ne cherchait pas à adoucir la réalité en se rattachant à une vie inventée, mais il fallait vraiment bien cherché pour ne serait-ce que l'apercevoir.

Pour Mahélia et lui, comme pour tous les habitants de Storybrooke, le majeur problème n’était pas l'intrigue de Peter Pan. Non. Leur véritable problème était l’incapacité des Charming à gérer la situation. Donnez une demi-journée à Galaad, et il aurait trouvé une solution pour renvoyer tout le monde dans la Forêt Enchantée. Et ça n’aurait pas été joyeux. Il était impatient de retourner sur ses terres et de reprendre sa vie où elle s’était arrêtée. Car, plus que de regarder ces incapables mener la chasse à la sorcière – ou Pan- , c’était ce statut quo, qui agaçait le chasseur de créature. Cette phase de transition, où il ne voulait rien initier, puisqu’il savait que tout ce qu’il ferait serait fait en vain. Et il ne supportait pas cette impuissance, où il se retrouvait à tourner comme un lion en cage, en attendant de pouvoir retrouver son chez lui. Car ce n’était pas cet appartement, qui représentait sa maison. Ses parents ne l’avaient pas éduqué entre ses quatre murs. Il n’avait pas rencontré Mahélia ici. « Mais apparemment la plupart de nos compagnons d'infortune se sentent en sécurité dans ces petits rôles qu'on leur a imposé. » Galaad échappa un bref rire, narquois, qui résumait assez bien le fond de sa pensée. Tous ceux qui se greffaient à cette vie fabriquée de toute pièce, à ses yeux, n’étaient que des lâches, d’une manière ou d’une autre. Ce n’était pas eux, même si c’était une impression lourde et persistante. Galaad n’était pas né aux Etats-Unis et ses parents étaient bel et bien morts. Aucune identité fictive ne pourrait le convaincre du contraire.

Il resservit les verres du vin rouge, s’enfonçant un peu plus dans le canapé, posant sa tête sur le haut du dossier, échappant un soupir las. « J’suis sûr que la moitié espère rester ici à jamais. Que valent les racines, face à un confort minimal ? » C’était du cynisme, sur toute la ligne. Galaad estimait très bas les habitants qui ne désiraient pas partir. Oui, il était vieux jeu, et c’est vrai qu’il regretterait quelques merveilles de la technologie. Mais cela n’était rien, face à l’importance des traditions, de ses origines. Même si, pour lui, l’on pouvait dire que tout ceci se trouvait incarné dans la charmante blonde qui lui tenait compagnie. Ce n’était pas tout à fait ça, pour lui. Il tenait à Mahélia, en un sens –il ne le lui avouerait jamais, au risque d’en entendre parler jusque sa mort, et dans sa prochaine vie, peut-être – elle représentait sa famille. Mais cette situation était trop compliquée pour qu’il ne s’y attarde. D’autant plus qu’elle ne l’avait pas élevé. Elle avait été là, mais jamais trop présente. Ce dont Galaad avait besoin, c’était de sentir la forêt autour de lui, reconnaitre l’air de ses terres, le frisson de la traque.

« Toi aussi tu as arrêté. » Galaad tourna brièvement sa tête vers Mahélia, un sourire sur les lèvres, fière. Bien entendu. Ils étaient faits du même bois, non ? « Oui. Je n’aurais pas supporté de rester une seconde de plus à faire comme si de rien n’était. » Il échappa un petit rire, se redressant, attrapant son verre de vin, qu’il ne but pas dans l’immédiat, regardant l’alcool faire pleurer le verre. « Je suis retourné là-bas. Voir l’étendue des dégâts de mes propres yeux. » Il eut une grimace, amer, se rappelant l’état de son foyer. Là aussi, le temps n’avait rien épargné. 28 ans de jachère et d’oubli se remarquaient sans mal. « Ça m’a pris du temps. Je serai bien resté, mais seul, je n’aurais rien pu reconstruire… » La suite était évidente. Il était revenu ici, en attendant d’avoir de la main d’œuvre qui serait prête à le rejoindre. Galaad aimait sa solitude, mais pas au point de vivre seul sur des km². Et, s’il n’était pas retourné, peut-être n’aurait-il jamais retrouvé Mahélia. « Tu t’imagines, qui est-ce que tu aurais fait chier, si j’avais pas été là pour te servir de roue de secours ? » Au final, ça n’était pas si mal que ça.

Galaad avait toujours attaché beaucoup d'importance à ses origines, aux traditions et à d'autres concepts renvoyant aux fondements d'un être en tant que personne à part entière. C'était donc compréhensible qu'il voit d'un mauvais oeil ceux qui ne partageaient pas un tel engouement pour ces valeurs. Leur petite discussion avait dû le convaincre que Mahélia adhérait à son point de vue et était pressée de retrouver leur monde pour les mêmes raisons que lui. C'était une erreur. Le génie se fichait pas mal de ce que le brun appelait leurs "racines". Elle n'en avait pas ; elle était une entité par nature nomade. Si elle voulait quitter Storybrooke, c'était pour revoir les flux de magie courir autour d'elle et sentir les innombrables connexion qui s'établissaient entre elle et eux. Pour retrouver sa liberté et son pouvoir. Pour se sentir vivre de nouveau. A l'inverse de ce qu'il pensait et exprimait à voix haute, la blonde opterait toujours pour son confort personnel. Cependant ce n'était pas le moment de le faire remarquer à son hôte, pas quand la discussion était si détendue entre eux. C'était un calme rare qu'elle était trop fatiguée pour ruiner. Une fois n'est pas coutume, elle ne jouerait pas à dépouiller Galaad des maigres idées qu'il considérait comme justes à son sujet. Elle n'était pas d'humeur à lui rappeler à quel point il connaissait mal ses propres racines. De toute façon, Mia savait pertinemment que ce n'était pas à elle qu'il faisait référence sous ce terme. Elle n'avait jamais été assez présente dans sa vie pour tenir une place si importante à ses yeux, Dieu merci.

Alors la réfugiée du jour l'encouragea à parler de son propre abandon de poste. C'est sur qu'une bonne partie des habitants de leur petite ville devaient être bien déçus de la fermeture du meilleur traiteur dans les environs. Elle écouta donc le dit ex-traiteur s'expliquer tout en finissant sa bruschetta. C'est qu'elle avait vraiment, vraiment faim. Elle haussa tout de même un sourcil quand il confessa être revenu sur les terres de ses parents. Surement, ça n'avait pas dû être une vue très réconfortante. Pour être elle-même revenue très brièvement dans le Forêt Enchantée, Mahélia était consciente des dommages que les ogres avaient causé. « Ça m’a pris du temps. Je serai bien resté, mais seul, je n’aurais rien pu reconstruire… » Effectivement, il aurait sans doute besoin de pas mal de main d'oeuvre. Cependant, c'était difficile à imaginer pour la blonde : c'était le genre de problèmes qui ne se posaient pas à un génie. Les seules fois où elle avait pris conscience du coût qu'exigeaient de grands travaux c'était quand des paysans désespérés faisaient appel à elle pour reconstruire ce qu'une quelconque guerre avait rasé sur son passage. « Donc tu es revenu attendre patiemment que nos compatriotes se décident à arrêter de faire semblant d'avoir un futur ici et se rappellent qu'ils appartiennent à un autre monde. » Elle était plus subtile dans ses remarques moqueuses d'ordinaire, mais la fatigue et la douleur avaient leur effet sur son caractère. « On dirait que tu vas devoir patienter un moment. » Il faut dire que c'était un brin agaçant de regarder tout ce petit monde chercher à se convaincre qu'ils pouvaient mener une petite vie tranquille dans cette bourgade perdue. Encore plus, même, quand on considérait l'incapacité chronique des héros supposés de cette bourgade.

« Tu t’imagines, qui est-ce que tu aurais fait chier, si j’avais pas été là pour te servir de roue de secours ? » La question arracha un rire à la jeune femme. Certes, elle n'avait aucun contrat qui lui assurerait d'être bien accueilli chez une autre personne, mais ça ne voulait pas dire qu'elle était sans ressource. Il ne faudrait pas que le brun s'imagine être la seule solution à son problème. Après tout, elle aurait aisément pu attendrir Toothiana ou Kida. Revenu de son éclat de rire, elle offrit donc un sourire à Galaad. « Ne t'en fais pas pour moi, j'ai d'autres roues de secours si tu veux tout savoir. » Si lui était un être renfermé et peu sociable, ce n'était pas le cas de sa créatrice, merci bien.

L’aisance tranquille était revenue, naturel qui surgissait avec beaucoup plus d’empressement que ce qui aurait dû plaire à Galaad. Mais c’était ainsi. Il n’y avait pas vraiment de froid entre eux, et s’il y avait eu un semblant de distance, elle donnait cette fugace impression de disparaitre au fil des minutes, au long de la conversation qui s’installait paisiblement entre eux, entre les piques qui se lançaient, sans jamais se perdre, ni réellement blesser. Tout ce qui restait, finalement, était cette légère prudence, qui restait dans le fond de l’esprit de Galaad, comme une douce musique de Taylor Swift, qui lui aurait été impossible de se sortir de la tête. Prudence, qui, peut-être, ne s’en irait jamais. N’oublions pas qu’il était question du parfait solitaire, il préférait encore, mille fois, savourer sa solitude et son amertume, que d’admettre qu’il appréciait un minimum la présence de sa créatrice. Mahélia bousculait sans mal le quotidien ennuyeux qui tuait –métaphoriquement parlant – Galaad à petit feu. Ainsi, il continuait de se bousculer de ses douces illusions, savourant son intrus intemporel, tout en restant le bourru qu’il était.

« On dirait que tu vas devoir patienter un moment. » Sa mâchoire se crispa et la constatation du génie ne le laissait pas en joie. Ce n’était, pourtant, pas une nouvelle. Galaad savait pertinemment qu’il faudrait un certain temps avant qu’il ne puisse réellement s’installer sur sa terre d’origine. Ça lui manquait terriblement. A présent, seulement, étaient-ils deux à pleurer la lenteur de la tare Charming. Son ennui ne disparut pas entièrement, même s’il apprenait à relativiser, du mieux qu’il le pouvait. « Je n’ai pas d’autre choix que d’être patient, hm ? » Il serait bien aller botter le cul des prétendus héros, mais il ne voulait pas se retrouver en charge par après. Galaad était aussi heureux qu’il pouvait l’être, dans son poste de spectateur. Il déposa, finalement, son verre de vin sur la table basse, se relevant en un geste. Il jeta un coup d’œil vers Mahélia, avant de se diriger vers la cuisine. « Et puis, maintenant que tu es là, on s’ennuiera à deux. » L’attente aurait peut-être raison d’eux. L’un se jettera sur l’autre pour le faire taire, d’une quelconque manière. Avant que ça n’arrive, ils n’en étaient qu’aux premiers jours d’une colocation, qui ne manquerait pas d’en faire voire de toutes les couleurs, aux deux partis.

Galaad commença à mettre la table, les minutes restant sur le timer diminuant de plus en plus, l’odeur de la ratatouille embaumant, à présent, tout l’appartement. C’était une part de la cuisine que le chef aimait tout particulièrement, les odeurs, qui laissaient deviner les odeurs. Et s’il était vrai que la friture et le poisson laissaient une odeur un peu moins agréable, il n’était pas difficile pour lui d’imaginer la qualité de sa préparation. « Ne t'en fais pas pour moi, j'ai d'autres roues de secours si tu veux tout savoir. » Il plissa les lèvres, ne pouvant échapper le « alors, pourquoi tu es chez moi ? » ce n’était pas tout à fait un reproche. Ici, encore, c’était une boutade à la limite de l’innocence. Il avait l’impression qu’elle se contredisait, affirmant quelques minutes auparavant qu’elle n’avait passé un tel accord, du gite et du couvert, qu’avec lui – ou plutôt avec ses géniteurs – et pourtant, elle continuait de prétendre que quelqu’un d’autres auraient été ravis de l’accueillir ? (oui, aussi improbable que cela paraissait, comme dans les clips de T-Swift, il y avait bien des esprits tout aussi dérangés que celui de Mahélia, pour l’apprécier telle qu’elle était). Il passa une main sur son cou, au moment où la sonnerie retentit. « C’est prêt. » Sa voix ajouta à l’évidence. Elle aurait beau avoir milles lieux où se rendre, ici, elle serait toujours la bienvenue, même si c’était presque à contrecœur. Presque, seulement.

Oh, ça ne lui plaisait vraiment pas de devoir attendre. Galaad faisait sa tête des mauvais jours, la mâchoire dure et les yeux noirs. Le génie retint un sourire : il lui faisait penser au gamin colérique qu'il avait été autrefois. Pas de doute, ça la divertissait toujours autant de jouer avec les nerfs de son entourage. Et, étrangement, son logeur supportait mieux ça que le côté maniaque de celle qu'elle avait été à Storybrooke. Pas qu'il soit bien patient, il fallait le préciser. Ce grincheux voulait souvent tout, tout de suite. Sa question rhétorique arracha cette fois un véritable sourire à la blonde. C'était une leçon qui améliorerait beaucoup son caractère, de devoir attendre. Si seulement elle n'avait pas à observer la roue du temps tourner elle aussi... « Et puis, maintenant que tu es là, on s’ennuiera à deux. » Si seulement ils s'ennuyaient tout court. Asticoter le brun faisait des merveilles pour Mahélia à ce niveau là. Et puisqu'il n'était pas du genre à se laisser faire, ils tomberaient bientôt dans leur jeu habituel. Il était fait de piques, de puériles vengeances, de sous entendus. Ils flirtaient toujours à la limite d'en venir à des procédés plus violents. Ou d'une toute autre nature. Avec le temps qu'ils avaient devant eux, l'un des deux finiraient bien par franchir la ligne. Ce qui ne pouvait pas arriver. Ce serait bien assez dur de conserver le secret sur son état de faiblesse actuel en vivant avec une telle proximité, sans rajoute une partie de jambes en l'air là-dedans. Les choses étaient suffisamment compliquées en ce moment sans aller chercher des complications inutiles.

Ses pensées prirent vite une toute autre tournure comme Galaad laissait entendre qu'en la logeant il était son sauveur. Comme si elle n'avait personne d'autre sur qui compter. Ce qu'elle lui expliqua en riant de bon cœur. Puis même sans compter sur ses amis, Mahélia était débrouillarde. Ça n'aurait pas été compliqué de charmer un plaisant célibataire des environs, et il y en avait pour tous les goûts. Peut être même que c'est ce qu'elle aurait dû faire. Ça aurait eu l'avantage de la simplicité. Puis peut être aurait-elle trouvé un logement plus grand, une compagnie de meilleure qualité et moins de complications. Hmm. Pourquoi avait-elle choisi de venir trouver refuge ici, déjà ? « Alors, pourquoi tu es chez moi ? » Elle fit mine de ne pas avoir entendu le grognement qui faisait parfaitement écho à ses propres réflexions. En revanche, elle se mit sur ses pieds dès que la sonnerie du four retentit. Elle masqua un léger vertige, une seconde de flottement dans sa démarche, seule victoire de la douleur qu'elle concéda de mauvaise grâce. Elle prit place à table avec un sourire ravi. Les odeurs flottaient autour d'eux, lui mettant l'eau à la bouche. « Je sais que la nourriture est de bonne qualité ici, c'est une raison suffisante pour moi. » Voilà. Elle savait qu'il y avait une raison logique pour qu'elle ait choisi d'endurer Galaad. Une autre que cette agréable tension et l'attraction du danger qu'elle représentait. C'est qu'elle était plutôt fine bouche, Mahélia. « Je ne me souviens pas que tu cuisinais aussi bien au monde des contes. La malédiction t'aura au moins permis d'améliorer ça. » Comme quoi le sort pouvait avoir ses bons côtés, s'il ne finissait pas par la tuer.

Galaad fut à peine impressionnée quand Mahélia utilisa l’excuse de sa cuisine, pour motiver le choix de son squattage. Il leva les yeux au ciel, tout en sortant le plat du four, se reculant pour ne pas avoir droit à un nuage de chaleur dans le visage, prenant ses précautions pour poser le plat brulant sur les sets de tables, installés sur celle-ci. En quelques gestes rapides, les deux assiettes furent servies de la ratatouille. Il ajouta, également, une petite viande hachée préparée, se servant du jus des légumes comme sauce de fortune. Voilà, rien de bien compliqué. Il alla récupérer les verres à vin qui reposaient sur la table basse, et s’installa à l’autre coin de la table, à côté de Mahélia. « Je ne me souviens pas que tu cuisinais aussi bien au monde des contes. La malédiction t'aura au moins permis d'améliorer ça. » Il piqua ses légumes en mangea une première bouchée, avant de répondre aux mauvais souvenirs du génie. Il savoura les arômes et fut satisfait de sa préparation. Oui, au moins c’était ça d’améliorer. « C’est parce que j’avais un cuisinier, je te rappelle. » Quels étaient les avantages d’être un petit propriétaire terrien, si Galaad ne pouvait pas s’offrir quelques serviteurs ? S’il avait pris l’habitude de vivre seul, dans le monde des contes, ce n’était pas pour autant qu’il n’était pas entouré. Son domaine était beaucoup trop grand pour qu’il s’en occupe seul, et quand il était occupé par un ordre de mission, il ne pouvait pas s’occuper de ses terres. Son domaine comprenait une dizaine d’individus, qui veillaient à l’ordre et au bon déroulement de la vie quotidienne.

Maintenant, il n’y avait que lui, pour son petit appartement. Une vie de solitaire pour une prison trop grande, dans une vie trop calme pour lui. Finalement, l’arrivée de Mahélia lui ferait peut-être du bien ? Même s’il était trop buté pour le reconnaitre et que la pensée surgit dans un coin profondément caché de son inconscient – actuellement, elle resterait l’emmerdeuse de génie, qui s’invitait quand bon lui semblait. « Chez toi, on ne peut pas dire que la malédiction t’aies apporté grand-chose. Tu étais aussi chiante que maintenant. » La blague était évidente, par son ton, et son attitude. Il n’en restait pas moins un fond de vérité. Dans les souvenirs partagés, ils avaient rompus, parce qu’ils ne se supportaient plus du tout. Il préférait, nettement, Mahélia à Mia. Au moins n’était-elle pas une manipulatrice de première… Galaad continua de manger en silence, se perdant momentanément dans ses pensées. Avant de soulever un élément important à sa réflexion. « Une fois qu’on aura fini de manger, j’installerai le lit d’appoint dans mon bureau. » Il fit une pause, jugeant bon de préciser. « Pour toi. » Afin d’éviter qu’elle pense avoir droit au lit de maitre. Il acceptait de l’héberger, mais il était hors de question qu’elle prenne ses aises et qu’elle lui fasse vivre une nuit d’enfer, en plus de lui pourrir ses journées.

Ah oui. Galaad était de ces humains qui s'encombraient d'un tas de responsabilités inutiles pour mieux les redistribuer à d'autres ensuite. Mahélia, elle trouvait ça ridicule. Pourquoi s'encombrer d'une terre si on ne pouvait la gérer ? Elle tiendra sa langue, ne souhaitant pas se mettre le bougre à dos alors qu'elle avait une assiette pleine devant elle. Il serait prêt à la lui reprendre si elle se montrait aussi insupportable qu'elle en avait l'habitude, et elle s'était promis de garder sa langue dans sa poche pour les premiers soirs, histoire de l'habituer doucement à ses caprices. Puis elle savait pertinemment que ce n'était pas une question de simple bon sens ou raisonnement pratique, mais une différence fondamentale de culture qui les opposait sur ce point. Galaad avait beau oublier plus souvent qu'à son tour toutes les différences fondamentales qui opposaient un génie à un être humain, Mahélia en restait toujours consciente. La douleur qui pulsait dans ses veines ne lui laissait pas le choix. Elle laissa donc passer la réponse, se penchant plutôt sur le bon plat mijoté avec soin. Elle piqua quelque légumes et un peu de viande du bout de sa fourchette et s'accorda un moment pour profiter des saveurs. « Chez toi, on ne peut pas dire que la malédiction t’aies apporté grand-chose. Tu étais aussi chiante que maintenant. » Elle haussa un fin sourcil, une moue amusée aux lèvres, bien consciente de l'innocence de la pique. Même elle, quand elle y repensait, trouvait Mia et sa quête de la perfection quelque peu agaçante. Cependant, on ne pouvait pas dire que les manières de rustre susceptible du brun aient aidé l'organisatrice à s'adoucir. Comment leurs deux équivalents storybrookiens en soient venus à sortir ensembles, cela restait un mystère. « Tu dis ça, mais au fond tu es bien content que Mia n'ait pas déteint sur moi. » Grand Dieu merci : elle avait été bien trop sérieuse et n'avait pas assez profité de la vie, celle là.

Pour la première fois depuis ce matin, le génie sentait un brin de sérénité lui revenir. Si la compagnie aurait pu être plus agréable, la nourriture et le vin était d'une très bonne qualité. La douleur semblait refluer, ne serait-ce qu'un tout petit peu et la laisser souffler pour un court moment. Elle était bien loin la mauvaise surprise de son inondation, désormais qu'elle était propre, sèche et qu'elle se remplissait enfin le ventre. Si elle n'avait pas encore totalement finie son assiette, elle en avait déjà vidé une bonne partie, témoin silencieuse de la faim qui l'avait tiraillée dans la soirée. La question du lit la sortit brusquement de cet état de bien être. Elle aurait dû s'y attendre. Si Galaad était assez bien élevé pour respecter d'ancienne dettes, il ne l'était pas au point de céder son lit. Ou peut être le faisait-il, comme tout bon hôte, seulement pas pour elle. C'était légèrement vexant. Ses lèvres se pincèrent, mais elle décida de ne pas faire de scandale. Elle ne savait même pas à quoi ce lit d'appoint ressemblait. Et s'il n'était pas à son goût, il serait toujours temps pour elle de partir jouer les charmeuses auprès des riches célibataires de Storybrooke. Elle méritait un logement de meilleure qualité, après tout. Dire que le brun n'avait même pas une chambre d'amis ! « J'espère qu'il est un minimum confortable », se contenta-t-elle de remarquer. Elle ne s'enthousiasmait vraiment pas à l'idée de passer une nuit à se tourner et se retourner, pas quand ses muscles criaient déjà au supplice. « Et que tu as des oreillers en plus. Hors de question que je dorme sans oreillers. » Il devait déjà le savoir vu que Mia elle-même avait toujours eu besoin de deux bons oreillers pour dormir tranquillement et que c'était là un trait qu'elle tenait tout droit du génie. Repréciser cela ne ferait toutefois pas de mal.

Galaad manqua de s’étrangler à la remarque de Mahélia et il ne put que hocher affirmativement de la tête. Heureusement, oui, que le mauvais caractère de Mia n’avait pas eu plus d’effet sur la personnalité du génie, sinon, il ne lui aurait JAMAIS ouvert la porte. Il tenait à sa vie et il n’était pas sûr de rester sain d’esprit assez longtemps, s’il avait dû vivre avec cette abomination de la nature. Non mais franchement, d’où venait cette blague de les mettre en couple, durant la malédiction ? C’était sa créatrice. Il n’y avait aucun moyen qu’il puisse se sentir attirer par elle c’est bien, du moment que toi t’y crois. Mahélia n’était qu’une grande énigme qui surplombait la totalité de sa vie. Elle avait toujours été là, et elle serait encore là, bien longtemps après sa mort. Il se demandait combien de générations d’Homme elle avait vu passer. Hum. Autant faire la conversation à ce sujet. Ou essayer. « Faut dire qu’avec tes centaines d’années, ça aurait été étrange qu’une peste de 28 ans te dépasse… » Attention, transition de fou ! « D’ailleurs » il fronça les sourcils, sa fourchette s’attardant sur son plat « t’as quel âge ? » Il y avait un petit gène. Parce que, petit, Galaad avait été interdit de s’approcher de Mahélia, à chaque fois qu’il montrait de l’intérêt au génie, il ressentait cette interdiction mainte fois répétée par ses parents. Mais dans son regard, loin derrière l’idée de l’enfant curieux qu’il avait été, brillait un questionnement ingénu. De cet intérêt, entier, qu’il lui portait, parfois. Loin de l’idée qu’elle était une créature étrange, à identifier. Il s’intéressait à elle. C’était tout.

Bien entendu, il était difficile pour Galaad de rester inoffensif longtemps, surtout en présence de la blonde, qui lui faisait revenir ses sales manies plus rapidement qu’une horde d’ogre – oui, elle pouvait apprécier le compliment. Surtout qu’il était temps de faire un point sur la logistique. Il ne fut pas étonnée quand elle demanda un lit confortable et il haussa les épaules. « Je suppose. Je n’achète pas de la mauvaise qualité. Mais il a rarement servi. Donc le matelas sera un peu dur, je présume. Enfin, tu le découvriras ce soir. » Et sur le moment, il fit une prière intérieure, pour qu’il soit assez confortable pour elle. Sinon il allait l’entendre râler à longueur de journée demain, sur le mal de dos qu’elle aurait attrapé. Oui, il n’envisageait pas vraiment la possibilité qu’elle s’incruste dans son lit. « Et que tu as des oreillers en plus. Hors de question que je dorme sans oreillers. » Galaad finit son assiette, repoussant le plat vide sur le côté. Il posa ses coudes sur la table, se grattant d’une main sa mâchoire. « J’ai toujours tes vieux oreillers, donc je suppose que eux, aux moins, seront à ta convenance. » Il y eut une petite pause. « Quoi ? Je n’allais pas les jeter. Est-ce que tu sais combien je les ais payés ? » Il s’interdit de songer qu’il ne les avait certainement pas payé, que Mahélia, réellement, n’avait probablement jamais dormi dans son lit. Mais les souvenirs étaient là, tout comme les oreillers, qui n’attendaient plus que leur propriétaire.

Oh, il perdait toutes ses bonnes manières, ce cher Galaad ! Se permettre de poser une telle question... Une étincelle brilla dans les pupilles de Mahélia, amusée qu'elle était de voir sa curiosité de gosse revenir au galop. C'était ce même trait qui avait si souvent poussé ses parents à le réprimander. Etrange de constater que des gens qui lui devaient leur unique fils se méfie autant d'elle. Ils étaient plus intelligents que la moyenne, ou la sous-estimait moins que les seigneurs auxquels elle avait habituellement à faire. Le brun n'avait jamais vraiment appris d'eux. Il avait beau clamer se méfier d'elle sur tous les toits et la préférer le plus loin possible de lui, il l'accueillait sans vraiment rechigner et retombait vite dans une attitude familière et décontractée. Trop pour le goût de Mahélia. Il ne la sous-estimait pas, pas vraiment. Seulement tout dans sa façon d'être déclarait clairement qu'il ne craignait rien d'elle, à part les taquineries habituelles. En toute honnêteté, il ne pensait pas qu'elle ferait quoique ce soit de sérieux contre lui. Il n'avait aucune idée d'à quel point elle était changeante. Et elle n'était pas en position de le lui démontrer, au diable ce monde sans magie. Elle se contenta donc d'afficher une mine offusquée du plus bel effet, sa fourchette à mi chemin entre son assiette et sa bouche. « Voyons, Galaad, personne ne t'a appris qu'on ne posait pas ce genre de question à une femme ? Il va falloir reprendre tes manières. » Même si c'était dit sur le ton de la plaisanterie, ça n'en restait pas moins vrai. Le brun était un peu brute de décoffrage : il ne s'embarrassait pas de belles formule et de plaisants gestes. Pour lui les actes valaient mieux que les discours et il négligeait cruellement l'effet de la forme. C'était pourtant elle qui séduisait, qui convainquait et qui finissait par laisser l'impression la plus durable.

Sans lui accorder de réponse, Mahélia s'intéressa au sujet autrement plus important des lits. Et elle était moins que ravie par les dispositions que comptait prendre son logeur. Décidant de lui laisser le bénéfice du doute, elle ne manqua pourtant pas de réclamer des oreillers, éléments indispensables à son sommeil. Et Dieu qu'elle avait besoin de sommeil. La réponse innocente du bougon lui arracha un sourire narquois. Vraiment, il tendait le bâton pour se faire battre. Le génie ouvrit la bouche, prêt à lui asséner une des dizaines de répliques moqueuses qui avaient écloses dans son esprit, mais il la prit de vitesse. Le prix. Quelle bonne excuse, s'exclama une part de son esprit. « Je ne savais pas que tu avais autant gâté Mia. » Le roucoulement ridicule était suffisamment sarcastique pour qu'elle ne sente pas le besoin de rajouter autre chose. Et pourtant. Elle reposa sa fourchette dans son assiette désormais vide, son expression un peu plus blasée qu'auparavant. « Et puis, techniquement, tu n'as rien dépensé. » Elle critiquait, Mahélia, c'était son habitude, mais elle était plutôt bien heureuse qu'il ait conservé ses anciens oreillers. Ça, au moins, serait de qualité satisfaisante. Elle croisa les bras sous sa poitrine et se cala confortablement contre le dossier de la chaise. Elle plissa un instant les yeux, étouffant un baillement. « C'était bon. » Elle ne le remercierait pas pour le repas, mais ça ne lui écorchait pas la bouche de reconnaître son talent culinaire. Qu'il prenne ses simple petits mots pour le compliment qu'ils étaient, car c'était le seul qu'elle accorderait.